Quand on cherche les causes de la crise politique des prétendues « démocraties », on tombe forcément sur le rôle des partis et sur celui de l’élection, qui porte dans son génome la victoire des partis sur les individus.
Or, les partis ne sont pas du tout indispensables pour que les hommes fassent librement de la politique, au contraire même : les Athéniens ont fait plus de politique que tout autre peuple au monde et ils… interdisaient carrément les partis politiques.
Par ailleurs, l’organisation interne de nos partis semble présenter exactement les mêmes vices que nos institutions, qu’elles soient nationales ou européennes : les règles supérieures y sont écrites par les hommes au pouvoir, qui s’en servent évidemment pour se protéger de l’éviction et même de la contestation.
L’idée m’est donc venue d’imaginer un mouvement politique qui donne l’exemple,
un mouvement qui, en interne, ne permet pas de rechercher le pouvoir,
un mouvement qui ne permet pas de garder le pouvoir,
un mouvement qui n’impose pas de ligne politique (économique et sociale) et qui permet à ses membres d’en changer à tout moment,
un mouvement qui impose la rotation des charges en utilisant largement (mais pas forcément) le tirage au sort,
un mouvement qui protège l’isègoria (droit de parole pour tous) et le référendum d’initiative populaire au-dessus de tout,
un mouvement qui garantisse l’indépendance économique et politique de ses propres médias (télévision, instituts de sondages et de statistiques, Cour des comptes…),
un mouvement qui ne laisse pas ses propres chefs toucher une ligne de sa Constitution (ses statuts),
un mouvement qui protège les opinions dissidentes comme des trésors et qui met en scène les conflits pour les dédramatiser correctement, rationnellement,
un mouvement qui protège l’essentiel (séparation du pouvoir constituant et des pouvoirs constitués, rotation des charges, responsabilité des acteurs, initiative individuelle, honnêteté de l’information…) dans une partie intouchable de sa Constitution (intouchable sauf à l’unanimité),
un mouvement dont tous les membres surveillent quotidiennement le respect et l’intégrité de leur constitution en la considérant comme le texte principal, celui qui est à l’origine de tous les remparts contre les abus de pouvoir,
un mouvement qui donne l’exemple en s’inspirant d’Athènes sans en faire un modèle ou un exemple, mais en voyant cette histoire comme un germe, le germe de la vraie démocratie, démocratie dont les excès éventuels seraient pourtant modérés,
mot-clef qui n’est possible que par un réel contrôle des pouvoirs,
et donc une réelle séparation des pouvoirs,
et donc un processus constituant honnête,
et donc des délégués constituants désintéressés,
donc pas élus mais tirés au sort, parmi des « valeureux » désignés librement par les citoyens,
« librement » c’est-à-dire SANS la contrainte des partis imposant leurs candidats (hommes de pouvoir non désintéressés)…
Je vous propose cette première mouture, juste une trame très grossière, pour que chacun puisse y réfléchir et apporter sa contribution.
L’original (à la mi novembre 2007) reste dans un fichier dont voici l’adresse : [1]
Quelques noms possibles pour ce parti particulier (le dernier des partis, comme il y a eu le dernier des Mohicans ?) :
. Le mouvement sans chef
. Le parti des sans partis (PSP)
. Le mouvement sans programme (MSP)
. Le processus démocratique, rien que le processus (LPDRQLP) . Démocratie directe
. Processus démocratique
. Consultation populaire
. Initiative populaire
. Parti démocratique
. Le clérotérion (la machine qui servait à tirer au sort les magistrats dans la démocratie athénienne.)
PACTE FONDATEUR
CONSTITUTION INTERNE
Objet : association à caractère politique qui a pour objet de favoriser par tous les moyens légaux la réappropriation des institutions et du contrôle des pouvoirs par les citoyens. Objectif central et décisif du mouvement : faire désigner une assemblée constituante honnête, c’est-à-dire désintéressée, composée d’humains qui n’écrivent pas des règles pour eux-mêmes : donc tirée au sort, ou bien élue parmi des non candidats.
Devise : « ce n’est pas aux hommes au pouvoir d’écrire les règles du pouvoir ».
Spécificités fortes par rapport aux partis traditionnels :
- Pas de programme économique et social puisque c’est le peuple lui-même qui l’établira, point par point. Seul programme = garantir la vraie démocratie. Rien sur les politiques, tout sur les processus de décision et les contrôles des pouvoirs. Programme : rendre le Politique au Peuple.
- Faire des initiatives populaires l’emblème de la démocratie : le rouage central des institutions est le référendum d’initiative populaire.
- Appliquer en interne les institutions et les procédures que le mouvement propose pour le pays (en utilisant volontairement les mêmes noms, par souci pédagogique, faisant de l’association un laboratoire de la démocratie à construire) :
- des citoyens politiquement égaux et donc potentiellement gouvernés et gouvernants,
- deux assemblées, composées de délégués élus ou de délégués tirés au sort,
- un mandat de délégué limité = porte-parole et surtout pas chef, avec reddition des comptes (mandat « semi-impératif ») et révocabilité à tout moment (selon des procédures contradictoires et en respectant les droits de la défense classiques). Les délégués doivent constamment rechercher la volonté générale et la traduire fidèlement à l’assemblée sans y substituer leur propre volonté => cela entraîne des consultations fréquentes de la base,
- des modes de scrutin et des règles électorales prévues dans la constitution (et donc totalement hors de portée des hommes au pouvoir) : décompte et respect du vote blanc (qui signifie expressément le rejet global de tous les candidats et conduit simplement à recommencer l’élection avec d’autres candidats, quand la procédure est l’élection plutôt que le tirage au sort), possibilité d’élire des non candidats (qui peuvent refuser) ; (à débattre : ne pas accepter de candidature, car les hommes désirant le pouvoir sont sans doute les derniers à qui il faut le donner),
- une possibilité de révocation interne dans les assemblées aux 8/10èmes (procédure de l’ostracisme, précieuse pour protéger la démocratie contre les oligarques),
- un gouvernement responsable devant les assemblées,
- des juges (arbitres politiques) tirés au sort et sous contrôle (d’autres tirés au sort), chargés de trancher tous les conflits entre organes,
- des médias politiquement et économiquement indépendants mais pourtant sous contrôle d’un CSA, lui-même indépendant,
- l’initiative populaire toujours prioritaire,
- la rotation des charges : mandats courts et non renouvelables,
- le droit de parole pour tous, à tout moment et à tout propos (iségoria),
- Une révision de la Constitution (interne) rigoureusement interdite aux organes de pouvoir (de l’association) : seule procédure de révision admissible = Assemblée Constituante tirée au sort (mais dont une partie de la précédente est conservée pour expliquer et défendre ses positions), dont le projet est toujours soumis à référendum (consultation générale des citoyens de base, par bulletin secret, à domicile, en évitant leur réunion en assemblée pour éviter la pollution des phénomènes de foule).
La balle est dans votre camp pour améliorer cette graine de projet iconoclaste… :o)