[Très important, faites passer] Et si les municipales étaient l’occasion de mettre en place un RIC ? par (le formidable) Raul Magni-Berton

6/03/2020 | 0 commentaires

Chers amis,

Ne ratez pas cette impor­tante étude du Raul sur nos pos­si­bi­li­tés juri­diques actuelles d’ins­ti­tuer loca­le­ment le RIC, ici et maintenant.

À impri­mer, à lire le crayon à la main, et à faire connaître par­tout autour de vous (car il ne faut pas comp­ter sur les pré­ten­dus « jour­na­listes » mains­tream pour faire une publi­ci­té loyale à une telle syn­thèse des moyens d’é­man­ci­pa­tion popu­laire par le RIC).

Bon cou­rage à tous, pour sup­por­ter cette période d’é­lec­tions où les médias nous rebattent les oreilles toute la jour­née avec le mot démo­cra­tie lit­té­ra­le­ment mis à l’en­vers, et confondent cent fois par jour, et sans per­sonne pour les contre­dire, élire et voter…

Hâte de vous retrou­ver demain à Longuyon 🙂

Étienne.



http://​the​con​ver​sa​tion​.com/​e​t​-​s​i​-​l​e​s​-​m​u​n​i​c​i​p​a​l​e​s​-​e​t​a​i​e​n​t​-​l​o​c​c​a​s​i​o​n​-​d​e​-​m​e​t​t​r​e​-​e​n​-​p​l​a​c​e​-​u​n​-​r​i​c​-​1​3​0​896

Raul Magni-Ber­ton : L’un des prin­ci­paux points de reven­di­ca­tion lors du mou­ve­ment des « gilets jaunes » a été le Réfé­ren­dum d’initiative citoyenne – le RIC. Une reven­di­ca­tion qui a été lar­ge­ment relayée par la presse natio­nale entre décembre 2018 et mars 2019 mais qui, depuis, fait de moins en moins la une dans le débat public.

Avec l’essoufflement du mou­ve­ment des « gilets jaunes » et la mobi­li­sa­tion impor­tante des der­niers mois sur la réforme des retraites, l’appel à la démo­cra­ti­sa­tion par le RIC a per­du sa force. En fait, le refus caté­go­rique de cette mesure de la part de la majo­ri­té en place semble avoir décou­ra­gé ses soutiens.

Pour­tant, le RIC local, et plus géné­ra­le­ment la démo­cra­ti­sa­tion de la vie locale, sera l’un des enjeux des pro­chaines élec­tions municipales.

Cette reven­di­ca­tion n’est certes plus dans la rue ni dans les médias, mais elle conti­nue à faire son che­min dans des cercles plus res­treints. Plu­sieurs asso­cia­tions visent à consul­ter les citoyens sur la forme que peut prendre un RIC, à l’image d’Objec­tif RIC ou de Culture RIC.

Plu­sieurs réfé­ren­dums locaux orga­ni­sés par les habi­tants ont été lan­cés, à Gre­noble entre le 14 et le 20 octobre 2019 ou à Saint-Affrique dans l’Aveyron le 11 novembre.

Enfin, depuis un an nous voyons émer­ger des think tanks, groupes de pres­sion, mobi­li­sa­tions locales visant à ins­tau­rer le RIC au niveau natio­nal et local. Des ins­ti­tuts se spé­cia­lisent éga­le­ment sur ce pro­ces­sus et sa mise en place concrète en France, comme l’Ins­ti­tut de recherche ter­ri­toire démo­cra­tique dont je suis membre.

Ric local et expé­ri­men­tal à Saint-Affrique : Après les débats en petits comi­tés, les Gilets jaunes invitent au vote par réfé­ren­dum https://www.avey​ron​di​gi​tal​news​.fr/​2​0​1​9​/​1​1​/​2​2​/​ric-local-et-experimental-a-saint-affrique-apres-les-debats-en-petits-comites-les-gilets-jaunes-invitent-au-vote-par-referendum/?feed_id=1661&_unique_id=5dd7ea00b5b1d 

Ric local et expérimental à Saint-Affrique : Après les débats en petits comités, les Gilets jaunes invitent au vote par référendum 

« Ins­tau­rer aus­si sou­vent que pos­sible l’utilisation de pro­duits bio issus de pro­duc­teurs locaux dans les pré­pa­ra­tions des cui­sines col­lec­tives de Saint- Affrique » ; « inter­dire l’usage du gly­pho­sate et des pro­duits phy­to­sa­ni­taires sur la com­mune » ; « inté­grer le Ric dans les prises de déci­sion de la com­mune ». Ces trois pro­po­si­tions, les plus sou­te­nues par …

Des initiatives à concrétiser lors des municipales

Les élec­tions muni­ci­pales consti­tue­ront la pre­mière étape qui per­met d’évaluer l’activité de ces groupes. Plu­sieurs per­sonnes impli­quées dans le mou­ve­ment des « gilets jaunes » ont choi­si, au niveau muni­ci­pal, soit de lan­cer une asso­cia­tion pour faire pres­sion sur les can­di­dats, soit de créer des listes citoyennes indé­pen­dantes de tout par­ti poli­tique, soit encore d’entrer dans des listes sou­te­nues par des par­tis poli­tiques à la condi­tion d’exiger le RIC.

C’est le cas par exemple, de la France Insou­mise, d’Europe Éco­lo­gie les Verts ou du Ras­sem­ble­ment natio­nal.

Pro­mou­voir le RIC au niveau local n’est pas un com­bat évident. La France est un pays très cen­tra­li­sé et bien peu de com­pé­tences sont délé­guées, qu’il s’agisse du niveau local, et encore plus muni­ci­pal. Cepen­dant, pro­mou­voir le RIC au niveau local est une stra­té­gie qui vise avant tout à refaire vivre cette reven­di­ca­tion, à la faire connaître aux citoyens et à l’exercer concrètement.

Une mani­fes­tante en gilet jaune : sa veste porte l’inscription RIC lors d’une mobi­li­sa­tion à Paris le 28 sep­tembre 2019. Zaka­ria Abdelkafi/AFP

Illégalité de la mesure

Le prin­ci­pal pro­blème lié à cette reven­di­ca­tion au niveau muni­ci­pal est que le RIC est, en tant que tel, illégal.

Plus géné­ra­le­ment, les com­munes n’ont pas la pré­ro­ga­tive qui consiste à déci­der com­ment elles vont prendre des déci­sions, puisque celle-ci revient à l’État et appa­raît dans le Code géné­ral des col­lec­ti­vi­tés ter­ri­to­riales. D’après celui-ci, les deux ins­tru­ments clefs du RIC – la péti­tion et le réfé­ren­dum – sont pré­vus, mais d’une façon qui n’est pas com­pa­tible avec le fonc­tion­ne­ment du RIC. Ce der­nier pré­voit qu’une péti­tion puisse déclen­cher auto­ma­ti­que­ment un réfé­ren­dum dont le résul­tat est contrai­gnant pour les pou­voirs publics. Par consé­quent, il s’agit d’une pro­cé­dure où, à aucun moment, les repré­sen­tants ont leur mot à dire.

Or, quatre dis­po­si­tifs pré­voient l’utilisation de la péti­tion ou du référendum.

D’autres mesures déjà prévues

Tout d’abord, il existe dans la Consti­tu­tion la pos­si­bi­li­té de lan­cer une péti­tion pour deman­der l’inscription d’une ques­tion à l’ordre du jour d’une assem­blée locale.

Il n’y a pas encore de texte d’application de ce dis­po­si­tif, mais les com­munes peuvent y faire appel dans la mesure où il s’agit d’un droit consti­tu­tion­nel­le­ment pro­té­gé. Cepen­dant, ce droit ne per­met pas de déclen­cher un référendum.

Il existe éga­le­ment la consul­ta­tion d’initiative popu­laire, selon laquelle 20 % des ins­crits peuvent déclen­cher un réfé­ren­dum à tra­vers une péti­tion, mais ce réfé­ren­dum n’est pas contrai­gnant pour les pou­voirs publics.

D’où son label « consul­ta­tion », qui signi­fie qu’il est consul­ta­tif. Il faut éga­le­ment noter que le déclen­che­ment du réfé­ren­dum n’est pas contrai­gnant non plus, si bien qu’à chaque étape le conseil muni­ci­pal peut arrê­ter le processus.

Par ailleurs si les consul­ta­tions à l’initiative de la col­lec­ti­vi­té ter­ri­to­riale existent, elles ne pré­voient ni d’initiative citoyenne, ni de réfé­ren­dum contraignant.

Enfin, si le réfé­ren­dum local lui est bien contrai­gnant, il faut que la par­ti­ci­pa­tion atteigne 50 %. Et, l’initiative de ce réfé­ren­dum revient au conseil municipal.

Un guide pour le RIC

Au-delà de ces dis­po­si­tifs, aucune autre pro­cé­dure ne peut être mise en place, sous peine d’être dénon­cée par le pré­fet et annu­lée par le juge admi­nis­tra­tif. Le der­nier cas en date remonte à 2018, quand la muni­ci­pa­li­té de Gre­noble a vu son RIC – appe­lé Inter­pel­la­tion et vota­tion citoyenne – annu­lé de cette façon. Dès lors, il est pré­fé­rable se conten­ter des dis­po­si­tifs exis­tants. La méthode la plus intui­tive est de pous­ser les can­di­dats à uti­li­ser la consul­ta­tion d’initiative popu­laire, comme le fait effi­ca­ce­ment le Comi­té de liai­son pour l’initiative citoyenne. Ce comi­té est deve­nu un véri­table lob­by pour pro­mou­voir le RIC, en ras­sem­blant les per­sonnes morales qui défendent cette ins­ti­tu­tion et en fai­sant pres­sion sur les élus.

Cepen­dant, il existe une alter­na­tive juri­dique pour mettre en place un RIC au niveau local bien plus effi­cace que la consul­ta­tion. Les détails sont don­nés dans le « Guide pour mettre en place le Réfé­ren­dum d’initiative citoyenne dans une com­mune dès aujourd’hui » en accès libre sur le site de l’Institut de recherche Ter­ri­toire démo­cra­tique et auquel j’ai moi-même participé.

La pré­co­ni­sa­tion de ce guide, écrit à l’origine pour la mise en place du RIC à Gre­noble, a été reprise par plu­sieurs listes can­di­dates aux élec­tions muni­ci­pales, dont deux des trois citées plus haut.

Il s’agit d’enchaîner trois dis­po­si­tifs par­fai­te­ment légaux : le vœu, la péti­tion et le réfé­ren­dum local.

Pho­to prise le 24 octobre 2019 dans le quar­tier Arle­quin, à Gre­noble, où les habi­tants ont mis en place un RIC concer­nant l’avenir de cer­tains bâti­ments dont la démo­li­tion ou la réno­va­tion est pré­vue. Jean‑Pierre Clatot/AFP

Trois dispositifs cruciaux

Tout d’abord, il faut que le conseil muni­ci­pal for­ma­lise son inten­tion poli­tique d’octroyer ce nou­veau droit aux citoyens à tra­vers un acte écrit, mais non contrai­gnant. Ceci peut se faire par le vœu.

Cela signi­fie que le conseil muni­ci­pal demande au maire d’être sai­si sur toute ques­tion fai­sant l’objet d’une péti­tion écrite par les citoyens et remise au conseil muni­ci­pal ; c’est une sub­ti­li­té légale qui per­met d’engager le conseil muni­ci­pal et le maire, tout en n’ayant pas de valeur légale. Il ne confère donc pas un « droit » mais un enga­ge­ment à faire comme si ce droit existait.

Ain­si, le tri­bu­nal admi­nis­tra­tif de Paris a consi­dé­ré en 2011 qu’un vœu du conseil de Paris ten­dant à ce que le maire le sai­sisse de cer­taines péti­tions n’était pas contraire au droit. Cette étape consiste à rendre cré­dible le dis­po­si­tif aux yeux des citoyens.

La deuxième étape consiste à uti­li­ser le droit de péti­tion pour deman­der l’inscription d’une ques­tion à l’ordre du jour d’une assem­blée locale ins­crit dans la consti­tu­tion. Il s’agit ici de mettre concrè­te­ment en œuvre le dispositif.

Puisque ce dis­po­si­tif péti­tion­naire n’est pas régle­men­té par la loi, chaque com­mune est libre de régle­men­ter comme il le sou­haite. Ain­si, elle peut s’engager à rendre compte de toute péti­tion qui atteint un seuil entre 1 % et 5 % (selon la taille de la com­mune), ou elle peut éga­le­ment accep­ter les signa­tures des rési­dents non natio­naux. Il s’agit d’une pro­cé­dure assez cou­rante qui, si elle ne débouche pas habi­tuel­le­ment sur un réfé­ren­dum, fait sou­vent l’objet de débats au sein des conseils muni­ci­paux, comme, par exemple, c’est le cas à Stras­bourg.

Fina­le­ment, l’engagement du conseil muni­ci­pal consiste à mettre en place un réfé­ren­dum local sur tout objet de péti­tion qui atteint le seuil requis.

Le réfé­ren­dum local n’est contrai­gnant que si le seuil de 50 % de par­ti­ci­pa­tion est atteint. Si ce seuil n’est pas atteint, le conseil muni­ci­pal est libre de suivre ou non le résul­tat majo­ri­taire. Ce seuil est très exigent : il est non seule­ment très rare­ment atteint pour les réfé­ren­dums, mais aus­si pour les élec­tions locales. Il est donc impor­tant que le conseil muni­ci­pal s’engage auprès des citoyens à suivre sys­té­ma­ti­que­ment l’avis majo­ri­taire même si le seuil de par­ti­ci­pa­tion n’est pas atteint.

Est-ce que cela fonctionne ?

Cette for­mu­la­tion a deux avan­tages et un incon­vé­nient. Pre­miè­re­ment, elle com­bine trois dis­po­si­tifs légaux, et est donc légale face au juge admi­nis­tra­tif (même s’il y a encore un risque dans l’interprétation du vœu). Deuxiè­me­ment, il per­met de construire un RIC basé sur des seuils de signa­tures abor­dables et sur des ins­ti­tu­tions contraignantes.

Il a été démon­tré que des seuils trop hauts conduisent à des dis­po­si­tifs inopé­rants, et des dis­po­si­tifs non contrai­gnants décou­ragent l’utilisation du RIC comme ins­tru­ment de contes­ta­tion, en lui enle­vant ain­si sa pre­mière qualité.

https://​you​tu​.be/​S​V​c​F​r​I​u​e​990

L’inconvénient majeur de ce dis­po­si­tif – comme tous les autres qui peuvent être mis en place au niveau local à l’heure actuelle – est qu’il repose sur la bonne volon­té des élus. Un incon­vé­nient de taille, mais qui ne pour­ra pas être évi­té. Comme noté plus haut, le RIC local aura plus une valeur péda­go­gique et expé­ri­men­tale qu’une valeur pro­pre­ment institutionnelle.

Actuel­le­ment, des dis­po­si­tifs démo­cra­tiques sont pro­po­sés par les dif­fé­rentes listes, même s’ils sont plus ou moins opé­rants. Une autre ini­tia­tive de cher­cheurs – le Par­ti­ci­po­mètre – vise à étu­dier et don­ner les moyens à tous d’évaluer l’aspect démo­cra­tique des pro­grammes des can­di­dats aux municipales.

Pour la pre­mière fois, les pro­grammes peuvent être com­pa­rés dans chaque com­mune par les inter­nautes comme les cher­cheurs. « Les résul­tats des éva­lua­tions sont publiés et mis en paral­lèle de ceux résul­tant de l’évaluation réa­li­sée par les cher­cheurs » indique le site du Par­ti­ci­po­mètre. Par­mi les dis­po­si­tifs éva­lués, le réfé­ren­dum d’initiative citoyenne aura une place de choix.

Raul Magni-Ber­ton.

Source : http://​the​con​ver​sa​tion​.com/​e​t​-​s​i​-​l​e​s​-​m​u​n​i​c​i​p​a​l​e​s​-​e​t​a​i​e​n​t​-​l​o​c​c​a​s​i​o​n​-​d​e​-​m​e​t​t​r​e​-​e​n​-​p​l​a​c​e​-​u​n​-​r​i​c​-​1​3​0​896

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