Guillaume Meurice questionne nos prétendus « représentants » sur le CETA, et leur niveau d’incompétence et/ou de traîtrise est consternant

13/12/2017 | 13 commentaires

13 Commentaires

    • ève

      Le men­songe devrait être puni par la loi !
      Nous sommes tous et toutes tor­tu­rées par ces men­teurs ses !
      Bonnes fêtes à vous tous et toutes et à ceux que vous aimez ,
      et lais­ser pas­ser la grippe sans l’attraper !
      ève

      Réponse
  1. etienne

    Apprendre à aimer le Maccarthysme, par Robert Parry

    https://​www​.les​-crises​.fr/​a​p​p​r​e​n​d​r​e​-​a​-​a​i​m​e​r​-​l​e​-​m​a​c​c​a​r​t​h​y​s​m​e​-​p​a​r​-​d​e​-​r​o​b​e​r​t​-​p​a​r​ry/

    Beau­coup de libé­raux amé­ri­cains qui ont un jour dénon­cé le mac­car­thysme apprennent main­te­nant à aimer cette sinistre tac­tique quand elle peut être uti­li­sée pour pro­mou­voir le « scan­dale » du Rus­sie-gate et faire taire la contes­ta­tion, rap­porte Robert Par­ry.

    Le New York Times a fina­le­ment détec­té une forme de mac­car­thysme moderne, non dans l’hystérie anti-russe que le jour­nal ali­mente depuis plu­sieurs années, tout en trai­tant les Amé­ri­cains scep­tiques « d’idiots utiles » entre autres. Non, les édi­teurs du NYT accusent un répu­bli­cain de Long Island de mac­car­thysme pour avoir fait le lien entre son rival démo­crate et des « groupes d’intérêt spé­ciaux de New York ». Et le NYT de se lamen­ter « C’est la vieille ficelle de la culpa­bi­li­té par amalgame ».

    Le séna­teur Joseph McCar­thy, Répu­bli­cain du Wis­con­sin, qui a mené les audi­tions de la « Ter­reur rouge » des années 1950.

    Oui, le NYT ne voit aucun mac­car­thysme dans le bashing fré­né­tique de la Rus­sie et la culpa­bi­li­té par amal­game de tout Amé­ri­cain qui peut être lié même indi­rec­te­ment à n’importe quel Russe qui pour­rait avoir des liens mal défi­nis avec le pré­sident russe Vla­di­mir Poutine.

    Lun­di, dans la même édi­tion du NYT qui fait paraître un édi­to­rial scan­da­li­sé sur le mac­car­thysme du spot répu­bli­cain de Long Island, on trouve deux articles à la Une, sous le titre « des docu­ments com­plexes qui masquent les liens du Krem­lin avec des acti­vi­tés amé­ri­caines stratégiques ».

    Les deux sous-titres indiquent : « Une com­pa­gnie mari­time assure le lien entre des états-majors com­mer­ciaux et des “sbires” de Pou­tine » et « Des mil­lions d’actions Face­book ont leurs racines dans l’argent russe ». L’histoire qui suit, qui se conforme si bien aux pres­sions poli­tiques amé­ri­caines actuelles sur Face­book et Twit­ter pour fina­le­ment entrer en réso­nance avec la Nou­velle guerre froide contre la Rus­sie, cite des inves­tis­se­ments réa­li­sés par le Russe Yuri Mil­ner remon­tant au début de la décennie.

    La recon­nais­sance que les « entre­prises de Mil­ner ont ven­du ces pro­prié­tés il y a plu­sieurs années » est enter­rée dans le « saut » de l’histoire. Mais telle est la folie anti-Rus­sie qui sai­sit l’establishment de Washing­ton et New York que tout contact avec un Russe consti­tue un scan­dale digne de la une de la cou­ver­ture. Ce lun­di, le Washing­ton Post a publié un article d’une page inti­tu­lé « 9 per­sonnes dans l’entourage de Trump avaient des contacts avec les Russes ».

    La folie anti-russe a atteint des extrêmes tels que même lorsque vous dites quelque chose qui est évi­dem­ment vrai – mais que RT, la chaîne de télé­vi­sion russe, a éga­le­ment rap­por­té – vous êtes atta­qué pour avoir pro­pa­gé la « pro­pa­gande russe ».

    Nous l’avons vu lorsque Don­na Bra­zile, l’ancienne pré­si­dente du Comi­té natio­nal démo­crate, a révé­lé dans son nou­veau livre qu’elle envi­sa­geait la pos­si­bi­li­té de rem­pla­cer Hil­la­ry Clin­ton sur le man­dat démo­crate après l’évanouissement public de Clin­ton et les inquié­tudes au sujet de sa santé.

    Bien qu’il y ait eu une vidéo de la chute de Clin­ton le 11 sep­tembre 2016, sui­vie de son départ de la cam­pagne élec­to­rale pour com­battre la pneu­mo­nie – sans par­ler de sa peur anté­rieure des caillots san­guins – la réponse d’un groupe de 100 par­ti­sans de Clin­ton a été de remettre en ques­tion le patrio­tisme de Bra­zile : « Il est par­ti­cu­liè­re­ment trou­blant et décon­cer­tant qu’elle ait sem­blé croire en une pro­pa­gande men­son­gère ali­men­tée par la Rus­sie, répan­due à la fois par les Russes et par nos adver­saires sur la san­té de notre candidate. »

    En d’autres termes, l’excuse pour tout, ces jours-ci, c’est de blâ­mer les Russes et de salir qui­conque dit quoi que ce soit – aus­si vrai soit-il – si cela a éga­le­ment été rap­por­té sur RT.

    Pres­sion sur les entre­prises Tech.

    Tout comme le séna­teur Joe McCar­thy aimait traî­ner des « com­mu­nistes » et des « com­pa­gnons de route » pré­su­més devant son comi­té dans les années 1950, le nou­veau mac­car­thysme a ses propres audiences de chasse aux sor­cières, comme la semaine der­nière au Sénat, où des cadres de Face­book, Twit­ter et Google ont été cui­si­nés pour avoir soi-disant per­mis aux Russes de par­ti­ci­per aux réseaux sociaux d’Internet.

    Des diri­geants de Face­book, Twit­ter et Google ont été ame­nés devant un sous-comi­té judi­ciaire du Sénat sur la cri­mi­na­li­té et le ter­ro­risme le 31 octobre 2017.

    Ten­tant d’apaiser le Congrès et de repous­ser les menaces de régle­men­ta­tion gou­ver­ne­men­tale, les riches socié­tés Tech ont mon­tré leur empres­se­ment à éra­di­quer toute souillure russe.

    L’avocat géné­ral de Twit­ter, Sean J. Edgett, a décla­ré au sous-comi­té judi­ciaire du Sénat sur la cri­mi­na­li­té et le ter­ro­risme que Twit­ter avait adop­té une « approche élar­gie pour défi­nir ce qui est consi­dé­ré comme un compte lié à la Russie ».

    Edgett a décla­ré que les cri­tères com­pre­naient « si le compte a été créé en Rus­sie, si l’utilisateur a enre­gis­tré le compte avec un opé­ra­teur télé­pho­nique russe ou une adresse e‑mail russe, si le nom d’affichage de l’utilisateur contient des carac­tères cyril­liques, si l’utilisateur tweete fré­quem­ment en russe, et si l’utilisateur s’est connec­té à par­tir de toute adresse IP russe, même une seule fois. Nous avons consi­dé­ré qu’un compte était lié à la Rus­sie s’il avait au moins un des cri­tères pertinents. »

    Le pro­blème avec la métho­do­lo­gie de Twit­ter était qu’aucun de ces cri­tères ne relie­rait un compte au gou­ver­ne­ment russe, et encore moins aux ser­vices secrets russes ou à une « ferme de trolls » contrô­lée par le Krem­lin, mais les cri­tères pour­raient cap­tu­rer des Russes indi­vi­duels sans lien avec le Krem­lin ain­si que des per­sonnes qui n’étaient pas du tout russes, y com­pris, disons, des visi­teurs amé­ri­cains ou euro­péens en Rus­sie qui se sont connec­tés à Twit­ter par le biais d’un hôtel de Moscou.

    Il n’a pas non plus été dit que les Russes ne sont pas le seul groupe natio­nal à uti­li­ser l’alphabet cyril­lique. Il est consi­dé­ré comme un alpha­bet stan­dard pour écrire en Bié­lo­rus­sie, Bul­ga­rie, Macé­doine, Ser­bie-Croa­tie et Ukraine. Ain­si, par exemple, un Ukrai­nien uti­li­sant l’alphabet cyril­lique pour­rait se retrou­ver dans la caté­go­rie des « liés à la Rus­sie » même si il ou elle détes­tait Poutine.

    L’avocat de Twit­ter a éga­le­ment décla­ré que l’entreprise avait effec­tué une ana­lyse dis­tincte des infor­ma­tions four­nies par des « sources tierces » non iden­ti­fiées qui poin­taient vers des comptes pré­ten­du­ment contrô­lés par l’Internet Research Agen­cy (IRA) basée à Saint-Péters­bourg, soit un total de 2 752 comptes. L’IRA est géné­ra­le­ment décrite dans la presse amé­ri­caine comme une « ferme troll » qui emploie des employés au fait de la tech­no­lo­gie qui com­battent les nou­velles et les opi­nions hos­tiles à la Rus­sie et au gou­ver­ne­ment russe. Mais la façon exacte dont ces comptes pré­cis ont été retra­cés jusqu’à cette orga­ni­sa­tion n’a pas été précisée.

    Et, pour mettre ce nombre dans une cer­taine pers­pec­tive, Twit­ter affirme avoir 330 mil­lions d’utilisateurs men­suels actifs, ce qui met les 2.752 comptes à moins de 0,001% du total.

    Le pro­blème du « Trolling »

    Alors que l’enquête menée sur le « Rus­sia-gate » a cher­ché à dépeindre l’effort de l’IRA comme étant exo­tique et en quelque sorte unique à la Rus­sie, la stra­té­gie est sui­vie par un cer­tain nombre de gou­ver­ne­ments, de mou­ve­ments poli­tiques et d’entreprises – par­fois en fai­sant appel à des volon­taires enthou­siastes, mais sou­vent en employant des pro­fes­sion­nels qua­li­fiés pour contes­ter des infor­ma­tions cri­tiques ou au moins brouiller les cartes.

    Couple mar­chant le long du Krem­lin, 7 décembre 2016. (Pho­to de Robert Parry)

    Ceux d’entre nous qui opèrent sur Inter­net sont fami­liers avec le har­cè­le­ment de la part des « trolls » qui peuvent uti­li­ser l’accès à des sec­tions de « com­men­taires » pour injec­ter de la pro­pa­gande et de la dés­in­for­ma­tion pour semer la confu­sion, cau­ser des per­tur­ba­tions ou dis­cré­di­ter le site en pro­mou­vant des opi­nions ignobles et des théo­ries de conspi­ra­tion insensées.

    Aus­si ennuyeux que ce « trol­ling » soit, il s’agit sim­ple­ment d’une ver­sion moderne de stra­té­gies plus tra­di­tion­nelles uti­li­sées par des enti­tés puis­santes depuis des géné­ra­tions – embau­cher des spé­cia­listes des rela­tions publiques, des lob­byistes, des avo­cats et des « acti­vistes » sup­po­sés impar­tiaux pour polir les images, repous­ser les nou­velles néga­tives et inti­mi­der les enquê­teurs curieux. Dans cette com­pé­ti­tion, la Rus­sie moderne est à la fois retar­da­taire et avare.

    Le gou­ver­ne­ment amé­ri­cain fait appel à des légions de publi­cistes, de pro­pa­gan­distes, de jour­na­listes rému­né­rés, de spé­cia­listes du psy-ops, d’entrepreneurs et d’organisations non gou­ver­ne­men­tales pour pro­mou­voir les posi­tions de Washing­ton et saper ses rivaux par la guerre de l’information.

    La CIA dis­pose d’une bureau­cra­tie entiè­re­ment vouée à la pro­pa­gande et à la dés­in­for­ma­tion, cer­tains de ces efforts ayant été confiés à de nou­velles enti­tés comme la « Natio­nal Endow­ment for Demo­cra­cy » (NED) ou finan­cés par l’Agence des États-Unis pour le déve­lop­pe­ment inter­na­tio­nal (USAID). L’OTAN a un com­man­de­ment spé­cial en Let­to­nie qui entre­prend des « com­mu­ni­ca­tions stra­té­giques ».

    Israël est un autre acteur com­pé­tent dans ce domaine, pui­sant dans ses par­ti­sans du monde entier pour har­ce­ler les gens qui cri­tiquent le pro­jet sio­niste. En effet, depuis les années 1980, Israël a été le pion­nier de nom­breuses tac­tiques d’espionnage et de sabo­tage infor­ma­tiques adop­tées et éten­dues par l’Agence amé­ri­caine de sécu­ri­té natio­nale, expli­quant pour­quoi l’administration Oba­ma s’est asso­ciée à Israël dans un plan visant à intro­duire un code mal­veillant dans les cen­tri­fu­geuses ira­niennes pour sabo­ter le pro­gramme nucléaire iranien.

    Il est éga­le­ment iro­nique de consta­ter que le gou­ver­ne­ment amé­ri­cain a van­té les médias sociaux comme un grand avan­tage en fai­sant avan­cer ce que l’on appelle des « révo­lu­tions de cou­leur » visant à « chan­ger de régime » dans les pays en dif­fi­cul­té. Par exemple, lorsque la « révo­lu­tion verte » était en cours en Iran en 2009 après la réélec­tion du pré­sident Mah­moud Ahma­di­ne­jad, l’administration Oba­ma a deman­dé à Twit­ter de repor­ter la main­te­nance pro­gram­mée afin que les mani­fes­tants de rue puissent conti­nuer à uti­li­ser la plate-forme pour s’organiser contre Ahma­di­ne­jad et à dis­tri­buer leur ver­sion de l’histoire au monde extérieur.

    Lors de ce que l’on a appe­lé le Prin­temps arabe de 2011, Face­book, Twit­ter et Skype ont été salués comme des moyens d’organiser des mani­fes­ta­tions de masse pour désta­bi­li­ser les gou­ver­ne­ments en Tuni­sie, en Égypte et en Syrie. À l’époque, le gou­ver­ne­ment amé­ri­cain dénon­çait toute ten­ta­tive d’étouffer ces pla­te­formes de médias sociaux et la libre cir­cu­la­tion de l’information qu’ils per­met­taient comme preuve de la dictature.

    Les médias sociaux ont éga­le­ment été l’un des favo­ris du gou­ver­ne­ment amé­ri­cain en Ukraine en 2013–2014 lorsque les mani­fes­ta­tions de Mai­dan ont exploi­té ces plates-formes pour aider à désta­bi­li­ser et, en fin de compte, ren­ver­ser le gou­ver­ne­ment élu de l’Ukraine, l’événement clé qui a lan­cé la nou­velle guerre froide avec la Russie.

    Uti­li­ser le club des médias sociaux

    La véri­té, c’est que, dans ces cas-là, les gou­ver­ne­ments amé­ri­cains et leurs agences exploi­taient avec empres­se­ment les pla­te­formes pour faire avan­cer le pro­gramme géo­po­li­tique de Washing­ton en dif­fu­sant la pro­pa­gande amé­ri­caine et en déployant des orga­ni­sa­tions non gou­ver­ne­men­tales finan­cées par les États-Unis, qui ensei­gnaient aux mili­tants com­ment uti­li­ser les médias sociaux pour faire avan­cer les scé­na­rios de « chan­ge­ment de régime ».

    Un volon­taire des Casques Blancs mon­trant les consé­quences d’une attaque militaire.

    Bien que ces sou­lè­ve­ments aient été ven­dus à des audi­toires occi­den­taux comme de véri­tables mani­fes­ta­tions de colère publique – et il y en a sûre­ment eu cer­taines –, les mani­fes­ta­tions ont éga­le­ment béné­fi­cié du finan­ce­ment et de l’expertise des États-Unis. En par­ti­cu­lier, la NED et l’USAID ont four­ni des fonds, du maté­riel et une for­ma­tion aux agents anti­gou­ver­ne­men­taux qui contestent les régimes en défa­veur des États-Unis.

    L’une des opé­ra­tions de pro­pa­gande les plus réus­sies a eu lieu en Syrie, où des rebelles anti­gou­ver­ne­men­taux opé­rant dans des zones contrô­lées par Al-Qaï­da et ses mili­tants isla­miques ont uti­li­sé les médias sociaux pour trans­mettre leurs mes­sages aux jour­na­listes occi­den­taux tra­di­tion­nels qui ne pou­vaient pas entrer dans ces sec­teurs sans craindre d’être décapités.

    Comme le des­sein des rebelles de ren­ver­ser le pré­sident Bachar al-Assad concor­dait avec les objec­tifs du gou­ver­ne­ment amé­ri­cain et de ses alliés en Israël, en Tur­quie, en Ara­bie saou­dite et dans les États du Golfe, les jour­na­listes occi­den­taux ont accep­té sans réserve les mots et les images des col­la­bo­ra­teurs d’Al-Qaïda.

    Le suc­cès de cette pro­pa­gande fut si extra­or­di­naire que les Casques Blancs, un groupe de « défense civile » qui tra­vaillait sur le ter­ri­toire d’Al-Qaïda, devinrent la source de vidéos dra­ma­tiques et reçurent même l’Oscar du court métrage docu­men­taire pour une info-publi­ci­té pro­duite pour Net­flix – mal­gré la preuve que les Casques Blancs met­taient en scène cer­taines scènes à des fins de propagande.

    En fait, l’un des argu­ments qui militent en faveur de la croyance selon laquelle Pou­tine et le Krem­lin auraient pu « s’immiscer » dans les élec­tions amé­ri­caines de l’an der­nier est qu’ils auraient pu pen­ser qu’il était temps de don­ner aux États-Unis un avant-goût de leur propre médecine.

    Après tout, les États-Unis sont inter­ve­nus lors des élec­tions russes de 1996 pour assu­rer le main­tien de l’autorité de Boris Elt­sine, un homme cor­rom­pu et mal­léable. Et il y a eu les mani­fes­ta­tions de rue sou­te­nues par les États-Unis à Mos­cou contre les élec­tions de 2011 et 2012 au cours des­quelles Pou­tine a ren­for­cé son man­dat poli­tique. Ces pro­tes­ta­tions ont gagné leur dési­gna­tion de « cou­leur » : la « révo­lu­tion de la neige ».

    Cou­ver­ture du maga­zine Time rela­tant com­ment les États-Unis ont per­mis la réélec­tion de Boris Elt­sine à la pré­si­dence russe en 1996.

    Cepen­dant, quoi que la Rus­sie ait pu faire ou non avant les élec­tions amé­ri­caines de l’an der­nier, les enquêtes menées sur l’affaire Rus­sia-gate ont tou­jours cher­ché à exa­gé­rer l’impact de cette pré­ten­due « ingé­rence » et ont façon­né le récit en fonc­tion de la fai­blesse des preuves disponibles.

    Le scé­na­rio ori­gi­nal était que Pou­tine avait auto­ri­sé le « pira­tage » des cour­riels démo­crates dans le cadre d’une opé­ra­tion de « dés­in­for­ma­tion » visant à saper la can­di­da­ture de Hil­la­ry Clin­ton et à aider à élire Donald Trump – bien qu’aucune preuve solide n’ait été pré­sen­tée pour éta­blir que Pou­tine avait don­né un tel ordre ou que la Rus­sie avait « pira­té » les cour­riels. Wiki­Leaks a nié à plu­sieurs reprises avoir reçu les cour­riels de la Rus­sie, qui nie éga­le­ment toute ingérence.

    De plus, les cour­riels n’étaient pas de la « dés­in­for­ma­tion » ; ils étaient à la fois réels et, dans bien des cas, dignes de men­tion. Les cour­riels de la DNC ont four­ni la preuve que la DNC a fait pen­cher la balance de façon contraire à l’éthique en faveur de Clin­ton et contre le séna­teur Ber­nie San­ders, un point que Bra­zile a éga­le­ment décou­vert en exa­mi­nant les rela­tions de dota­tion et de finan­ce­ment que Clin­ton avait avec le DNC sous la pré­si­dence pré­cé­dente de Deb­bie Was­ser­man Schultz.

    Les cour­riels volés de John Podes­ta, pré­sident de la cam­pagne de Clin­ton, ont dévoi­lé le conte­nu des dis­cours payés de Clin­ton à Wall Street (infor­ma­tion qu’elle essayait de cacher aux élec­teurs) et les carac­té­ris­tiques payantes de la Fon­da­tion Clinton.

    Un can­di­dat de Mandchourie ?

    [Allu­sion au film amé­ri­cain Un crime dans la tête (The Man­chu­rian Can­di­date), réa­li­sé par John Fran­ken­hei­mer et sor­ti en 1962, dans lequel le héros, après avoir subi un lavage de cer­veau, est deve­nu un agent sovié­tique mal­gré lui, NdT]

    Pour­tant, le récit ori­gi­nal était que Pou­tine vou­lait son can­di­dat mand­chou (Trump) à la Mai­son-Blanche et pre­nait le risque extra­or­di­naire d’exaspérer la grande favo­rite (Clin­ton) en publiant les cour­riels, même s’ils sem­blaient peu sus­cep­tibles d’empêcher la vic­toire de Clin­ton. Il y a donc tou­jours eu ce déca­lage logique dans la théo­rie du Russia-gate.

    Le pré­sident Donald Trump pro­non­çant son dis­cours inau­gu­ral le 20 jan­vier 2017. (cap­ture d’écran de Whi­te­house. gov)

    Depuis lors, cepen­dant, le dis­cours domi­nant amé­ri­cain a chan­gé, en par­tie, parce que les preuves d’une « ingé­rence » élec­to­rale russe étaient si dou­teuses. Face aux pres­sions intenses exer­cées par le Congrès pour trou­ver quelque chose, Face­book a signa­lé 100 000 $ en publi­ci­tés soi-disant « liées à la Rus­sie » ache­tées en 2015–2017, mais a noté que seule­ment 44 pour cent avaient été ache­tées avant les élec­tions. Ain­si, non seule­ment le col­por­tage « lié à la Rus­sie » était-il minus­cule – com­pa­ré au chiffre d’affaires annuel de Face­book de 27 mil­liards de dol­lars – mais plus de la moi­tié de ce col­por­tage a été jeté dans ce très grand lac après que Clin­ton ait déjà perdu.

    Ain­si, l’intrigue a été trans­for­mée en un vague stra­ta­gème russe visant à exa­cer­ber les ten­sions sociales aux États-Unis en pre­nant dif­fé­rentes posi­tions sur des ques­tions brû­lantes, telles que la bru­ta­li­té poli­cière contre les Noirs. Le New York Times a rap­por­té que l’une de ces pages « liées à la Rus­sie » com­por­tait des pho­tos de chiots mignons, qui, selon les spé­cu­la­tions du Times, devaient avoir un but malé­fique bien qu’il était dif­fi­cile de com­prendre. (Oh, ces Russes sournois!).

    L’estimation du nombre d’Américains ayant vu une de ces publi­ci­tés « liées à la Rus­sie » ne cesse éga­le­ment d’augmenter, attei­gnant main­te­nant jusqu’à 126 mil­lions, soit envi­ron un tiers de la popu­la­tion amé­ri­caine. Bien sûr, la façon dont l’Internet fonc­tionne – avec n’importe quel article pos­si­ble­ment viral – vous pour­riez aus­si bien dire que les annonces pour­raient avoir atteint des mil­liards de personnes.

    Chaque fois que j’écris un article ou que j’envoie un tweet, je pour­rais moi aus­si atteindre 126 mil­lions ou même des mil­liards de per­sonnes, mais la réa­li­té est que je serais chan­ceux si le nombre était de mille. Mais au milieu de la fré­né­sie du Rus­sia-gate, aucune exa­gé­ra­tion n’est trop extra­va­gante ou trop extrême.

    Un autre élé­ment étrange du Rus­sia-gate est que l’intensité de cette enquête est dis­pro­por­tion­née par rap­port au manque d’intérêt mani­fes­té à l’égard de cas beau­coup mieux docu­men­tés d’ingérence réelle des gou­ver­ne­ments étran­gers dans les élec­tions et l’élaboration des poli­tiques américaines.

    Par exemple, les prin­ci­paux médias amé­ri­cains ont long­temps igno­ré l’affaire extrê­me­ment bien docu­men­tée de Richard Nixon, qui a col­la­bo­ré avec des res­pon­sables sud-viet­na­miens pour sabo­ter les pour­par­lers de paix du pré­sident Lyn­don John­son pen­dant la guerre du Viet­nam afin d’obtenir un avan­tage pour Nixon lors des élec­tions de 1968. Ce cha­pitre impor­tant de l’histoire n’a reçu le sceau d’approbation du New York Times qu’au début de cette année, après que le Times eut reje­té les pre­miers volumes de preuves comme des « rumeurs ».

    Lors des élec­tions de 1980, l’équipe de Ronald Rea­gan – en par­ti­cu­lier son direc­teur de cam­pagne, William Casey, en col­la­bo­ra­tion avec Israël et l’Iran – semble avoir été par-der­rière du pré­sident Jim­my Car­ter pour saper les négo­cia­tions de Car­ter en vue de libé­rer 52 otages amé­ri­cains alors déte­nus en Iran et de condam­ner les espoirs de réélec­tion de Carter.

    Il y avait deux dou­zaines de témoins de ce stra­ta­gème qui ont par­lé avec moi et d’autres jour­na­listes d’investigation – ain­si que des preuves docu­men­taires mon­trant que le pré­sident Rea­gan a auto­ri­sé des livrai­sons secrètes d’armes à l’Iran via Israël peu après la libé­ra­tion des otages lors de l’investiture de Rea­gan le 20 jan­vier 1981.

    Cepen­dant, puisque le vice-pré­sident (plus tard pré­sident) George H.W. Bush, qui était impli­qué dans le com­plot, était très appré­cié de part et d’autre et parce que Rea­gan était deve­nu une icône répu­bli­caine, l’affaire « Octo­ber Sur­prise » de 1980 a été dénon­cée par les grands médias et reje­tée par une enquête du Congrès au début des années 1990. Mal­gré le nombre extra­or­di­naire de témoins et de pièces jus­ti­fi­ca­tives, Wiki­pé­dia a qua­li­fié le scan­dale de « théo­rie du complot ».

    Influence israé­lienne

    Et, si vous êtes vrai­ment pré­oc­cu­pés par l’ingérence étran­gère dans les élec­tions et la poli­tique des États-Unis, il y a l’influence remar­quable d’Israël et sa capa­ci­té per­çue à pro­vo­quer la défaite de presque n’importe quel poli­ti­cien qui s’écarte de ce que le gou­ver­ne­ment israé­lien veut, du moins depuis les années 1980, lorsque le séna­teur Chuck Per­cy et le repré­sen­tant Paul Find­ley ont été par­mi les vic­times poli­tiques après avoir eu des contacts avec les Palestiniens.

    Le vice-pré­sident de l’époque, George H.W. Bush avec le direc­teur de la CIA William Casey à la Mai­son-Blanche le 11 février 1981. (Cré­dit pho­to : Biblio­thèque Reagan)

    Si quelqu’un doute de la façon dont le Pre­mier ministre israé­lien Ben­ja­min Neta­nya­hou a conti­nué à tirer les ficelles des poli­ti­ciens amé­ri­cains, il suf­fit de regar­der l’une de ses trois allo­cu­tions enre­gis­trées des ses­sions conjointes du Congrès et de voir com­bien de fois les répu­bli­cains et démo­crates sautent sur leurs pieds dans des applau­dis­se­ments enthou­siastes. (Le seul autre diri­geant étran­ger à avoir eu l’honneur de cette ses­sion conjointe trois fois était le Pre­mier ministre bri­tan­nique Wins­ton Churchill).

    Qu’est-ce qui dif­fé­ren­cie le Rus­sia-gate des autres affaires ? Est-ce que Pou­tine a conspi­ré avec Trump pour étendre une guerre san­glante comme Nixon l’a fait avec les diri­geants sud viet­na­miens ? Est-ce que Pou­tine a pro­lon­gé la cap­ti­vi­té des otages amé­ri­cains pour don­ner à Trump un avan­tage poli­tique ? Pou­tine a‑t-il mani­pu­lé la poli­tique amé­ri­caine au Moyen-Orient pour inci­ter le pré­sident George W. Bush à enva­hir l’Irak et enflam­mer la région, comme l’a fait Neta­nya­hou d’Israël ? Est-ce que Pou­tine est même en train de pous­ser pour des guerres plus larges au Moyen-Orient, comme Neta­nya­hou l’est ?

    En effet, un point qui n’a jamais été sérieu­se­ment abor­dé est la rai­son pour laquelle les États-Unis sont si en colère contre la Rus­sie alors que ces autres cas, dans les­quels les inté­rêts amé­ri­cains ont été clai­re­ment lésés et la démo­cra­tie amé­ri­caine com­pro­mise, ont été trai­tés en grande par­tie comme des faits divers.

    Pour­quoi le Rus­sia-gate est si impor­tant alors que les autres affaires ne l’étaient pas ? Pour­quoi des règles contraires sont-elles en jeu aujourd’hui – avec les démo­crates, de nom­breux répu­bli­cains et les prin­ci­paux médias d’information fla­gel­lant les « liens » fra­giles, cher­chant le peu de preuves qu’il y a, et sup­po­sant le pire au lieu d’insister pour que seules des preuves par­faites et des témoins par­faits soient accep­tés comme dans les cas précédents ?

    La réponse semble être la haine géné­ra­li­sée à l’égard du pré­sident Trump com­bi­née à des inté­rêts par­ti­cu­liers en faveur de la nou­velle guerre froide. Il s’agit là d’un objec­tif appré­cié à la fois par le Com­plexe mili­ta­ro-indus­triel, qui pré­voit des mil­liers de mil­liards de dol­lars en sys­tèmes d’armes stra­té­giques à l’avenir, et par les néo­con­ser­va­teurs, qui consi­dèrent la Rus­sie comme une menace à leurs pro­grammes de « chan­ge­ment de régime » pour la Syrie et l’Iran.

    Après tout, si la Rus­sie et son Pré­sident Pou­tine, sou­cieux de son indé­pen­dance d’esprit, peuvent être repous­sés et bat­tus, alors un obs­tacle majeur à l’objectif néo­con-israé­lien de l’expansion des guerres du Moyen-Orient sera levé.

    À l’heure actuelle, les néo­con­ser­va­teurs aspirent ouver­te­ment à un « chan­ge­ment de régime » à Mos­cou mal­gré les risques évi­dents qu’une telle agi­ta­tion dans un pays doté de l’arme nucléaire pour­rait engen­drer, y com­pris la pos­si­bi­li­té que Pou­tine ne soit pas rem­pla­cé par un client occi­den­tal docile comme le regret­té Boris Elt­sine, mais par un natio­na­liste extrême qui pour­rait envi­sa­ger de lan­cer une frappe nucléaire pour pro­té­ger l’honneur de la mère Russie.

    Les démo­crates, les libé­raux et même de nom­breux pro­gres­sistes jus­ti­fient leur conni­vence avec les néo­con­ser­va­teurs par la néces­si­té d’éliminer Trump par tous les moyens néces­saires et de « stop­per le fas­cisme ». Mais leur mépris pour Trump et leur exa­gé­ra­tion de la menace « hit­lé­rienne » que ce bouf­fon incom­pé­tent pose pré­ten­du­ment, les ont aveu­glés sur les risques extra­or­di­naires inhé­rents à leur ligne de conduite et sur la façon dont ils jouent le jeu des néo­con­ser­va­teurs assoif­fés de guerre.

    Un écran de fumée pour la répression

    Il semble éga­le­ment que l’on ne se pré­oc­cupe guère, voire pas du tout, du fait que l’Establishment uti­lise le Rus­sia-gate comme écran de fumée pour répri­mer les sites indé­pen­dants des médias sur Inter­net. Les par­ti­sans tra­di­tion­nels des liber­tés civiles ont détour­né les yeux pen­dant que les droits des per­sonnes asso­ciées à la cam­pagne Trump ont été bafoués et les jour­na­listes qui remettent sim­ple­ment en ques­tion les récits du dépar­te­ment d’État sur, disons, la Syrie et l’Ukraine sont dénon­cés comme des « laquais mos­co­vites » et des ” »idiots utiles ».

    L’immeuble du New York Times à Man­hat­tan. (Cré­dit pho­to : Robert Parry)

    Le résul­tat pro­bable des tests de démons­tra­tions anti-russes sur Capi­tol Hill est que les géants de la tech­no­lo­gie vont se plier à la demande bipar­tite de nou­veaux algo­rithmes et d’autres méthodes pour stig­ma­ti­ser, mar­gi­na­li­ser et éli­mi­ner l’information qui conteste les scé­na­rios domi­nants dans la cause de la lutte contre la « pro­pa­gande russe ».

    L’avertissement des séna­teurs puis­sants était lim­pide. « Je ne pense pas que vous com­pre­nez », séna­teur Dianne Fein­stein, D‑Californie, a aver­ti les cadres des médias sociaux la semaine der­nière. « Vous por­tez cette res­pon­sa­bi­li­té. Vous avez créé ces pla­te­formes, et main­te­nant elles sont mal uti­li­sées. Et c’est vous qui devez faire quelque chose. Ou nous le ferons. »

    Alors que ce futur auto­ri­taire sinon tota­li­taire se des­sine et que les dan­gers de l’annihilation nucléaire à la suite d’une guerre nucléaire inten­tion­nelle ou invo­lon­taire avec la Rus­sie s’accroissent, de nom­breuses per­sonnes qui devraient devraient être plus avi­sées sont prises dans la fré­né­sie du Russia-gate.

    Je pen­sais que les libé­raux et les pro­gres­sistes s’opposaient au mac­car­thysme parce qu’ils le consi­dé­raient comme une grave menace contre la liber­té de pen­sée et contre la démo­cra­tie véri­table, mais il semble main­te­nant qu’ils ont appris à aimer le mac­car­thysme, sauf, bien sûr, lorsqu’il dresse sa vilaine tête dans une publi­ci­té poli­tique de Long Island cri­ti­quant la ville de New York.

    Dans les années 1980, le jour­na­liste d’investigation Robert Par­ry a publié de nom­breux articles sur l’Iran-Contra pour The Asso­cia­ted Press et Newsweek.

    Source : Robert Par­ry, Consor­tium News, 06-11-2017

    Tra­duit par les lec­teurs du site http://​www​.les​-crises​.fr. Tra­duc­tion libre­ment repro­duc­tible en inté­gra­li­té, en citant la source.

    https://​www​.les​-crises​.fr/​a​p​p​r​e​n​d​r​e​-​a​-​a​i​m​e​r​-​l​e​-​m​a​c​c​a​r​t​h​y​s​m​e​-​p​a​r​-​d​e​-​r​o​b​e​r​t​-​p​a​r​ry/

    Réponse
    • ève

      On apprend beau­coup de choses par le biais de la migra­tion ! C’est éton­nant comme les opi­nions divergent quand se racontent les témoi­gnages , et ce n’est pas du Mac Car­thysme ! Mais ça per­met d’a­voir quand même des avis par des per­sonnes vivant en Rus­sie .… J’en dirais pas plus !

      Réponse
  2. joss

    Entre­tien avec Jean-Claude Michéa

    « Il est aujourd’hui plus facile d’imaginer la fin du monde que celle du capitalisme »

    Réponse
  3. BA

    Dans le monde, les inéga­li­tés explosent.

    Jeu­di 14 décembre 2017 :

    Les inéga­li­tés explosent pen­dant que fond le patri­moine public des nations.

    Marianne : Vous affi­nez et actua­li­sez la courbe dite « de l’E­le­phant », du Ser­bo-Amé­ri­can Bran­ko Mila­no­vic, qui fait par­tie de votre col­lec­tif d’é­co­no­mistes. Elle décrit l’é­vo­lu­tion des reve­nus de l’en­semble des habi­tants de la pla­nète entre 1980 et aujourd’­hui en fonc­tion de leur place dans l’é­chelle des reve­nus. Que nous apprend cette courbe sur l’é­vo­lu­tion des inégalités ?

    Lucas Chan­cel : La courbe dite de l’é­vo­lu­tion est une manière extrê­me­ment effi­cace de mon­trer trois grands faits de la mon­dia­li­sa­tion depuis le début des années 1980. Pre­miè­re­ment, on observe au bas de la pyra­mide des reve­nus mon­diaux, la forte crois­sance des reve­nus des classes moyennes et popu­laires dans cer­tains pays émer­gents (Chine en tête), où le reve­nu a cru de plus de 100% sur la période 1980–2016. C’est la tête du fameux élé­phant. Deuxiè­me­ment, on observe la com­pres­sion et dans cer­tains cas même la stag­na­tion des reve­nus des classes moyennes et popu­laires des pays du Nord. C’est la base de la trompe de l’é­lé­phant. Aux Etats Unis, les 50% les plus modestes ont même vu leur reve­nu stag­ner depuis 1980, c’est un fait éco­no­mique majeur et tout à fait excep­tion­nel dans un pays qui créé beau­coup de crois­sance sur la période. Enfin, on observe la mon­tée spec­ta­cu­laire du top 1% mon­dial, dont les reve­nus s’en­volent avec une crois­sance de plus de 200%. C’est le haut de la trompe de l’éléphant.

    Marianne : Vous vous concen­trez sur le haut de l’é­chelle du patri­moine [et des reve­nus], que s’est-il pas­sé pour cette frange des ultra-riches ?

    Luc Chan­cel : Leurs reve­nus ont été bien supé­rieurs à la moyenne, dans les pays riches comme dans les pays émer­gents. Ils ont béné­fi­cié de très fort taux de crois­sance de leur patri­moine (qui s’ac­croît d’au­tant plus vite qu’il est déjà impor­tant, sans réel lien avec les inno­va­tions réa­li­sées par les déten­teurs de ce patri­moine), d’une baisse géné­ra­li­sée de la pro­gres­si­vi­té fis­cale ain­si que des poli­tiques de pri­va­ti­sa­tion et de libé­ra­li­sa­tion qui ont accru la valeur du patri­moine pri­vé et qui ont sur­tout béné­fi­cié aux plus aisés.

    Marianne : Votre étude montre que sur cette même période le patri­moine net pri­vé s’est envo­lé dou­blant de volume, tan­dis que le patri­moine public net s’est lui effon­dré. Par­tout sauf en Chine.…

    Luc Chan­cel : Le patri­moine public chi­nois (c’est à dire l’en­semble des actifs publics comme les écoles, les hôpi­taux ou les réserves de devises du gou­ver­ne­ment chi­nois, net de ses dettes) a lui aus­si consi­dé­ra­ble­ment bais­sé. Il repré­sen­tait 70% du patri­moine natio­nal, il est pas­sé à 30%. Mais en effet, cela reste beau­coup plus éle­vé que dans les pays riches où le patri­moine natio­nal est pas­sé d’en­vi­ron 30% du patri­moine total à près de 0%. Dans cer­tains pays (comme les USA ou le Royaume-Uni), il est même négatif…

    En revanche aux Etats-Unis, le patri­moine public est désor­mais néga­tif. Com­ment l’ex­pli­quez vous, et existe t il un lien avec la hausse des inéga­li­tés dans ce pays ? 

    Aux USA et dans les pays riches, les pri­va­ti­sa­tions et la hausse de la dette publique ont fait chu­ter le patri­moine public à des valeurs extrê­me­ment faibles, voire néga­tives. Le fait que l’on observe des pays avec un patri­moine public néga­tif est un fait éco­no­mique majeur, et tout à fait par­ti­cu­lier. Cela veut dire que si le gou­ver­ne­ment amé­ri­cain ven­dait l’en­semble de ses écoles, hôpi­taux, infra­struc­tures de trans­ports, ses titres, il ne serait même pas en mesure de rem­bour­ser sa dette. Une telle situa­tion com­plique lar­ge­ment la situa­tion des Etats sou­hai­tant réduire les inéga­li­tés ou empê­cher une hausse future, car il leur est dif­fi­cile d’in­ves­tir dans la san­té, l’é­du­ca­tion, la pro­tec­tion de l’en­vi­ron­ne­ment qui sont une des réponses néces­saires à la mon­tée des inégalités.

    Il faut bien avoir en tête que les pays ne sont pas pauvres. Car la richesse natio­nale a lar­ge­ment aug­men­té. Les pays sont riches, mais les gou­ver­ne­ments sont deve­nus pauvres. Il est donc néces­saire de se deman­der com­ment redon­ner aux gou­ver­ne­ments la capa­ci­té d’in­ves­tir dans l’a­ve­nir. Dans ce type de situa­tion, les Etats ont sui­vis plu­sieurs stra­té­gies qui se sont avé­rées très effi­caces : rené­go­cia­tion ou annu­la­tion de la dette, infla­tion ou impo­si­tion pro­gres­sive sur le capi­tal. Ceux qui ont d’ailleurs le plus béné­fi­cié d’an­nu­la­tion de dette sont d’ailleurs par­fois ceux qui para­doxa­le­ment sont le plus cri­tique envers cette option, comme le gou­ver­ne­ment alle­mand aujourd’­hui. En Europe, la mise en oeuvre de ces trois stra­té­gies pour réduire la dette publique et inves­tir dans l’a­ve­nir après la guerre n’a abso­lu­ment pas réduit la crois­sance… bien au contraire !

    Donald Trump est en passe de faire adop­ter son pro­jet fis­cal, avec notam­ment une baisse des impôts sur les divi­dendes. A votre avis com­ment cela se tra­dui­ra sur la dyna­mique hyper inéga­li­taire déjà à l’oeuvre dans ce pays ?

    Trump pour­suit le pro­gramme rea­ga­nien d’une réduc­tion de la puis­sance publique à une peau de cha­grin. Le para­doxe est qu’il le fait (dans ses dis­cours) au nom de celles et ceux qui en ont été les prin­ci­pales vic­times, les classes popu­laires et moyennes, qui n’ont rien à gagner des super cadeaux fis­caux faits au riches mais tout à perdre du dés­in­ves­tis­se­ment de l’E­tat dans les ser­vices publics que cela entraîne. Cela se tra­dui­ra par une aug­men­ta­tion encore plus forte des inéga­li­tés, dans un pays où la hausse a déjà été extrême…

    https://​www​.marianne​.net/​e​c​o​n​o​m​i​e​/​l​e​s​-​i​n​e​g​a​l​i​t​e​s​-​e​x​p​l​o​s​e​n​t​-​p​e​n​d​a​n​t​-​q​u​e​-​f​o​n​d​-​l​e​-​p​a​t​r​i​m​o​i​n​e​-​p​u​b​l​i​c​-​d​e​s​-​n​a​t​i​ons

    Réponse
  4. etienne

    Depuis des années, je trouve tou­jours Jean-Marc Jan­co­vi­ci très intéressant.

    Ça se confirme dans cet entre­tien avec Thinkerview :

    Réponse
  5. BA

    Cinq ministres sont mil­lion­naires : Muriel Péni­caud, Nico­las Hulot, Fran­çoise Nys­sen, Edouard Phi­lippe, Bru­no Le Maire.

    C’est la nou­velle aristocratie.

    Depuis mai 1974, la nou­velle aris­to­cra­tie dirige la France.

    La nou­velle aris­to­cra­tie a voca­tion à subir le sort de l’an­cienne aristocratie.

    Same­di 16 décembre 2017 :

    La Haute auto­ri­té pour la trans­pa­rence de la vie publique, qui a publié ven­dre­di les décla­ra­tions de patri­moine des membres du gou­ver­ne­ment, a révé­lé que plu­sieurs ministres étaient mil­lion­naires, par­mi les­quels Muriel Péni­caud, Nico­las Hulot et Fran­çoise Nyssen.

    https://​www​.roman​die​.com/​n​e​w​s​/​Q​u​e​l​q​u​e​s​-​m​i​n​i​s​t​r​e​s​-​m​i​l​l​i​o​n​n​a​i​r​e​s​-​a​u​-​g​o​u​v​e​r​n​e​m​e​n​t​_​R​P​/​8​7​3​3​7​0​.​rom

    Augus­tin de Roma­net de Beaune a été nom­mé pré­sident du conseil d’ad­mi­nis­tra­tion du domaine de Chambord.

    Emma­nuel Macron fête ses 40 ans au châ­teau de Chambord.

    Emma­nuel Macron a choi­si de fêter ses 40 ans quelques jours avant l’heure (il est né un 21 décembre) dans le châ­teau de Fran­çois Ier, à Cham­bord (Loir-et-Cher), selon une infor­ma­tion de La Nou­velle Répu­blique, confir­mée au Monde par des proches du président.

    Ces fes­ti­vi­tés pré­si­den­tielles inter­viennent alors qu’un nou­veau pré­sident du conseil d’administration du domaine de Cham­bord a été nom­mé, mer­cre­di 13 décembre, au conseil des ministres. A 56 ans, le pré­sident des Aéro­ports de Paris, Augus­tin de Roma­net de Beaune, ex-patron de la Caisse des dépôts, suc­cède ain­si au dépu­té de la Mayenne (Nou­velle Gauche) Guillaume Garot. 

    http://​www​.lemonde​.fr/​p​o​l​i​t​i​q​u​e​/​a​r​t​i​c​l​e​/​2​0​1​7​/​1​2​/​1​5​/​e​m​m​a​n​u​e​l​-​m​a​c​r​o​n​-​f​e​t​e​-​s​e​s​-​4​0​-​a​n​s​-​a​u​-​c​h​a​t​e​a​u​-​d​e​-​c​h​a​m​b​o​r​d​_​5​2​3​0​5​8​7​_​8​2​3​4​4​8​.​h​tml

    Réponse
  6. etienne

    TAFTA ta gueule à la récré – #DATAGUEULE 14

    Réponse
  7. BA

    Offen­sive média­tique des fédé­ra­listes européens.

    En Espagne, les grands médias font une pro­pa­gande ahu­ris­sante en faveur de Ciudadanos.

    Ciu­da­da­nos est un par­ti poli­tique espa­gnol, libé­ral, de centre-droite, par­ti­san d’une Europe fédérale.

    Ciu­da­da­nos est membre du « Par­ti de l’Al­liance des Libé­raux et des Démo­crates pour l’Europe ».

    Connais­sez-vous le « Par­ti de l’Al­liance des Libé­raux et des Démo­crates pour l’Europe » ?

    C’est le grand par­ti poli­tique euro­péen, libé­ral, par­ti­san d’une Europe fédé­rale, qui regroupe tous les par­tis de centre-droite d’Europe.

    https://fr.wikipedia.org/wiki/Parti_de_l%27Alliance_des_lib%C3%A9raux_et_des_d%C3%A9mocrates_pour_l%27Europe

    Cette scan­da­leuse pro­pa­gande en faveur de Ciu­da­da­nos inter­vient au moment même où, en Alle­magne, les fédé­ra­listes euro­péens dis­cutent avec Ange­la Merkel.

    En Alle­magne, beau­coup de fédé­ra­listes euro­péens sont situés au centre-gauche, au sein du Par­ti social-démocrate.

    Avant ses dis­cus­sions avec Mer­kel, Schulz pro­pose des « Etats-Unis d’Europe ».

    Pen­dant un congrès très agi­té cen­sé don­ner son feu vert à des dis­cus­sions « ouvertes » avec la CDU d’An­ge­la Mer­kel, le pré­sident du Par­ti social-démo­crate a pro­po­sé de créer des « Etats-Unis d’Eu­rope » en 2025.

    Cela res­semble plus à une fuite qu’à un nou­veau pro­jet phare du Par­ti social-démo­crate (SPD). Avant d’en­ta­mer des pour­par­lers pour éven­tuel­le­ment for­mer un gou­ver­ne­ment avec Ange­la Mer­kel, son pré­sident Mar­tin Schulz a pro­po­sé jeu­di la créa­tion « d’E­tats-Unis d’Eu­rope » d’i­ci 2025. « Je veux qu’il y ait une consti­tu­tion euro­péenne qui crée une Europe fédé­rale, a‑t-il décla­ré lors du congrès de son par­ti en appe­lant la tenue d’une convention. »

    https://​www​.lese​chos​.fr/​m​o​n​d​e​/​e​u​r​o​p​e​/​0​3​0​9​9​6​1​9​6​6​0​4​-​a​v​a​n​t​-​s​e​s​-​d​i​s​c​u​s​s​i​o​n​s​-​a​v​e​c​-​m​e​r​k​e​l​-​s​c​h​u​l​z​-​p​r​o​p​o​s​e​-​d​e​s​-​e​t​a​t​s​-​u​n​i​s​-​d​e​u​r​o​p​e​-​2​1​3​6​6​2​6​.​php

    Cette offen­sive média­tique des fédé­ra­listes est très importante.

    Par­tout en Europe, les fédé­ra­listes euro­péens appellent à la créa­tion des « Etats-Unis d’Europe ».

    Cette Europe fédé­rale, si elle voyait le jour, serait anti-sociale, anti-popu­laire, anti-démocratique.

    Cette Europe fédé­rale serait le triomphe de la nou­velle aristocratie.

    Réponse
  8. BA

    A pro­pos de la dis­lo­ca­tion de l’Espagne :

    A pro­pos de l’in­dé­pen­dance de la Catalogne :

    1- Les par­tis qui veulent l’in­dé­pen­dance obtiennent 70 sièges sur 135 :

    JUNTSx­CAT : Ensemble pour la Cata­logne, qui sou­tient l’an­cien pré­sident Carles Puig­de­mont : 34 sièges

    ERC-Cat­Si : Esquer­ra Repu­bli­ca­na de Cata­lu­nya, « Gauche répu­bli­caine de Cata­logne », coa­li­tion indé­pen­dan­tiste, menée par Oriol Jun­que­ras : 32 sièges

    CUP : Can­di­da­ture d’union popu­laire, for­ma­tion d’ex­trême-gauche qui défend tou­jours une indé­pen­dance uni­la­té­rale, menée par Carles Rie­ra : 4 sièges

    2- Les par­tis qui veulent res­ter dans la monar­chie espa­gnole obtiennent 57 sièges sur 135 :

    PSC : Par­ti socia­liste de Cata­logne, mené par Miquel Ice­ta : 17 sièges

    C’s : Ciu­da­da­nos, for­ma­tion de centre-droite, libé­rale et unio­niste, menée par Inés Arri­ma­das : 36 sièges

    PP : Par­ti popu­laire, for­ma­tion de la droite libé­rale : 4 sièges

    3- Une coa­li­tion est neutre, en posi­tion d’arbitre :

    Cat­Co­mu-Podem : « Cata­logne en com­mun – Pode­mos », alliance de Pode­mos et de la for­ma­tion diri­gée par la maire de Bar­ce­lone, Ada Colau. Cette coa­li­tion de la gauche radi­cale est menée par Xavier Dome­nech : 8 sièges.

    http://www.lepoint.fr/monde/catalogne-les-independantistes-obtiendraient-la-majorite-absolue-des-sieges-au-parlement-resultats-partiels-21–12-2017–2181874_24.php

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