Régis de Castelnau : VIOLENCE DE LA RÉPRESSION CONTRE LE MOUVEMENT SOCIAL : LA JUSTICE PREMIÈRE RESPONSABLE.

11/12/2019 | 1 commentaire

Encore un article REMARQUABLE de Régis de Castelnau.

Mon com­men­taire :

1) Nous devrions mettre l’ac­cent sur les VIOLENCES JUDICIAIRES, aus­si graves (sinon plus puisque les unes *rendent pos­sibles* les autres) que les vio­lences policières.

2) TOUTES ces vio­lences venant en fait de CEUX QUI LES ORDONNENT, on ferait mieux par­ler de VIOLENCES DES RICHES.

Étienne.

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VIOLENCE DE LA RÉPRESSION CONTRE LE MOUVEMENT SOCIAL : LA JUSTICE PREMIÈRE RESPONSABLE.

https://​www​.vudu​droit​.com/​2​0​1​9​/​1​2​/​v​i​o​l​e​n​c​e​-​d​e​-​l​a​-​r​e​p​r​e​s​s​i​o​n​-​c​o​n​t​r​e​-​l​e​-​m​o​u​v​e​m​e​n​t​-​s​o​c​i​a​l​-​l​a​-​j​u​s​t​i​c​e​-​p​r​e​m​i​e​r​e​-​r​e​s​p​o​n​s​a​ble

Poli­ciers répu­bli­cains ou dévoyés ?

La grande jour­née du 5 décembre dont per­sonne à part quelques mili­tants dégui­sés en jour­na­listes, n’a pu nier qu’elle était un grand suc­cès a pour­tant encore été mar­quée par d’intolérables vio­lences poli­cières. Aux quatre coins de la France, des camé­ras nous ont mon­tré des forces de l’ordre uti­li­ser sans aucun com­plexe une vio­lence par­fois sans frein fai­sant rejaillir sur l’ensemble du corps de la police un déshon­neur qui met­tra très long­temps à se dissiper.

Depuis un an, des poli­ciers dévoyés, s’en donnent à cœur joie et uti­lisent tran­quille­ment des méthodes dignes de milices de ner­vis, contre des mani­fes­tants vou­lant user de leurs liber­tés consti­tu­tion­nelles. Le tout sous le regard des camé­ras, des témoins, et de la presse étran­gère effa­rée, sans que cela émeuve beau­coup la presse mains­tream. À lon­gueur de pla­teaux et de colonnes, les édi­to­crates se relaient pour stig­ma­ti­ser les vio­lences des mani­fes­tants et res­ter muets sur l’effarant bilan d’un an de vio­lences poli­cières. Et Emma­nuel Macron aura beau dire « ne par­lez pas de ‘répres­sion’ ou de ‘vio­lences poli­cières’, ces mots sont inac­cep­tables dans un Etat de droit. », le catas­tro­phique Cas­ta­ner « qu’il faut arrê­ter de par­ler de vio­lences poli­cières » et Lae­ti­tia Avia pro­fé­rer sur Media­part devant un Ple­nel com­plai­sant cette vile­nie : « appor­tez-moi une vio­lence consta­tée et je serais la pre­mière à la condam­ner », il n’est per­sonne pour dou­ter de l’existence de ces vio­lences. Et pas grand monde ne peut se faire d’illusions sur leur carac­tère poli­ti­que­ment déli­bé­ré et orga­ni­sé, pro­ba­ble­ment sur ordre comme l’a démon­tré l’opération de la place d’Italie le 16 novembre der­nier avec le com­por­te­ment du pré­fet de police de Paris dont Jean-Luc Mélen­chon dit à juste titre « qu’il a des méthodes de psychopathe ».

Sous la pres­sion des réseaux où cir­culent témoi­gnages des exac­tions, et com­men­taires de la presse étran­gère, une par­tie de la grande presse natio­nale s’est sen­tie contrainte chan­ger un peu son fusil d’épaule et de rap­por­ter de façon beau­coup plus exacte ce qui se passe. Men­tion spé­ciale au jour­nal le Monde qui a com­men­cé à se pen­cher sur ces dérives avec hon­nê­te­té.

L’impression désas­treuse lais­sée par l’installation de cette répres­sion vio­lente se nour­rit bien sûr, de son bilan épou­van­table en termes de décès, d’amputations, de bles­sures sou­vent gra­vis­simes, mais aus­si et sur­tout de cette impres­sion d’une vio­lence com­plè­te­ment débri­dée, uti­li­sée abso­lu­ment sans com­plexe et nour­rie par un sen­ti­ment d’impunité qui pousse à la surenchère.

Com­ment en est-on arri­vé là ?

Pour une rai­son très simple : ceux dont c’est la mis­sion de contrô­ler l’utilisation par les forces de police de la vio­lence légi­time de l’État, ce sont les magis­trats du ser­vice public de la jus­tice. Ce sont eux qui sont char­gés de notre pro­tec­tion face à ces débor­de­ments. Toutes ces vio­lences dont le remar­quable tra­vail réa­li­sé par David Dufresne nous per­met d’avoir idée de l’importance, sont autant d’infractions sévè­re­ment répri­mées par le code pénal.

Il y a les vio­lences volon­taires par per­sonne dépo­si­taire de l’autorité publique pré­vues et répri­mées par les articles 222–7 et sui­vants du code pénal. Une lec­ture rapide montre bien que les vio­lences volon­taires comme le fait d’éborgner en visant la tête avec un LBD ou un lance-gre­nade sont des crimes rele­vant de la cour d’assises ! Com­ment qua­li­fier autre­ment que de « ten­ta­tive de meurtre » l’attentat dont a été vic­time le mal­heu­reux Oli­vier Beziade, pom­pier volon­taire bor­de­lais le 12 jan­vier 2019. Et il y a bien sûr aus­si des vio­lences volon­taires moins impor­tantes pour les­quelles dans toutes les incri­mi­na­tions du code, le fait qu’elles soient com­mises par des forces de l’ordre sont des cir­cons­tances aggra­vantes ! Ce sont donc bien les vio­lences poli­cières que le légis­la­teur a enten­dues répri­mer particulièrement.

Mal­heu­reu­se­ment la réponse judi­ciaire qui était du devoir des magis­trats com­pé­tents est sim­ple­ment un désastre, fruit d’une défaillance majeure dans le fonc­tion­ne­ment de la Jus­tice française.

Il y a cepen­dant une chose curieuse dans les débats autour des vio­lences poli­cières depuis un an, c’est que la plu­part de ceux qui les condamnent pointent la res­pon­sa­bi­li­té du ministre de l’intérieur et de son chef ins­tal­lé à l’Élysée et celle bien sûr les auteurs directs de ces vio­lences. On parle aus­si beau­coup du rôle de IGPN comme orga­nisme dis­ci­pli­naire interne pré­po­sé à l’étouffement et à l’impunité. Mais très peu des pre­miers res­pon­sables, ceux qui magis­trats des par­quets et juges du siège ont la res­pon­sa­bi­li­té par la répres­sion de ces vio­lences illé­gales. Et dont la mis­sion est de pro­té­ger notre inté­gri­té phy­sique et nos liber­tés à com­men­cer par celles consti­tu­tion­nelles de mani­fes­ta­tion et d’expression. Or, c’est jus­te­ment cette éton­nante défaillance qui a per­mis au pré­sident de la répu­blique et à ses amis de lâcher les chiens, dans le but avé­ré de répri­mer, de bru­ta­li­ser, d’estropier, d’intimider et d’empêcher la contes­ta­tion de la poli­tique vou­lue par ce pou­voir mino­ri­taire. On n’oubliera pas non plus les 5000 gardes à vue mani­fes­te­ment abu­sives, qui étaient autant de séques­tra­tions arbi­traires cou­vertes par les par­quets quand elles n’étaient pas direc­te­ment orga­ni­sées par eux.

Une Jus­tice ins­tru­ment poli­tique du pouvoir ?

On a déjà dit ici à plu­sieurs reprises que l’autorité judi­ciaire avait en grande par­tie ral­lié le pou­voir macro­niste et s’était mis à sa dis­po­si­tion. L’élection cir­cons­tan­cielle d’Emmanuel Macron en 2017 a ame­né au pou­voir un homme et un groupe et un groupe déci­dés à impo­ser au pays une poli­tique dont majo­ri­tai­re­ment il ne veut pas comme vient de le démon­trerRoma­ric Godin avec clar­té dans l’ouvrage qu’il vient de publier. Des trois outils de répres­sion dont dis­pose le pou­voir, à savoir les médias capo­ra­li­sés, les forces de police, et l’autorité judi­ciaire, c’est bien celui-ci qui est le plus impor­tant et aujourd’hui le plus utile.

Sa fonc­tion est triple :

• pro­té­ger les amis du pou­voir et leur évi­ter autant que faire se peut les sou­cis judi­ciaires. L’expérience a bien mon­tré le rôle que devait rem­plir le nou­veau pro­cu­reur de Paris choi­si par Emma­nuel Macron.

• Ins­tru­men­ta­li­ser la jus­tice à des fins poli­tiques contre les oppo­sants ins­ti­tu­tion­nels, Marine Le pen et Jean-Luc Mélen­chon en savent quelque chose…

• mener une répres­sion de masse contre le mou­ve­ment social des gilets jaunes. Le bilan inouï de 3000 condam­na­tions dis­tri­buées en quelques mois dont 1000 assor­ties de peines de pri­son ferme, est là pour en éta­blir la réa­li­té. Il suf­fit aus­si d’entendre les com­mu­ni­qués chif­frés de vic­toire d’Édouard Phi­lippe et de Nicole Bel­lou­bet devant le Par­le­ment. Mais ce que l’on a ten­dance à oublier c’est la deuxième facette de ce pou­voir de répres­sion, carac­té­ri­sé par le refus obs­ti­né, d’abord des par­quets, de pour­suivre effi­ca­ce­ment les vio­lences policières.

On ne va pas ici , faute de temps et de place, faire la liste de tous les exemples qui docu­mentent cette réa­li­té, nous conten­tant de reve­nir sur deux d’entre eux, tel­le­ment emblé­ma­tiques de cette dérive, qui se sont pré­ci­sé­ment dérou­lés le jour de la grande mani­fes­ta­tion syndicale.

Il y a tout d’abord cette vidéo où l’on voit dans une rue de Paris, deux poli­ciers en uni­forme adop­ter un com­por­te­ment de ner­vis pour s’acharner bru­ta­le­ment sur un homme à terre. Elle a fait le tour des réseaux pro­vo­quant enfin le scan­dale poli­tique que mérite ce genre d’agissements. Alors on nous dit que le par­quet de Paris a ouvert une enquête pré­li­mi­naire, mais compte tenu jus­te­ment du scan­dale, il ne pou­vait faire autre­ment ! On rap­pel­le­ra cepen­dant que l’enquête pré­li­mi­naire n’est pas contra­dic­toire et qu’elle est secrète. Qu’elle est à prio­ri confiée à l’IGPN dont on sait main­te­nant, et notam­ment depuis l’affaire Cani­co ce qu’il faut en pen­ser. Jusqu’à pré­sent lorsque les par­quets ont été contraints et for­cés de prendre de telles ini­tia­tives cela a débou­ché sur des clas­se­ments sans suite aus­si mas­sifs qu’invraisemblables. Pas une sus­pen­sion, pas une garde à vue, pas une mise en exa­men jusqu’à pré­sent. Juste sur plu­sieurs cen­taines d’affaires, une seule audience de juge­ment assez ridi­cule pour don­ner le change. Ce n’est pas avec cette ini­tia­tive d’ouverture d’enquête que le par­quet de Paris diri­gé par le magis­trat choi­si par Macron va redo­rer son blason.

Il y a ensuite un épi­sode qui s’est dérou­lé au Havre et fil­mé par deux jeunes gar­çons assis dans leur voi­ture garée sur un par­king. Deux poli­ciers en furie se pré­ci­pitent vers eux et mal­gré les objur­ga­tions des deux per­sonnes qui n’opposent aucune résis­tance, ils dégradent vio­lem­ment le véhi­cule et en extirpent bru­ta­le­ment les deux occu­pants. Mal­heu­reux, il y avait un gilet jaune sur le tableau de bord ! Vous ne saviez pas que dans la France de Macron c’est un crime jus­ti­fiant cette inter­ven­tion vio­lente ? Eh bien, il s’est trou­vé un membre du par­quet local pour cou­vrir la garde à vue infli­gée à la suite, et his­toire de faire bon poids pour habiller le tout, les deux gamins se sont vus déli­vrer une cita­tion en correctionnelle !

Mais reve­nons pour conclure sur la petite séquence de l’interview com­plai­sante de la dépu­tée LREM. Il y avait pire fina­le­ment que les décla­ra­tions de Lae­ti­tia Avia. L’attitude de cette diri­geante du Syn­di­cat de la Magis­tra­ture venant benoî­te­ment dire qu’elle avait peur d’aller à la mani­fes­ta­tion du 5 décembre à cause des vio­lences policières.

Vous avez rai­son Madame, user de sa liber­té consti­tu­tion­nelle de mani­fes­ta­tion est deve­nu désor­mais dan­ge­reux. Mais qu’avez-vous fait depuis un an, votre orga­ni­sa­tion syn­di­cale et vous même pour réel­le­ment dénon­cer et com­battre ces vio­lences ? Vous nous dites les avoir dénon­cés depuis plu­sieurs mois, la consul­ta­tion de votre site démontre pour le moins une pru­dente par­ci­mo­nie. Mais sur­tout, qu’ont fait vos col­lègues pour pour­suivre fer­me­ment et ain­si pré­ve­nir toutes ces vio­lences illé­gales ? Quand avez-vous cri­ti­qué cette défaillance de la Jus­tice, de votre Jus­tice, dans le contrôle des vio­lences poli­cières, défaillance qui les a permises ?

Et com­ment pou­vez-vous accep­ter que le prin­ci­pal outil de répres­sion dont se sert Macron contre le mou­ve­ment social soit celui du corps auquel vous appartenez ?

Régis de Castelnau.

Source : blog « Vu du droit », https://​www​.vudu​droit​.com/​2​0​1​9​/​1​2​/​v​i​o​l​e​n​c​e​-​d​e​-​l​a​-​r​e​p​r​e​s​s​i​o​n​-​c​o​n​t​r​e​-​l​e​-​m​o​u​v​e​m​e​n​t​-​s​o​c​i​a​l​-​l​a​-​j​u​s​t​i​c​e​-​p​r​e​m​i​e​r​e​-​r​e​s​p​o​n​s​a​ble

 

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1 Commentaire

  1. zedav

    Cher Etienne,
    Je sais que vous lisez beau­coup, mais je vais néan­moins vous recom­man­der le der­nier livre de Fré­dé­ric Lor­don : « Vivre sans ».
    Le cha­pitre : « l’é­tat, à prendre ou à lais­ser ? » est en par­ti­cu­lier d’une qua­li­té extraordinaire.
    Lor­don est un phi­lo­sophe pro­fond, radi­cal et puis­sant, même s’il peut man­quer de la plus élé­men­taire luci­di­té lors­qu’il se fait mili­tant (par­fois en contra­dic­tion avec ses consi­dé­ra­tions phi­lo­so­phiques, ce qu’il recon­nait lui même) ce qui a d’ailleurs pu vous concer­ner directement.

    Réponse

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