Chers amis,
Voici d’excellentes nouvelles regroupées en un seul livre, importantes et décisives : depuis quelques années, des scientifiques du monde entier sont en train de PROUVER que LA loi de la jungle, celle qui compte le plus, partout dans le monde vivant, y compris chez les hommes évidemment, la loi décisive qui permet de survivre, en fait, ce n’est pas la compétition, c’est l’entraide !
Depuis des années, je vous parle de Darwin et de Kropotkine (un prince russe devenu anarchiste qui a, lui aussi, écrit un livre passionnant intitulé L’Entraide), mais là, c’est tout un archipel de scientifiques très modernes qui apportent d’abord 1) un fondement scientifique solide à ce que prétendent les démocrates (les humains ne demandent qu’à s’entraider quand l’environnement s’y prête), et surtout 2) un argument majeur pour discréditer les couillonnades des prétendus « économistes » (qui nous voient tous comme des êtres égoïstes mus par leur seul intérêt, et qui nous imposent, sur ce fondement extravagant, des politiques publiques scandaleusement antisociales).
Je suis en train de dévorer un livre passionnant, intitulé L’entraide, l’autre loi de la jungle, de Pablo Servigne et Gauthier Chapelle, et il me semble que tous les humains soucieux de justice et de paix devraient lire ce formidable travail de compilation scientifique, le crayon à la main. Ce livre nous offre une véritable armurerie intellectuelle, économique et politique, contre les néolibéraux et contre les voleurs de pouvoirs.
http://www.editionslesliensquiliberent.fr/livre-L_Entraide-9791020904409–1‑1–0‑1.html
Pour commencer, Pablo Servigne présente ici son précieux bouquin en quelques minutes :
httpv://www.youtube.com/watch?v=-gB5x4LshGo
Je reproduis aussi ci-dessous la préface et l’introduction, alléchantes :
Préface d’Alain Caillé :
Quel beau symbole, au fond ! Deux biologistes de formation demandent à un sociologue de préfacer leur excellent livre. Qui ne parle que très peu de sociologie, à moins qu’il ne parle que de ça. Tout dépend, évidemment, de ce qu’on entend par sociologie. Et aussi par biologie, et, au-delà, par science économique, philosophie, etc. On l’aura compris : en mettant au jour une « autre loi de la jungle », pas celle du struggle for life ou de la loi du plus fort, mais aussi ou plus puissante qu’elle, la loi de la coopération et de l’entraide, Pablo Servigne et Gauthier Chapelle bousculent bien des frontières instituées entre les disciplines scientifiques — des frontières trop souvent hérissées de barricades et de barbelés. Et ils ouvrent la perspective de démarches de pensée généralistes et synthétiques qu’on avait trop tôt déclarées impossibles, voire indésirables. L’ambition est grande. Il ne s’agit de rien moins que de « comprendre la nature coopérative de l’être humain dans le sillage de celle des autres organismes vivants ». Sur ce sujet, écrivent nos auteurs, « pendant des années les résultats, les hypothèses et les théories de chaque discipline sont restés contradictoires. Aucun tableau global n’émergeait, il y avait trop de fossés entre les disciplines, et chacune travaillait en ignorant les autres. Ce n’est que très récemment que des progrès fulgurants ont permis de proposer une structure globale de cette « autre loi de la jungle » ». C’est de ces « progrès fulgurants » qu’ils nous font part.
Avant de tenter de préciser en quelques mots en quoi ces progrès nous importent, je voudrais souligner la fluidité et la maestria pédagogique avec lesquelles nos auteurs nous font entrer dans un univers infiniment complexe qu’ils rendent aisément accessible. Parmi bien d’autres exemples, on peut évoquer le passage où ils nous expliquent la formation d’un récif corallien à la manière d’une recette de cuisine (p. 260–261).
Pour ceux qui, comme moi, ne sont pas particulièrement passionnés par les virus, bactéries, archées, cyanobactéries ou autres bactéries dinoflagellées, on pourrait résumer le tout par cette belle formule de Victor Hugo, placée en exergue du livre : « Rien n’est solitaire, tout est solidaire. » Des virus et des bactéries aux sociétés humaines les plus vastes et les plus complexes, L’Entraide — dont le titre est emprunté au prince anarchiste Kropotkine et lui rend hommage — décrit à toutes les échelles du vivant, indéfiniment emboîtées les unes dans les autres, tous les entrecroisements possibles de lutte et de rivalité, d’une part, de coopération, d’entraide et de réciprocité (directe, indirecte ou renforcée), de l’autre, que ce soit entre des organismes d’une même espèce ou d’espèces différentes. Selon que c’est la coopération ou la lutte qui prédomine, on obtient une des six formes de relation suivantes : symbiose (ou mutualisme), coexistence, commensalisme, amensalisme, prédation (parasitisme) ou compétition.
De cette vaste synthèse, la leçon essentielle qui se dégage, à l’inverse de tous les darwinismes primaires (que ne partageait nullement Darwin lui-même…), est que, en matière d’évolution, la clé du succès n’est pas la lutte pour la vie, mais bien plutôt l’entraide. Ou, pour le dire plus précisément, selon la formulation de deux biologistes théoriciens de l’évolution, David S. et Edward O. Wilson (eh oui ! Edward Wilson, l’inventeur de la sociobiologie, dont on constatera qu’il a radicalement inversé son propos initial, au grand dam de ses adeptes et disciples) : « L’égoïsme supplante l’altruisme au sein des groupes. Les groupes altruistes supplantent les groupes égoïstes. Tout le reste n’est que commentaire. » Ou encore : dans l’ordre du vivant, des sociétés bactériennes aux sociétés humaines, la coopération est hiérarchiquement supérieure à la compétition.
Cette découverte, ici minutieusement argumentée et documentée, constitue un apport essentiel, tant au plan théorique qu’éthique et politique — deux plans d’ailleurs toujours étroitement imbriqués. Où en sommes-nous, en effet ? En science sociale — en économie, bien sûr, mais aussi en sociologie et en philosophie morale et politique —, le dogme dominant depuis les années 1970–1980 est que, dans la vie sociale, tout — actions, normes, institutions, croyances, etc. — s’explique par le jeu des intérêts en conflit, conscient ou inconscient. C’est la même croyance qui a dominé en biologie, avec la sociobiologie première manière et avec la théorie du gène égoïste. C’est ce que j’appelle l’axiomatique de l’intérêt, ou encore l’utilitarisme1.
Cette croyance hégémonique est au cœur du néolibéralisme. Elle s’est établie avant même que ne commence à triompher à l’échelle planétaire un capitalisme rentier et spéculatif, et elle a permis son essor. L’un, en effet, ne va pas sans l’autre. Pour pouvoir affirmer que la seule forme de coordination efficace, et donc souhaitable, entre les humains est le Marché, il faut se convaincre et convaincre le plus grand nombre que nous ne sommes que des Homo œconomicus, « mutuellement indifférents », comme le disait par exemple le philosophe star de la fin du XXe siècle, John Rawls. Après, le pas est facile à franchir : si la seule chose qui nous anime est notre intérêt personnel, et si la forme première ou ultime de celui-ci est l’appât du gain monétaire, alors libre à chacun de chercher à s’enrichir par tous les moyens possibles, le plus rapidement possible. Plus aucune digue ne doit venir contenir l’expansion continue des marchés spéculatifs, fut-ce au risque de la montée inexorable de la corruption, voire de la criminalité.
Après les livres de Matthieu Ricard ou de Jacques Lecomte, qui avaient ouvert une première brèche, L’Entraide vient à point pour nous aider à déconstruire cette croyance hégémonique. Dans le champ des sciences sociales, nous étions un peu seuls, au MAUSS2, à nous y opposer depuis une trentaine d’années, et à plaider pour une science sociale généraliste qui ne reposerait pas sur l’axiomatique utilitariste de l’intérêt, mais prendrait au contraire comme point de départ la découverte de l’anthropologue Marcel Mauss dans son célèbre Essai sur le don (1924) : celle que, au cœur du rapport social, on trouve non pas le marché, le contrat ou le donnant-donnant, mais ce qu’il appelle la triple obligation de donner, recevoir et rendre. Ou, si l’on préfère, la loi de la réciprocité. Quelle avancée que de découvrir avec P. Servigne et G. Chapelle que, mutatis mutandis, cette loi ne concerne pas seulement le monde humain, mais l’ensemble du vivant ! Tout ce qu’ils nous exposent est parfaitement congruent avec le « paradigme du don » élaboré peu à peu dans le cadre de La Revue du MAUSS.
Il n’est pas difficile d’en déduire les implications éthiques et politiques. Rien n’est plus urgent désormais que de combattre la démesure, l’hubris, la soif de toute-puissance qu’alimente le néolibéralisme et qui conduit l’humanité à sa perte. Jusqu’ici, une des principales raisons de notre incapacité à sortir du néolibéralisme planétaire a été un certain déficit de ressources théoriques. Mais c’est aussi le manque d’une philosophie politique, largo sensu, qui nous permette d’aller au-delà des grandes idéologies de la modernité — libéralisme, socialisme, anarchisme ou communisme. C’est cette élaboration doctrinale qu’amorcent les auteurs mondialement connus qui se reconnaissent sous la bannière du convivialisme3. P. Servigne (qui compte parmi eux) et G. Chapelle y contribuent de manière décisive. Un bel exemple d’entraide.
Alain Caillé
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Notes de la préface :
- Qui constitue la matrice de l’économisme, c’est-à-dire de la croyance que seule l’économie importe. Depuis les années 2000, en science sociale, la mode a tourné à un déconstructionnisme généralisé. Il s’agit de montrer que toutes les normes ou institutions existantes ont été construites historiquement, qu’elles n’ont donc aucune naturalité, mais se révèlent au contraire arbitraires. D’où il est tentant de conclure qu’on pourrait, voire qu’on devrait, les déconstruire. Il ne serait pas difficile de prouver que cette posture théorique représente l’avatar ultime d’un économisme généralisé.
- Cf. www.revuedumauss.com et www.journaldumauss.net.
- Cf. www.lesconvivialistes.org. Le Manifeste convivialiste (consultable et téléchargeable sur le site), signé par soixante-quatre auteurs alternatifs et engagés, bientôt rejoints par des dizaines d’autres à travers le monde, a été publié en 2013 aux éditions Le Bord de l’eau. Il a été traduit, en abrégé ou in extenso, dans une bonne dizaine de langues (dont le japonais, le chinois, le turc ou l’hébreu). Son premier mérite est d’énoncer des valeurs communes, universalisables, sur lesquelles ont pu se mettre d’accord des intellectuels inscrits dans des horizons idéologiques très divers, allant de la gauche de gauche au centre-gauche, ou droit, voire un peu au-delà à droite quant aux sympathies. Convergence essentielle, car on ne sortira de l’hégémonie du néolibéralisme que grâce à un large consensus mondial. Une des thèses centrales du Manifeste (inspirée de Marcel Mauss) est que le problème politique premier est de permettre aux humains de « coopérer en s’opposant sans se massacrer ». En lisant Servigne et Chapelle, on découvre que c’est très exactement le problème auquel le vivant en général a trouvé une réponse.
INTRODUCTION
L’âge de l’entraide
Connaissez-vous cette histoire ? C’est un mythe des années 1980, mais on dit qu’il vient d’une époque bien plus lointaine. Il était une fois la vie, une arène impitoyable où des millions de gladiateurs se battaient et s’entretuaient. Pas de cadeaux, pas de quartier, pas de pitié. L’agressivité était devenue un atout essentiel, c’était une question de survie. Dans ce monde, l’intelligence — pardon, la ruse — servait à passer devant les autres, ou, mieux, à les enfoncer. Il fallait surveiller ses arrières. « Que le meilleur gagne ! » entendait-on à l’envi. Le grand mangeait le petit, le plus rapide mangeait le plus lent, le plus fort mangeait le plus faible. C’était comme ça depuis la nuit des temps, disaient les sages. Si vous ne faisiez pas partie des gagnants, c’était pas de chance. D’ailleurs, c’était sûrement un peu de votre faute… « Bon sang ! Relevez-vous, battez-vous ! Gagner ! Réussir ! Vous ne comprenez donc pas ? »
Ce mythe a la vie dure. On dit qu’il se raconte encore de nos jours, un peu partout dans le monde. Entre employés pour grimper dans la hiérarchie des organisations, ou entre ces dernières pour conquérir des parts de marché. On raconte que, au plus haut niveau de l’État, c’est l’obsession de la compétitivité, ou la bataille pour la conquête du pouvoir. Ailleurs, c’est la lutte entre les équipes de foot, les candidats aux grandes écoles, les demandeurs d’emploi…
Bien entendu, ce ne sont pas de vraies guerres ; elles sont simulées, cathartiques, parfois théâtrales. Il paraît qu’elles canalisent les pulsions humaines pour nous empêcher de sombrer. Mais empêchent-elles les vrais affrontements, délits, crimes, conflits armés, guerres des classes, guerres des peuples ou guerres contre le vivant ?
La loi de la jungle
Si vous observez les êtres vivants (les « autres qu’humains ») à travers ce filtre, celui de la compétition, le tableau vous sautera aux yeux : le lion mange l’antilope, les chimpanzés s’entretuent, les jeunes arbres jouent des coudes pour l’accès à la lumière, les champignons et les microbes ne se font pas de cadeaux. Le mythe se déploie à la lumière de cet univers impitoyable. L’état de nature est synonyme de chaos, de lutte, de pillage et de violence. C’est la loi de la jungle, la « loi du plus fort », la « guerre de tous contre tous », selon l’expression d’un des pères du libéralisme, le philosophe Thomas Hobbes.
Les mythes donnent une couleur au monde. Et une idée répétée mille fois finit par devenir vraie. Faites l’expérience autour de vous : dites que l’être humain est naturellement altruiste, et l’on vous prendra probablement pour un naïf ou un idéaliste. Dites qu’il est naturellement égoïste, et vous aurez les faveurs des « réalistes ».
Depuis le siècle dernier, la culture occidentale, moderne et utilitariste, est effectivement devenue hypertrophiée en compétition, délaissant sa partie généreuse, altruiste et bienveillante, passablement atrophiée. L’entraide ? Mais qui y croit encore ? Parfois elle resurgit miraculeusement, à la faveur d’un fait divers exceptionnel relaté au 20 Heures ou dans une vidéo animalière sur Internet visionnée des millions de fois. Fascinant !
Soyons sincère : qui n’a jamais ressenti cette profonde joie d’aider un proche ou de se voir tendre la main ? Et que se passe-t-il quand une région est sinistrée par une inondation ? Y a‑t-il plus de pillages que d’actes de solidarité ? À l’évidence, non ! Les voisins se serrent les coudes, d’autres accourent des alentours et prennent des risques insensés pour sauver ceux qui doivent l’être. Des inconnus, à des centaines ou des milliers de kilomètres de là, s’organisent et envoient de l’argent. Plus largement, la sécurité sociale, la redistribution des richesses, l’aide humanitaire, l’école ou encore les coopératives ne sont-elles pas d’incroyables institutions d’entraide ? Pourquoi cela nous est-il devenu si invisible ?
Un examen attentif de l’éventail du vivant — des bactéries aux sociétés humaines en passant par les plantes et les animaux — révèle que l’entraide est non seulement partout, mais présente depuis la nuit des temps. C’est simple : tous les êtres vivants sont impliqués dans des relations d’entraide. Tous. L’entraide n’est pas un simple fait divers, c’est un principe du vivant. C’est même un mécanisme de l’évolution du vivant : les organismes qui survivent le mieux aux conditions difficiles ne sont pas les plus forts, ce sont ceux qui arrivent à coopérer.
En réalité, dans la jungle, il règne un parfum d’entraide que nous ne percevons plus. Ce livre sera une tentative de grande et profonde inspiration.
Hémiplégiques à en mourir
L’agressivité et la compétition existent dans le monde vivant : il ne s’agit pas de le nier. C’est par exemple la compétition qui permet d’éviter que des bactéries pathogènes n’envahissent l’écosystème microbien de notre bouche. Elle aussi qui permet aux félins de conserver leur territoire, ou encore à certains humains de stimuler leur goût de l’effort, voire leur esprit d’équipe. Le sport tel que nous le pratiquons est une façon ritualisée de canaliser la compétition. Cette dernière nous force à nous dépasser, et, pour certains, à « donner le meilleur d’eux-mêmes ».
Mais la compétition a aussi de sérieux inconvénients. Elle est épuisante. La plupart des animaux et des plantes l’ont bien compris : ils la minimisent et évitent au maximum les comportements d’agression, car ils ont trop à perdre. C’est trop risqué, trop fatigant. Pour un individu bien équipé, bien entraîné et psychologiquement au meilleur de sa forme, la compétition est un défi qui permet de progresser grâce à un effort puissant (et le plus court possible). Mais, pour les autres, ceux qui ne sont pas prêts, ceux qui ne veulent pas ou ne peuvent pas entrer dans l’arène, ou ceux qui y sont depuis trop longtemps, cet effort est une source infinie de stress.
De plus, la compétition sépare ; elle fait ressortir les différences. Les compétiteurs focalisent leur attention sur ce petit « delta », ce petit quelque chose qui les différencie de leurs concurrents et qu’il faut garder secret, car il leur permettra de gagner la course. Ne dit-on pas : « J’ai fait la différence » ? La compétition ne favorise pas le lien, elle pousse à tricher, détourne du bien commun. En effet, pourquoi investir dans le commun si cela peut favoriser les concurrents ?
Au fond, qu’est-ce que « gagner » ? Se retrouver sur la première marche du podium… dramatiquement seul ? Attirer le regard des autres par des passions tristes comme l’envie, la jalousie ou même le ressentiment ? Contribuer à créer une planète qui compte 99 % de « perdants » ?
En poussant le culte de la compétition à son extrême, et en l’institutionnalisant, notre société n’a pas seulement engendré un monde violent, elle a surtout ôté une grande partie de son sens à la vie. La compétition sans limite est une invitation — voire une obligation — à une course à l’infini. Le délitement des liens entre humains et des liens avec le vivant a créé un grand vide, un immense besoin de consolation, que nous tentons de combler en permanence par l’accumulation frénétique d’objets, de trophées, de conquêtes sexuelles, de drogues ou de nourriture. La démesure, que les Grecs appelaient l’hubris, devient alors la seule manière d’être au monde.
Compétition, expansion infinie et déconnexion du monde vivant sont trois mythes fondateurs de notre société depuis déjà plusieurs siècles. Leur mécanique s’est révélée extrêmement toxique : de la même manière qu’une cellule en expansion perpétuelle finit par détruire l’organisme dont elle fait partie, un organisme qui détruit l’environnement dans lequel il vit et empoisonne ses voisins finit par mourir seul dans un désert.
Nous avons malheureusement dépassé l’étape du simple avertissement. C’est là notre réalité. Notre rapport au monde a provoqué des basculements irréversibles : certains systèmes naturels qui constituent la biosphère ont été gravement déstabilisés, au point de menacer sérieusement les conditions de survie de nombreuses espèces sur terre, y compris la nôtre. Et c’est sans compter sur la fin imminente de l’ère des énergies fossiles, l’épuisement des ressources minérales, les pollutions généralisées, l’extrême fragilité de notre système économique et financier ou la croissance des inégalités entre pays et du nombre de réfugiés. Nous avons là une situation qui ressemble à un immense jeu de dominos instable, c’est-à-dire aux prémices d’un effondrement de civilisation1.
Le bilan des possibles formes que pourrait prendre cet enchaînement de catastrophes est appelé la collapsologie2 une discipline qui, au-delà de sa fonction d’information, permet de mettre en lien différents milieux et différentes sensibilités : écologistes, survivalistes, universitaires, militaires, ingénieurs, paysans, activistes, artistes, politiciens, etc. Au cours de nos rencontres avec tous ces acteurs préoccupés par la situation, nous avons été frappés de constater à quel point la question de l’entraide était récurrente et urgente. Fréquentes étaient les questions et les réactions telles que : « Comment faire pour que tout cela ne dégénère pas ? », « Nous allons tout droit vers un scénario à la Mad Max,.. Il faudrait faire ressortir le meilleur de l’être humain pour l’éviter ! », « Nous sommes égoïstes, les gens vont s’entretuer ! »
Si le climat économique, politique et social se dégrade rapidement, notre imaginaire, lui, gavé de cette monoculture de la compétition, produira toujours la même histoire : la guerre de tous contre tous et l’agressivité préventive. Par une prophétie auto-réalisatrice, les « croyants » se prépareront à la violence dans un climat de peur et créeront les conditions parfaites pour que naissent de vraies tensions. Alors qu’un autre scénario, celui de la coopération, pourrait tout aussi bien émerger… si tant est que nous l’incluions dans le champ des possibles !
Ce livre est né de l’idée d’explorer les conditions d’émergence des comportements d’entraide. À l’étincelle de départ — une curiosité scientifique qui date de plus de dix ans — s’est récemment ajouté un élan pour contacter une autre mythologie, enrichir un autre imaginaire, raconter de belles histoires bien enracinées dans révolution du vivant, avec le souci de minimiser les dégâts de cette spirale d’autodestruction et de violence, et, pourquoi pas, de contribuer à favoriser une spirale vertueuse.
L’émergence d’une autre loi de la jungle
Nous ne sommes ni les seuls ni les premiers à penser l’entraide. Ces dernières années, les articles scientifiques sur ce sujet se sont enchaînés à un rythme effréné. Mais ils restent malheureusement relativement inaccessibles au grand public et rares dans les cursus scolaires. Il en va de même pour la longue filiation intellectuelle philosophique et religieuse qui remonte à l’Antiquité et prend une dimension véritablement scientifique au XIXe siècle sous la plume, entre autres, du naturaliste Charles Darwin, du sociologue Alfred Victor Espinas, du géographe Pierre Kropotkine ou encore de l’anthropologue Marcel Mauss.
Qu’on ne s’y trompe pas : les héritiers de ces idées « naïves » sont nombreux. On pense au mouvement du MAUSS3, lancé en 1981 par Alain Caillé et qui aujourd’hui regroupe un grand panel d’intellectuels sous la bannière (très stimulante !) du convivialisme4. On pense aussi au tour d’horizon naturaliste de Jean-Marie Pelt (La Solidarité chez les plantes, les animaux, les humains, 2004), ainsi qu’aux monumentales synthèses de Jacques Lecomte (La Bonté humaine, 2012), de Matthieu Ricard (Plaidoyer pour l’altruisme, 2013) et de Pierre Dardot et Christian Laval (Communs, 2014). Philosophes, managers, écologues, économistes, anthropologues ou sociologues se démènent pour remettre sur le devant de la scène des notions aussi démodées et ringardes que l’altruisme5, la bonté6, la gentillesse7, l’association8, l’égalité9, les communs10, l’empathie11 ou la solidarité12.
La force de cette culture renaissante et émergente est de ne pas se contenter de rester dans les bibliothèques. Elle sort dans la rue, transforme le monde grâce à de nouveaux modes de consommation, de travail, de construction, d’apprentissage, de communication, de gestion13 ou de production14. L’émergence d’une culture des biens communs, du peer-to-peer et de la collaboration prend une dimension mondiale et touche tous les secteurs. Il est trop tard pour l’arrêter.
Au siècle dernier, notre monde est devenu extrêmement performant en matière de mécanismes de compétition. Il est grand temps de devenir tout aussi compétents en matière de coopération, de bienveillance et d’altruisme. L’autre objectif de ce livre est d’apporter une pierre à cet édifice, de participer à la structuration de cette nouvelle culture. En puisant dans plusieurs disciplines, de l’éthologie à l’anthropologie en passant par l’économie, la psychologie, la biologie, la sociologie ou les neurosciences, nous proposons un tour d’horizon des plus récentes découvertes sur cette tendance très puissante qu’ont les êtres vivants (et pas seulement les humains) à s’associer. L’idée d’inclure le reste du monde vivant dans la synthèse était d’arriver à dégager des principes généraux et une architecture générale de ce que l’on pourrait désormais appeler « l’autre loi de la jungle ».
Le chantier du siècle
Notre surprise a été de constater l’incroyable diversité des processus, des sentiments et des mécanismes à l’œuvre depuis la nuit des temps. Mais comment nommer ce monde infiniment complexe, riche et coloré ? Comment nommer cette tendance qui décrit aussi bien une association entre bactéries qu’une entente entre humains ou entre grands singes impliquant des sentiments aussi subtils que l’altruisme, la bonté, l’amitié, la gratitude, la réconciliation ou le sens de la justice ? Nous avions besoin d’un terme qui inclue à la fois les actes et les intentions, mais aussi tous les organismes vivants et tous les processus.
Nous avons choisi le terme d’entraide, conscients qu’il n’a pas la même définition pour tous, et qu’il peut parfois impliquer une touche d’anthropomorphisme, surtout lorsqu’il s’agit de décrire les comportements d’êtres vivants qui ne nous ressemblent en rien. Mais ce mot a aujourd’hui l’avantage d’être à la fois bien accepté par le langage courant et suffisamment oublié des sciences pour être à l’abri d’une définition trop étroite. C’est aussi et surtout un clin d’œil au grand géographe et anarchiste Pierre Kropotkine, l’un des pionniers de cette aventure scientifique, qui écrivit en 1902 une remarquable synthèse dont le titre, Mutual Aid, fut traduit par son ami, le non moins géographe et anarchiste Élisée Reclus, par « entr’aide », mot qu’il offrit à la langue française15.
Le sujet est évidemment colossal. Chaque chapitre de notre livre pourrait faire l’objet d’un traité de plusieurs tomes ! Le but n’était pas d’en faire un travail encyclopédique, mais d’établir des ponts entre les disciplines, en particulier entre les sciences humaines et les sciences biologiques. Voir leur discipline croquée à grands traits génère évidemment d’inévitables frustrations chez les spécialistes, et il en va de même pour nous, qui aurions aimé partager encore plus d’extraordinaires détails des mécanismes du vivant16.
Nous avons démarré ce chantier il y a une douzaine d’années, avec autant d’enthousiasme que de naïveté. Notre label « biologique17 » ne nous avait pas préparés à absorber les incroyables avancées des sciences humaines, ni les paradoxes qui émergeaient de ce foisonnement de découvertes18. Explorer tout cela a été une véritable aventure qui n’a fait qu’attiser toujours davantage notre curiosité. Ce bilan est donc loin d’être définitif, et il se révèle être au final une invitation à continuer l’exploration.
Ce livre n’est pas un traité de collapsologie, ni une critique de la société de consommation et du capitalisme, pas plus qu’une encyclopédie naturaliste ou un traité philosophique. C’est une tentative pour faire du lien entre tout cela et poser un jalon sur le chemin de notre génération.
Nous commencerons notre voyage en tordant le cou au mythe d’une nature agressive où ne régnerait qu’une seule loi. Puis nous découvrirons au fil des chapitres les mécanismes et les subtilités de l’entraide humaine. Enfin, nous terminerons en revenant à l’ensemble du monde vivant, ce qui nous permettra d’effleurer quelques grands principes de la vie sur terre.
Pablo Servigne et Gauthier Chapelle
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Notes de l’introduction :
- Pour l’instant, les pays industrialisés sont relativement épargnés, mais uniquement grâce à un fragile écran de technologie… qui dépend de ressources énergétiques et minérales de moins en moins accessibles.
- Servigne et Stevens R. (2015).
- Mouvement anti-utilitariste en sciences sociales. Voir ia préface de ce livre, ainsi que le site de La Revue du MAUSS, www.revuedumauss.com.fr/.
- Manifeste des convivialistes (2013) ; Alain Caillé (dir.) et les Convivia-listes (2016); www.lesconvivialistes.org.
- Kourilsky (2009) ; Kourilsky (2011) ; Ricard (2013) ; Ricard et Singer (dir.) (2015).
- Lecomte (2012).
- Jaffelin (2015); Martin (2014).
- Laville(2010).
- Wilkinson et Pickett (2013).
- Dardot et Laval (2014) ; Coriat (dir.) (2015).
- De Waal (2009) ; Rifkin (2011).
- Pelt (2004) ; Supiot (dir.) (2015) ; Mathevet (2011).
- Malgré les progrès récents de certaines entreprises, force est de constater la consternante inertie de ce milieu. Gauthier Chapelle a été conseiller en développement durable (en biomimétisme) pendant dix ans pour les entreprises. Il s’efforçait de leur montrer que, en s’inspirant des relations d’entraide du monde vivant, leur organisation serait non seulement durable, mais bien plus efficace. Malheureusement, il s’est souvent rendu compte que de nombreuses entreprises ne voulaient pas prendre le risque de changer leur structure et leur raison d’être.
- Pour un tour d’horizon, voir Novel (2013) ; Riot, Novel (2012) ; Filip-povafcoord.) (2015). Sur les moyens de communication, voir Rifkin (2014); Bauwens (2015). Sur les entreprises, voir Laloux (2015); Lecomte (2016). Sur l’énergie, voir Rifkin (2012).
- L’apostrophe disparut en 1931. À ce sujet, lire Enckell (2009).
- Nous n’avons malheureusement pu inclure dans ce travail qu’environ un tiers de notre bibliographie, et nous sommes conscients que celle-ci ne doit représenter qu’une petite partie de ce qui est disponible sur le sujet…
- Nous sommes tous deux agronomes de formation et spécialistes de biologie animale. Nous avons surtout le point commun d’éprouver, depuis notre plus tendre enfance, un grand malaise à baigner dans ce mythe d’une nature cruelle, agressive et compétitive. Cela ne colle ni avec notre expérience, ni avec nos observations, ni avec notre ressenti. Même si notre sensibilité naturaliste nous a vaccinés contre une telle soupe idéologique, il nous a tout de même fallu plus de vingt-cinq ans pour transformer cette intuition en certitude, et quelques années de plus pour inscrire cette dernière dans une synthèse cohérente.
- Pendant des années, les résultats, les hypothèses et les théories de chaque discipline sont restés contradictoires. Aucun tableau global n’émergeait. Il y avait trop de fossés entre les disciplines, et chacune travaillait en ignorant les autres. Ce n’est que très récemment que des progrès fulgurants ont permis de proposer une structure globale de cette « autre loi de la jungle ».
* * * * *
Source : « L’Entraide. L’autre loi de la jungle », livre de Gauthier Chapelle et Pablo Servigne, éditions Les Liens Qui Libèrent, 2017 http://www.editionslesliensquiliberent.fr/livre-L_Entraide-9791020904409–1‑1–0‑1.html
Enfin, le sommaire montre bien que ce livre est d’une richesse inouïe pour tous les humanistes (concentrez-vous, chaque ligne compte, ce bouquin est un bijou) :
Table
Préface, par Alain Caillé
Introduction. L’âge de l’entraide
La loi de la jungle
Hémiplégiques à en mourir
L’émergence d’une autre loi de la jungle
Le chantier du siècle
Chapitre 1. Histoire d’un oubli
Partout, tout le temps, et de toutes les couleurs
Entre semblables
Entre lointains cousins
Entre organismes qui n’ont rien à voir
Nos plus lointains ancêtres, champions de l’entraide toutes catégories
Toutes les couleurs de la « symbiodiversité »
Nous sommes une inextricable pelote d’interdépendances
Remettre les pendules à l’heure
Pourquoi la société ne l’a pas vue — Une histoire de mythes
Kropotkine, le prince anarchiste à contre-courant
Les oeillères de notre société
Pourquoi la science ne l’a pas vue – Une histoire de gènes
Avant les années 1970
Vie, mort et renaissance de la sociobiologie, 1970–2000
La renaissance des années 2000
Chapitre 2. L’entraide spontanée
Contrairement aux idées reçues
Où vit l’Homo oeconomicus ?
Ce qui émerge en situation de crise
Ce qui émerge du stress et de l’inconnu
Comment expliquer ces automatismes ?
La fin des modèles simplistes
Un automatisme malléable
Chapitre 3. Les mécanismes du groupe
Le noyau dur de l’entraide : la réciprocité
L’obligation de rendre
Les racines de la réciprocité
Le passage au groupe : la réciprocité étendue
La réputation (la réciprocité indirecte)
Récompenses et punitions (la réciprocité renforcée)
Les très grands groupes : la réciprocité invisible
Les normes sociales
Les institutions
Chapitre 4. L’esprit du groupe
Un moment magique : quand le groupe fait corps
Le sentiment de sécurité
Le sentiment d’égalité
Le sentiment de confiance
La naissance d’un superorganisme
Vers des principes universels ?
Les « fondamentaux », une mise en pratique
Les principes d’une bonne gouvernance
L’entraide poussée à l’extrême
La dissolution du soi
L’extase collective
La fermeture du groupe
Un moment tragique : quand l’entraide s’effondre
Chapitre 5. Au-delà du groupe
Le principe du grand méchant loup
La compétition avec d’autres groupes
Un environnement hostile
Un objectif commun à atteindre
Les groupes peuvent-ils s’entraider ?
Dépasser la compétition entre les groupes
Les mêmes mécanismes qu’au niveau inférieur
Une limite de taille ?
L’opportunité des catastrophes globales
Chapitre 6. Depuis la nuit des temps
L’évolution de l’entraide humaine
S’associer pour survivre
Une bande de primates immatures
L’évolution de l’entraide entre semblables
« L’union fait la force » : la puissance de la sélection de groupe
« Winter is coming » : la puissance du milieu hostile
Les autres forces évolutives
L’évolution de l’entraide entre espèces
Avoir besoin de l’autre
… parfois de manière réciproque
… au point de ne plus pouvoir s’en passer
Encore et toujours le milieu hostile
Une source infinie d’innovation
L’entraide appelle l’entraide
Se transformer au contact des autres
Passer au niveau supérieur
Comment l’entraide a changé la face du monde
Conclusion. Le nouveau visage de l’entraide
Bien plus qu’une simple loi de la jungle
Les grands principes de l’entraide
Vers une nouvelle vision de l’entraide
Épilogue. Pour quel monde ?
Allons-nous nous entretuer ?
Vers une autre mythologie
Au-delà de l’humanité
Annexe. De la « nouvelle sociobiologie »
Tremblement de terre au pays de la sociobiologie
Le secret devait se trouver dans les gènes
La lente trahison du père fondateur
La puissance d’un seul homme
Les diverses forces évolutives à l’origine de l’entraide
À l’origine de la sociobiologie : sélection de parentèle et altruisme réciproque
La découverte d’autres voies : réciprocité indirecte et sélection spatiale
Vers une sociobiologie plus ouverte et plus complexe
Gratitude
Références
Bibliographie sélective
Les ouvrages indispensables en français
Les indispensables en anglais
En lisant ce livre, j’ai découvert, commandé et commencé une autre perle : « La bonté humaine. Altruisme, empathie, générosité » de Jacques Lecomte… et je me régale… 🙂
Je rangerai ces précieux outils avec mes livres de Jean-Marie Pelt (« La loi de la jungle » 2003, « La solidarité chez les plantes, les animaux, les humains » 2004), et à côté des livres épatants de Frans de Waal (notamment « L’âge de l’empathie » 2009), sur le (grand) rayon « Respect et exemplarité des animaux / éthique / bien-mal / humanité-animalité ».
Bonne lecture à tous, bande de virus 🙂
Étienne.
Fil Facebook correspondant à ce billet :
Bonjour monsieur Chouard, J’ai votre livre : Nous ne sommes pas en démocratie. Vous êtes contre l’élection mais pour, pour les scrutins municipaux. Mais, même s’il y a proximité, n’y-a‑t–il pas de contrôle de la part des gouvernés en dépit de la proximité ?
J’ai lu La bonté humaine.. et je me suis également régalé !
Bonne année à tous et toutes !
Emmanuel Macron se joint à moi pour vous souhaiter une bonne année 2018 ! Confettis !
http://media.urtikan.net/wp-content/uploads/2017/12/171231-voeux-macron-2018-deligne.jpg
De JM Pelt, il y a aussi *La raison du plus faible* (2009) :
https://www.babelio.com/livres/Pelt-La-raison-du-plus-faible/151102
Résumé :
Alors que l’on s’apprête à célébrer en 2009 le cent cinquantième anniversaire de la théorie de l’évolution fondée par Darwin dans L’Origine des espèces, ce nouvel essai de Jean-Marie Pelt s’emploie à récuser la fameuse « loi de la jungle » qui, dans une nature réputée « cruelle », serait le seul moteur de l’évolution.
Il montre qu’il existe une raison du plus faible : tout au long de l’histoire de la vie sur terre, des premières bactéries jusqu’à l’homme, là où les plus gros et les plus forts n’ont pas su résister aux grands cataclysmes et aux changements climatiques, ce sont souvent les créatures les plus humbles qui ont survécu.
C’est aussi parmi les plus faibles que sont nées les plus belles histoires de solidarité, par la symbiose. C’est enfin chez les plus vulnérables que l’ingéniosité adaptative a développé ses plus belles inventions.
Notre société humaine, livrée à un esprit de compétition exacerbé, où les « tueurs » de la guerre économique sont venus renforcer les rangs des guerriers dans la lutte pour le « toujours plus », est promise aux mêmes cataclysmes, financiers ou nucléaires, si elle n’entend pas cette leçon de la nature qui fait de l’égoïsme la maladie mortelle des plus forts et de la solidarité la force indéfectible des faibles.
Dans cet ouvrage fourmillant d’anecdotes puisées au cœur du monde végétal et animal, Jean-Marie Pelt s’en donne à cœur joie pour nous raconter l’extraordinaire énergie des petits, réputés faibles
Générosité animale :
Albert Jacquard : « On est en train de sélectionner les gens les plus dangereux »
httpv://www.youtube.com/watch?v=5VopPG4QV_s
Ce n’est pas parce que la loi de la « jungle » existe, qu’il faut l’appliquer à tout bout de champ. L’humain a cette capacité que les animaux n’ont pas, c’est d’en être conscient. Nous en avons conscience, nous en connaissons les conséquences possibles et nous laissons faire. A quoi sert notre « intelligence » ? Comment la valorise-t-on ? A produire des marchandises ? A dominer l’autre ?
Henri Laborit dans « mon oncle d’Amérique » :
https://youtu.be/FQcC-VB_W‑s?t=6961
httpv://youtu.be/FQcC-VB_W‑s
« On commence à comprendre par quel mécanisme, pourquoi et comment, à travers l’histoire et dans le présent se sont établi des échelles hiérarchiques de dominance. Pour aller sur la lune, on a besoin de connaître les lois de la gravitation. Quand on connaît ces lois de la gravitation, ça ne veut pas dire qu’on se libère de la gravitation. Ça veut dire qu’on les utilise pour faire autre chose. Tant que l’on n’aura pas diffusé très largement à travers les hommes de cette planète la façon dont fonctionne leur cerveau, la façon dont ils l’utilisent, tant qu’on n’aura pas dit que, jusqu’ici, ça a toujours été pour dominer l’autre, il y a peu de chances qu’il y ait quelque chose qui change. »