Les ateliers constituants populaires (quotidiens et contagieux) ne sont pas « théoriques » : ils sont une réaction sociale de survie, pragmatique et ultra-prioritaire
À lire absolument :
Théorie du drone, par Grégoire Chamayou
https://lafabrique.atheles.org/livres/theoriedudrone/
Nombreux extraits dans ma page ‘Précieuses pépites’ (cherchez ‘Chamayou’) :
« Les grandes conquêtes impériales qui furent les nôtres à l’autre bout de la terre parce que nous possédions la mitrailleuse Maxim et, qu’en face, ils n’avaient que des sagaies, nous reviendront en mémoire à la vue de ces nouveaux exploits, où le sang ne coulera plus, ou du moins plus de notre côté, car nous aurons les groupes téléchiriques [machines commandées à distance], alors qu’eux, les pauvres, n’auront que du napalm et du gaz moutarde à leur opposer. »
Anonyme, 14 mai 1964, cité par Grégoire Chamayou dans « Théorie du drone », p 39.
Les ressorts différentiels de l’indignation morale ont leurs mystères. Tandis que la chasse virtuelle aux animaux suscitait un scandale à peu près universel, la chasse à l’homme télécommandée pouvait, à la même époque, prendre tranquillement son essor, dans des formes similaires, sans que personne, parmi ces mêmes acteurs, n’y trouvât rien à redire.
Grégoire Chamayou, « Théorie du drone », p 49.
Une guerre qui requiert de notre part une chasse à l’homme internationale.
George W. Bush, 14 février 2003, cité par Grégoire Chamayou dans « Théorie du drone », p 49.
Mais il restait un problème : « comment organiser le département de la Défense pour les chasses à l’homme ? À l’évidence, confiait Rumsfeld en 2002, nous ne sommes pas bien organisés pour cela à l’heure actuelle. » L’appareil militaire états-unien n’était pas prêt, au début des années 2000, a assurer efficacement à l’échelle mondiale des missions habituellement dévolues à la police dans l’espace domestique : l’identification, la traque, la localisation et la capture ─ mais plutôt dans les faits, l’élimination physique ─ d’individus suspects.
Grégoire Chamayou, « Théorie du drone », p 50.
Quoi qu’il en soit, il fallut s’attacher à définir et imposer une nouvelle doctrine stratégique. Des chercheurs travaillèrent à énoncer les « principes théoriques de la chasse à l’homme » destinés à servir de cadre à ces opérations. George A. Crawford les résuma dans un rapport publié en 2009 […] Ce texte, qui se proposait de « faire de la chasse à l’homme un des fondements de la stratégie étatsunienne », en appelait notamment à créer une « agence nationale de la chasse à l’homme », instrument indispensable pour « bâtir une force de chasse à l’homme du futur ».
Grégoire Chamayou, « Théorie du drone », p 51.
David Rohde, journaliste au New York Times kidnappé en 2008 et détenu au Waziristan pendant sept mois, fut l’un des premiers occidentaux à décrire les effets que cette surveillance létale persistante produit sur les populations qui la subissent. Évoquant un « enfer sur terre », il ajoute : « les drones étaient terrifiants. Depuis le sol, il est impossible de déterminer qui ou quoi ils sont en train de traquer pendant qu’ils décrivent des cercles au-dessus de votre tête. Le bourdonnement lointain du moteur sonne comme le rappel constant d’une mort imminente. […] Tout le monde a peur tout le temps. »
Grégoire Chamayou, « Théorie du drone », p 67.
Les critères pertinents, pour l’établissement de ces listes de condamnés à mort sans procès, demeurent inconnus. L’administration se refuse à toute précision en la matière.
Grégoire Chamayou, « Théorie du drone », p 69.
Avec le concept de « guerre globale contre la terreur », la violence armée a perdu ses bornes traditionnelles : indéfinie dans le temps, elle l’est aussi dans l’espace. Le monde entier, dit-on, est un champ de bataille. Mais il serait plus exact de dire un terrain de chasse. Car si le rayon de la violence armée se globalise, c’est au nom des impératifs de la traque.
Grégoire Chamayou, « Théorie du drone », p 79.
La Common Law anglaise autorisait autrefois, dans les campagnes, à « mener la chasse aux bêtes de proie nuisibles, tels les renards et les putois, jusque sur la propriété d’autrui ; parce que détruire de telles créatures était réputé d’intérêt public ». C’est ce genre de droit que voudraient aujourd’hui s’arroger les États-Unis, pour des proies humaines, à l’échelle du monde. Il faut, résumait Paul Wolfowitz, « leur dénier tout sanctuaire ».
Ce qui se dessine, c’est un pouvoir invasif se fondant moins sur une notion de droit de conquête que de droit de poursuite. Un droit d’intrusion et d’empiètement universel qui autoriserait à courir sus à la proie partout où elle se réfugie […]
En devenant stratosphérique, le pouvoir impérial modifie son rapport à l’espace. Il s’agit moins d’occuper un territoire que de le contrôler par le haut en s’assurant la maîtrise des airs. Eyal Weizman explique en ces termes tout un pan de la stratégie israélienne contemporaine, qu’il décrit comme une « politique de la verticalité ». Dans ce modèle, « technologie plutôt qu’occupation », il s’agit de « maintenir la domination sur des zones évacuées par d’autres moyens que le contrôle territorial ». À cette verticalisation du pouvoir correspond une forme d’autorité hors-sol, où tout, chaque individu, chaque maison, chaque rue, « même le plus petit événement sur le terrain peut être surveillé, soumis à des mesures de police ou détruit depuis le ciel.
Grégoire Chamayou, « Théorie du drone », p 80.
Lorsqu’elle est établie, le but immédiat d’une « kill box » [zone dessinée sur une carte géographique] est d’autoriser les forces aériennes à conduire des opérations contre des cibles de surface sans autre coordination avec le commandement. […] chaque cube devient alors une « zone autonome d’opération » pour les unités combattantes qui en ont la charge. En clair, dans un cube donné, feu à volonté. Une « kill box » est une zone de tuerie temporaire.
Grégoire Chamayou, « Théorie du drone », p 83.
Il s’agit en fait de nano-drones, des robots insectes autonomes capables de marauder en essaim et de « naviguer dans des espaces de plus en plus confinés ». Grâce à des engins de ce type, la violence armée pourrait s’exercer dans de tout petits espaces, dans des micro-cubes de mort. Plutôt que de détruire tout un immeuble pour éliminer un individu, miniaturiser l’arme, passer dans les embrasures et confiner l’impact de l’explosion télécommandée à une seule pièce, voire à un seul corps. Votre chambre ou votre bureau deviennent une zone de guerre. […]
En redéfinissant la notion de zone de conflit armé comme un lieu mobile rattaché à la personne de l’ennemi, on en arrive à revendiquer, sous couvert de droit des conflits armés, l’équivalent d’un droit à l’exécution extrajudiciaire étendu au monde entier, même en zone de paix, contre tout suspect, hors procédure, y compris contre ses propres citoyens.
Grégoire Chamayou, « Théorie du drone », p 85–87.
La guerre de guérilla a toujours posé problème à des grandes puissances régulièrement empêtrées dans des conflits asymétriques. […] Le drone apparaît comme la réponse tardive à ce problème historique : il retourne contre la guérilla, mais sous une forme radicalement absolutisée, son vieux principe : priver l’ennemi d’ennemi. Un partisan confronté à une armée de drones ne dispose plus d’aucune cible à attaquer.
Grégoire Chamayou, « Théorie du drone », p 93.
Si vous faites quelque chose pendant suffisamment longtemps, le monde finira par l’accepter. […] Le droit international progresse par des violations. Nous avons inventé la thèse de l’assassinat ciblé et il nous a fallu l’imposer.
Daniel Reisner, ancien directeur du département juridique de l’armée israélienne, cité par Grégoire Chamayou dans « Théorie du drone », p 231.
Fil Facebook correspondant à ce billet :
Version française (6 min)
https://www.facebook.com/IZap4u/videos/1610669965643349
En voici l’origine.
https://youtu.be/FS6rSNkjViM
Bonjour Etienne,
Je me permets de quitter le silence et de passer de simple spectateur à acteur (ce qui n’est pas mon habitude).
Voici plusieurs vidéos que je vous entends être dépité de ne pas comprendre pourquoi, (alors que vous arrivez à convaincre rapidement quelqu’un qui est, à la base, réticent à vos idées) l’idée du tirage au sort et de la reprise en main par nous-mêmes de la constitution ne se propage pas plus vite, voir stagne à un certain nombre de personnes.
Après avoir appris beaucoup de chose de votre part, je vais tenté d’apporter ma pierre à l’édifice.
Comme vous l’avez compris et dit dans certaines vidéos, ça dépend du niveau de conscience de la personne, mais être conscient du problème ne suffit pas. C’est surtout le niveau de conscience général de la personne qui importe si elle va intégrer ou non l’idée dans sa vie.
L’étude des niveaux de conscience est une « matière » très peu développé, voir inexistant en France. Pourtant, elle est déterminante pour comprendre le monde dans lequel on vit et comment il pourrait évoluer.
Un auteur comme Ken WILBER (philosophe américain), énormément publié dans le monde, peine à vendre en France.
Pour faire simple, tout le monde sait à peu près que l’enfant suit des niveaux de développement qui font qu’un jour, vous versez le liquide d’un petit verre dans un grand verre, il dira qu’il y a plus de liquide dans le grand verre. Puis un ou deux ans plus tard, vous refaites l’expérience et il saura que le grand verre contient la même proportion de liquide que le petit. Son niveau de conscience a évolué. C’est PIAGET qui a mis à jour ces « stades » de conscience. Sauf que l’on croit que ce développement s’arrête magiquement à 18 ans. Il n’en est rien et il est existe différents stades (ou niveaux) de conscience à l’âge adulte (je simplifie volontairement). Ces stades ont été repérés par beaucoup de chercheurs, mais Ken WILBER reste, le plus accessible. Il existe également la « Spirale Dynamique » de Don BECK, qui classe les systèmes de valeur en fonction du niveau de conscience (appelé « même »). C’est ce développement que je vais prendre comme exemple pour expliquer votre souci.
Chaque même correspond à une couleur qui correspond à un système de valeur. Chaque humain suit la même évolution en commençant par beige, violet, rouge, bleu, orange, vert, jaune et turquoise (pour l’instant).
Toujours pour faire simple, rouge correspond à la domination par la force (je suis le plus fort donc j’ai raison, les systèmes féodaux par exemple), le bleu correspond à l’obéissance au règle, à un dieu autoritaire (les grandes religions), ensuite orange correspond à l’esprit rationnel (la science comme autorité, le libéralisme, la démocratie), puis vient le vert qui, là où orange était rationnel et donc laissait les émotions de côté, lui prend en compte les émotions, voir trop. Vert refuse également les hiérarchies (multiculturalisme, déconstructivisme, féminisme…). Jusque là, chaque même trouve que l’autre même est un con.
Puis, on passe au niveau supérieur (appelé deuxième palier) avec le même jaune, là où les gens commencent à se prendre en main, comprennent qu’ils sont arrivés là parce qu’ils sont passés par tous les stades précédents, comprennent qu’il existe des hiérarchies naturelles (contraire des hiérarchies autoritaires), voient la vie plus de façon systémique. Je passe sur turquoise qui n’a pas grand intérêt pour notre démonstration.
Le tirage au sort, comme la prise en main de la constitution par le peuple est une idée plutôt jaune et, comme le dit un disciple de WILBER, cela ne peut marcher que si la majorité de la population à un niveau de conscience jaune.
Or, le compte n’y est pas. Dans nos société occidentales, 70% se situe entre bleu et orange, 20% est vert et seulement 1% est jaune (et encore, je pense que c’est très optimiste). Faites le compte, le reste est en dessous de bleu.
Donc si 1 % veulent devenir indépendants, se gérer sans représentants élus, sans chefs, ça n’est pas le cas de 99% de la population. Et même si jaune arrive à convaincre vert, il faut que vert passe une majorité de ces valeurs à jaune, et contrairement à ce que pense Michel ONFRAY, quand il juge la validité d’un philosophe sur son vécu et non sur ses écrits, la pensée précède toujours les actes, il faut toujours un certain temps pour que la pensée passe en action (faire le deuil de son ancien système). Tout ça prend énormément de temps, pour une personne isolée, ça peut aller plus vite, mais pour une population, on parle en génération (et encore, au plus on monte en même, au plus ça va vite). Et si vous voulez convaincre orange ou bleu, ils seront de toute façon obligés de passer par les autres stades avant d’arriver à jaune (de toute façon, ce sont les personnes qui ne veulent même pas en entendre parler).
Ca peut paraître désespérant, mais c’est un fait.
Et donc quand vous parlez de la cause des causes, il y a également la cause de la cause des causes, c’est-à-dire le niveau de conscience général.
Pour ceux que ça intéresse, je mets le lien d’ « Un entretien avec Ken WILBER » qui parle de la spirale de BECK (et qui en parle largement mieux que moi).
http://www.human-side.com/wilber/InterviewShamb1.htm
Ensuite, il y a le livre » La spirale dynamique » de Fabien et Patricia CHABREUIL (sinon, il y a de nombreux sites qui en parle plutôt bien).
Enfin, les livres de Ken WILBER traduits en français, avec « Une brève histoire de tout » que je conseille fortement, mais « Le livre de la vision intégrale » est très bien aussi pour commencer.
Mickaël D.
Bonjour Mickaël D,
Très intéressant, ce petit exposé sur les niveaux de conscience. Merci.
Je commence à mieux comprendre certaines choses, maintenant que je vous ai lu.
Je vais creuser le sujet.
Pour en revenir à la rédaction de la Constitution par le peuple français, eh bien les riches n’ont qu’à se frotter les mains : le temps joue pour eux. Hélas.
Cordialement.
Thierry
Tu m’fous la trouille avec tes trucs !
Comme çà , ils vont pouvoir lever l’état d’urgence , plus de débats sur le sujet , et sur bien d’autres !
Démonter leurs programmes .…
Ben bonne nuit , je ne vais pas pouvoir dormir moi
Sur les origines…
Cybernétique – Nouvelles du front, par Nathanaël Leroy
Partie 1 :
httpv://www.youtube.com/watch?v=2cPp-ZVW1VA
Partie 2 :
httpv://www.youtube.com/watch?v=IdSxvq7QCDQ
Une des premières mises en garde :
Vers la machine à gouverner (P. Dubarle, journal le monde 1948)
http://www.nanomonde.org/IMG/pdf/Dubarle_1948.pdf
Eh bien sûr , s’ils automatisent la bourse de Berlin , ils ont probablement penser à une génératrice de secours en cas de panne .…..
Une bonne raison pour le FN de chercher le pouvoir absolu …
mais pas seulement eux !
Je ne sais pas si une constitution populaire changerait les projets de ces cinglés , mais ne pas abandonner , chacun à sa hauteur !
Merci pour ces infos capitales
Au moins , nous savons à peu près où nous allons maintenant !
Beaucoup de points d’inhumanité nous sont visibles actuellement , nos jeunes n’en semblent pas conscients ou en deviennent des adeptes par souci de modernisme pour toujours aussi en faire partie ! Cette vie de programmes va nous les avaler !
L’ archaïsme va souffrir encore plus , nos traces vont disparaitre , les suivants ne trouveront que de la tôle et des ondes !
Dans 5000 ans , seuls qques livres de démocratie gardés dans une bibli du midi seront lus dans toutes les écoles de cette ère nouvelle !
Un travail de titan a fourni ce monsieur !
Merci à lui infiniment !
Bonne semaine
Étant donné l’importance de cette vidéo, je vous ai fait une traduction en français sous-titrée.
http://www.blueman.name/Des_Videos_Remarquables.php?NumVideo=8774
Merci Étienne pour avoir déniché cette perle !
A Mickaël D.
Exposé intéressant mais quels sont les niveaux de conscience dans des situations d’urgence par rapport à une situation de normalité.
Le jaune est-il toujours au plus bas ?
Ce sont des théories qui ne prennent pas en compte l’Histoire MAIS l’Humain.
Il faut regarder pour cela les événements sur un très long terme et croire que « l’impossible » est irréalisable n’est pas un fait qui se vérifie dans l’histoire.
Tout est changement sur le plan historique. Du climat, à l’économie,en passant par les crises énergétiques et j’en passe ont accouché de l’imprévu.
La chute du communisme n’a pas attendu que la population soit « jaune » ou verte ..mais la réalité d’un régime moribond et « rouillé » de l’intérieur. On ne peut séparer l’Etre humain et l’Histoire. Ce sont 2 éléments qui s’interpénètrent à chaque instant..