[Révolution monétaire – Chartalisme] Sortir de l’austérité sans sortir de l’euro… grâce à la monnaie fiscale complémentaire (Libération)

13/03/2017 | 8 commentaires

Je vous signale deux docu­ments inté­res­sants sur les causes (et solu­tions) moné­taires de « la crise » :

1) D’a­bord, une courte vidéo, bien inté­res­sante, à écou­ter le crayon à la main :

Jean-Michel Naulot : CRISE FINANCIÈRE, pourquoi les gouvernements ne font rien

httpv://www.youtube.com/watch?v=TPox2yLANbg

Avec un livre qui devrait être inté­res­sant, (com­man­dé mais pas encore reçu => je vous en reparlerai) :


http://​www​.seuil​.com/​o​u​v​r​a​g​e​/​e​v​i​t​e​r​-​l​-​e​f​f​o​n​d​r​e​m​e​n​t​-​j​e​a​n​-​m​i​c​h​e​l​-​n​a​u​l​o​t​/​9​7​8​2​0​2​1​3​4​0​358


2) Mais sur­tout une tri­bune magni­fique, brève et puis­sante, de quelques éco­no­mistes que j’aime bien, dans Libé­ra­tion — alors ça, ça vaut de l’or : appré­ciez chaque phrase, c’est vrai­ment bien que l’i­dée char­ta­liste germe ain­si aus­si puissamment 🙂

Sortir de l’austérité sans sortir de l’euro… grâce à la monnaie fiscale complémentaire

Par Tho­mas Cou­trot , Domi­nique Pli­hon , Woj­tek Kali­nows­ki , Bru­no Thé­ret , Gaël Giraud , Vincent Gayon , Jean-Michel Ser­vet Jérôme Blanc , Marie Fare et Ben­ja­min Lemoine — 8 mars 2017
Sortir de l’austérité sans sortir de l’euro… grâce à la monnaie fiscale complémentaire
Sor­tir de l’austérité sans sor­tir de l’euro… grâce à la mon­naie fis­cale com­plé­men­taireAFP

Intro­duire des liqui­di­tés dans une éco­no­mie en crise grâce à une mon­naie com­plé­men­taire, ados­sée aux recettes fis­cales à venir, per­met­trait d’imaginer d’autres poli­tiques sans pour autant remettre en ques­tion la mon­naie com­mune. Cela per­met­trait une sta­bi­li­sa­tion de la zone euro.


Via les cré­dits qu’elles accordent, les banques com­mer­ciales pri­vées dis­posent dans la zone euro d’un qua­si mono­pole de créa­tion de la mon­naie. Après les injec­tions mas­sives de liqui­di­tés à bas coût de la Banque cen­trale euro­péenne (BCE) au sys­tème ban­caire pri­vé, il est clair que ce mono­pole enferme l’économie euro­péenne dans une trappe défla­tion­niste. Dans les périodes réces­sives, les banques com­mer­ciales sont struc­tu­rel­le­ment inca­pables d’assurer une créa­tion contra­cy­clique de mon­naie de cré­dit des­ti­née aux sec­teurs pro­duc­tifs. Pour nour­rir leurs pro­fits, elles dirigent l’essentiel de leurs liqui­di­tés vers les mar­chés finan­ciers où elles ali­mentent de dan­ge­reuses bulles spé­cu­la­tives. Aus­si, de nom­breux éco­no­mistes et cer­tains poli­tiques s’accordent sur la néces­si­té de reti­rer aux banques leur pri­vi­lège de créa­tion de la mon­naie, et la Suisse vote­ra sur cette ques­tion en 2018. Néan­moins une telle réforme sup­pose dans l’Union euro­péenne (UE) un accord entre Etats membres qui, dans son état actuel, n’est pas prêt d’aboutir. Que faire d’autre ? Sor­tir de l’euro ?

L’accession en Grèce en 2015 de Syri­za au gou­ver­ne­ment a conduit à envi­sa­ger une autre stra­té­gie qui, déci­dée par un Etat, lui per­met­trait de sor­tir d’une poli­tique d’austérité sans remettre en cause l’unité de la zone euro : injec­ter de la liqui­di­té par l’émission d’une mon­naie fis­cale com­plé­men­taire à l’euro. Dans cette stra­té­gie, l’euro est conser­vé en tant que mon­naie com­mune de cours légal dans tous les Etats membres, mais est com­plé­té par un moyen de paie­ment natio­nal consti­tué de bons du Tré­sor de faible déno­mi­na­tion – de 5 à 50 euros – et de durée limi­tée mais renou­ve­lable. Ados­sés comme toute dette publique aux recettes fis­cales à venir, ces bons seraient libel­lés en euro-franc, et main­te­nus à pari­té avec l’euro sans pour autant être conver­tibles sur les mar­chés des changes.

Il ne s’agit donc pas d’émettre une mon­naie ayant cours légal, mais de pro­po­ser des titres de cré­dit des­ti­nés au règle­ment des salaires des fonc­tion­naires, des pres­ta­tions sociales et des achats publics, dépenses qui sont de fac­to de la dette publique de court terme. Ils seraient réci­pro­que­ment accep­tés en paie­ment des impôts et, grâce à cette der­nière garan­tie, pour­raient cir­cu­ler en tant que moyens de paie­ment au niveau national.

Face aux poli­tiques d’austérité prô­nées actuel­le­ment, il y a urgence à émettre ce type de mon­naie par­tout où la mon­naie unique conduit à la réces­sion, au chô­mage de masse, à la mon­tée de l’insécurité sociale et à l’abandon des inves­tis­se­ments de long terme indis­pen­sables à la tran­si­tion éco­lo­gique. Mais le couple mon­naie com­mune – mon­naie fis­cale com­plé­men­taire n’est pas seule­ment une solu­tion d’urgence ; c’est aus­si poten­tiel­le­ment un outil durable de sta­bi­li­sa­tion moné­taire de la zone euro. En effet, la réduc­tion de la dette publique par auto­fi­nan­ce­ment de la dette flot­tante et l’amélioration du solde des échanges exté­rieurs par réduc­tion des impor­ta­tions (la cir­cu­la­tion géo­gra­phi­que­ment limi­tée de l’euro-franc inci­te­rait à relo­ca­li­ser la pro­duc­tion) réduisent la dépen­dance exté­rieure des Etats à l’égard tant de la finance inter­na­tio­nale que des mar­chés exté­rieurs qui sont la source prin­ci­pale de son instabilité.

Cette forme de liqui­di­té émise par les Etats sans pas­ser par les banques n’est pas nou­velle, et sa com­bi­nai­son avec une mon­naie com­mune dans un sys­tème poli­tique de type fédé­ral a été expé­ri­men­tée avec suc­cès dans les années 30 aux Etats-Unis et, plus récem­ment, entre 1984 et 2003 en Argen­tine. Ces expé­riences montrent que, sous cer­taines condi­tions, un tel dis­po­si­tif moné­taire rem­plit son office de réduc­tion de la dette publique et de redy­na­mi­sa­tion de l’économie locale, sans créer de ten­sion infla­tion­niste ni de décro­chage entre la mon­naie locale et la mon­naie centrale.

En l’état actuel des trai­tés euro­péens, la stra­té­gie ici pro­po­sée est conforme au prin­cipe de sub­si­dia­ri­té qui recon­naît à tout Etat membre de l’Union la capa­ci­té de prendre des ini­tia­tives propres en matière de poli­tique fis­cale et bud­gé­taire. Les Etats ne sont nul­le­ment obli­gés de se sou­mettre aux mar­chés et aux banques com­mer­ciales pour se finan­cer, sur­tout à court terme. Rien ne les empêche de dis­po­ser de leurs propres sys­tèmes de paie­ment, dès lors que ceux-ci rem­plissent les condi­tions de sécu­ri­té requises.

Se doter d’une mon­naie fis­cale natio­nale – en France, l’euro-franc – com­plé­men­taire à l’euro ban­caire per­met­trait de finan­cer les ser­vices publics et de mettre fin aux poli­tiques d’austérité actuelles qui menacent le pro­jet euro­péen lui-même. C’est une poli­tique réa­liste qui peut être déci­dée immé­dia­te­ment et uni­la­té­ra­le­ment au niveau natio­nal sans aller à l’encontre des trai­tés euro­péens. Mais pour assu­rer le suc­cès de l’euro-franc, il ne suf­fit pas que l’Etat en garan­tisse l’acceptabilité en l’instituant comme moyen d’acquitter des impôts et en sta­bi­li­sant sa valeur à la pari­té avec l’euro. Il doit aus­si être sou­te­nu par une large par­tie de la popu­la­tion qui le recon­naisse comme un ins­tru­ment cré­dible de sor­tie de l’austérité. Pour cela, une frac­tion des euro-francs créés pour­rait être dis­tri­buée aux PME et aux ménages endet­tés comme moyen de règle­ment de leurs dettes (pri­vées). Cette mesure ferait d’une pierre quatre coups : par ce jubi­lé par­tiel des dettes, elle met­trait fin à l’excès d’endettement pri­vé, cause prin­ci­pale de la réces­sion dont souffre notre éco­no­mie ; loin de péna­li­ser les créan­ciers rési­dents, elle les sécu­ri­se­rait, vu le contexte d’une sol­va­bi­li­té très incer­taine ; elle accom­pli­rait le quan­ti­ta­tive easing for the people (« assou­plis­se­ment moné­taire pour les gens ») dont Mario Dra­ghi recon­naît qu’il est de nature à relan­cer l’économie euro­péenne et l’emploi ; elle met­trait en cir­cu­la­tion une mon­naie com­plé­men­taire à une échelle qu’aucune des mon­naies locales qui s’inventent aujourd’hui ne peut ambitionner.

Bien sûr, d’autres moyens d’assurer la confiance dans cette mon­naie sont par­fai­te­ment conce­vables. Gageons qu’un tel euro-franc ne tar­de­rait pas à être imi­té par nos voi­sins, ce qui redon­ne­rait du même coup sa légi­ti­mi­té à un euro deve­nu mon­naie commune.

Tho­mas Cou­trot , Domi­nique Pli­hon , Woj­tek Kali­nows­ki , Bru­no Thé­ret , Gaël Giraud Vincent Gayon , Jean-Michel Ser­vet , Jérôme Blanc , Marie Fare , Ben­ja­min Lemoine

Source : « Libé­ra­tion », http://​www​.libe​ra​tion​.fr/​d​e​b​a​t​s​/​2​0​1​7​/​0​3​/​0​8​/​s​o​r​t​i​r​-​d​e​-​l​-​a​u​s​t​e​r​i​t​e​-​s​a​n​s​-​s​o​r​t​i​r​-​d​e​-​l​-​e​u​r​o​-​g​r​a​c​e​-​a​-​l​a​-​m​o​n​n​a​i​e​-​f​i​s​c​a​l​e​-​c​o​m​p​l​e​m​e​n​t​a​i​r​e​_​1​5​5​4​260

 
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On ne se sortira du pétrin qu’en reprenant la création monétaire aux banques commerciales
(qui nous l’ont volée !)

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[Edit 24h après : je viens de rece­voir le livre. Je vous ai scanné/OCRisé la table des matières :]

Jean-Michel NAULOT, « Évi­ter l’ef­fon­dre­ment. Les poli­tiques nous pré­parent une catas­trophe finan­cière pire que le pré­cé­dente » (Seuil, 2017)


http://​www​.seuil​.com/​o​u​v​r​a​g​e​/​e​v​i​t​e​r​-​l​-​e​f​f​o​n​d​r​e​m​e​n​t​-​j​e​a​n​-​m​i​c​h​e​l​-​n​a​u​l​o​t​/​9​7​8​2​0​2​1​3​4​0​358

Table

Remer­cie­ments           9

Aver­tis­se­ment  11

1. UNE GÉNÉRATION QUI A FAIT MONTER LES « POPULISMES » 15

Res­pon­sable et cou­pable       15

Depuis le milieu des années 1980, ils sont habi­tés par les démons du dog­ma­tisme  18

Le débat actuel révèle une grande méfiance à l’é­gard de la démo­cra­tie directe       20

L’ob­ses­sion du fédé­ra­lisme et l’ob­ses­sion du tout-libé­ral sont les ter­reaux du popu­lisme     23

La géné­ra­tion aux com­mandes est non seule­ment res­pon­sable mais cou­pable         26

La gauche, amie de la finance, a per­du ses marques 27

La droite, amie de la mon­naie unique, a elle aus­si per­du ses marques         29

Le conte de fées d’un libé­ra­lisme qui dope la crois­sance       32

Le fan­tasme de la mon­naie unique qui apporte la puis­sance et la pros­pé­ri­té           41

L’ins­tru­men­ta­li­sa­tion de la dette publique : vrai­ment des cigales, les citoyens ?       44

La jeu­nesse oubliée     47

Il faut savoir dire « non »         50

2. CE VOLCAN FINANCIER QUI NOUS MENACE …59

Pour­quoi la pro­chaine crise risque d’être pire encore        59

Savoir résis­ter au « syn­drome de Gri­gnan » ! 61

Le pro­blème, ce n’est pas la petite aiguille, mais la bulle . 63

La mon­naie n’est pas un voile 65

La créa­tion moné­taire extra­va­gante des banques cen­trales et des banques com­mer­ciales  67

L’his­toire agi­tée des banques cen­trales indé­pen­dantes .…71

Le monarque moné­taire 74

Défaillances des banques : insuf­fi­sance d’é­thique ou insuf­fi­sance de régu­la­tion ? 81

Le régu­la­teur sou­vent en retard sur l’in­no­va­tion finan­cière des banques     83

Nou­velles règles ban­caires : une simple remise à niveau      86 

La pon­dé­ra­tion des risques a intro­duit un biais inéga­li­taire dans l’al­lo­ca­tion des finan­ce­ments 87

La fable des méga-banques qui pour­raient faire faillite sans faire appel au contri­buable   89

Banques sys­té­miques : leur taille ne devient-elle pas un pro­blème ? 95

La tyran­nie accep­tée des mar­chés finan­ciers 96

1) La moi­tié des tran­sac­tions sur les mar­chés d’ac­tions est déré­gle­men­tée 98

2) Sur les grandes valeurs cotées, en Europe et aux États-Unis, plus de la moi­tié des tran­sac­tions est due au tra­ding à haute fré­quence alors que l’u­ti­li­té éco­no­mique et sociale de cette pra­tique est proche de zéro 101

3) Le mon­tant des pro­duits déri­vés reste qua­si­ment inchan­gé 103

4) Les hedge funds ont un effet de levier (une capa­ci­té spé­cu­la­tive) non régle­men­té 112

5) La qua­si-tota­li­té des hedge funds est domi­ci­liée dans les para­dis fis­caux 115

6) Les mar­chés de matières pre­mières sont domi­nés à plus de 80 % par des acteurs finan­ciers et non par les indus­triels 116

7) La finance de l’ombre (la finance peu ou pas régle­men­tée) repré­sente plus du tiers de la finance mon­diale 118

8) La poli­tique de limi­ta­tion des émis­sions de gaz à effet de serre est confiée aux mar­chés finan­ciers 123

Une dette mon­diale à un niveau his­to­rique 130

Comme en 1929, comme en 2007–2008, les condi­tions d’une crise sys­té­mique sont réunies            133

À la veille de la crise de 1929 135

À la veille de la crise de 2007–2008   136

En 2017          138

Quatre foyers de crise conti­nuent de se déve­lop­per 139

États-Unis : défi­cits et inéga­li­tés 140

Zone euro : la crise tou­jours là 143

Chine : dés­équi­libres héri­tés de 2007–2008   144

Japon : la dette 145

Une réa­li­té de plus en plus évi­dente : le ralen­tis­se­ment de la crois­sance mon­diale 146

Une absence de gou­ver­nance inter­na­tio­nale face à la menace d’une crise grave 148

3. LES « MENOTTES » DE L’EURO 151

Un système moné­taire au bord de la faillite            151

Nais­sance de l’eu­ro : un copier-col­ler de l’or­do­li­bé­ra­lisme alle­mand 154

L’Al­le­magne a réus­si à impo­ser un ordre juri­dique à la zone euro 158

Une flexi­bi­li­té sociale qui prend ses dis­tances avec l’é­co­no­mie sociale de mar­ché 160

L’aus­té­ri­té comme seul hori­zon 163

Les règles bud­gé­taires du trai­té de Maas­tricht ont été dur­cies une pre­mière fois avec le Pacte de sta­bi­li­té et de crois­sance en 1997     165

À la fin de l’an­née 2010, la Com­mis­sion euro­péenne a mis en place le « Semestre euro­péen », un pro­gramme de tra­vail très contrai­gnant afin de peser for­te­ment sur les poli­tiques éco­no­miques et bud­gé­taires de la zone euro   166

Le Semestre euro­péen a été com­plé­té par des textes légis­la­tifs très impor­tants, le six-pack puis le two-pack          167

Pour « faci­li­ter » la réa­li­sa­tion de ce tra­vail, la Com­mis­sion uti­lise de plus en plus dans ses dis­cus­sions avec les États les « lignes direc­trices inté­grées »  170

Le TSCG (Pacte bud­gé­taire), rati­fié à l’au­tomne 2012, a cou­ron­né ce pro­ces­sus d’in­tru­sion dans les poli­tiques bud­gé­taires natio­nales en trans­po­sant une « règle d’or » ins­pi­rée de celle qui figure dans la Loi fon­da­men­tale alle­mande de 1949           171

La pra­tique sinistre de la déva­lua­tion interne            174

Le biais inéga­li­taire de la zone euro 180

Un taux de change de l’eu­ro qui ne convient à per­sonne, sauf à l’Al­le­magne 186

Dix ans d’eu­ro, tous à l’hos­to ! 192

Le coût finan­cier des crises    194

Pre­mier coup de canif de la BCE dans l’in­ter­dic­tion de finan­cer les États    194

Deuxième coup de canif : les finan­ce­ments illi­mi­tés à un État en dif­fi­cul­té (OMT)     195

Troi­sième coup de canif : le quan­ti­ta­tive easing          197

Le finan­ce­ment des banques cen­trales du Sud par les banques cen­trales du Nord   198

Le finan­ce­ment des États par les États           199

Ges­tion de la crise grecque : la honte de l’Eu­rope    199

Aide à la Grèce : vingt-cinq fois le mon­tant de l’aide à l’Ar­gen­tine    200

Une ges­tion cala­mi­teuse de la crise par la troï­ka      202

13 juillet 2015 : une jour­née noire dans l’his­toire de l’Eu­rope           203

Et la démo­cra­tie dans tout cela ?       205

Les « menottes » de l’eu­ro      208

Ces éco­no­mistes qui avaient mis en garde     210

Une pen­sée unique qui tue la poli­tique          214

La bulle Dra­ghi          219

4. RESTAURER LA PRIMAUTÉ DU POLITIQUE 225

Réar­ti­cu­ler gou­ver­nance inter­na­tio­nale et sou­ve­rai­ne­té éco­no­mique natio­nale   225

1) Réduire l’hy­per­tro­phie de la finance, c’est-à-dire le dés­équi­libre entre la finance et l’é­co­no­mie réelle, grâce à une meilleure gou­ver­nance inter­na­tio­nale           227

Renon­cer au double dis­cours sur la réforme de la finance    228

Com­ment évi­ter les pièges ten­dus par les lob­bies ? Quelques règles simples de bonne conduite     235

S’in­ter­dire tout ce qui pour­rait conduire à une forme de conni­vence            236

Évi­ter le dés­équi­libre des rap­ports de force lors des négo­cia­tions    238

Fixer des délais rap­pro­chés pour la mise en place des réformes      238

Faire des textes simples          240

Ne pas don­ner trop d’im­por­tance aux consul­ta­tions publiques         240

Ten­ter de détec­ter les risques liés à l’in­no­va­tion finan­cière sans attendre l’ac­ci­dent de mar­ché      241

Se méfier de ceux qui évoquent en per­ma­nence l’é­thique et la trans­pa­rence            242

Être peu récep­tif à l’ar­gu­ment de la « liqui­di­té du mar­ché »    243

Rete­nir une défi­ni­tion stricte du mar­ket making         243

Don­ner la prio­ri­té à la maî­trise du risque sys­té­mique sur la com­pé­ti­ti­vi­té de la place finan­cière    244

Revoir les sta­tuts des banques cen­trales pour limi­ter leur dépen­dance à l’é­gard des mar­chés finan­ciers    245

Réfor­mer la « boîte noire » de la pon­dé­ra­tion des risques et les struc­tures ban­caires pour remettre les banques au ser­vice de l’é­co­no­mie réelle    248

Dix mesures pour assai­nir en pro­fon­deur les mar­chés finan­ciers     255

Pre­mière mesure : le pas­sage de toutes les tran­sac­tions de pro­duits déri­vés par des ins­ti­tu­tions spé­cia­li­sées super­vi­sées par la BCE      256

Deuxième mesure : la limi­ta­tion de l’ef­fet de levier des hedge funds 258

Troi­sième mesure : le trai­te­ment des opé­ra­tions de bourse sur les seuls mar­chés régle­men­tés        260

Qua­trième mesure : la taxa­tion des ordres du tra­ding à haute fré­quence      262

Cin­quième mesure : l’in­ter­dic­tion aux acteurs finan­ciers de spé­cu­ler sur les matières pre­mières    263

Sixième mesure : la trans­pa­rence et l’en­re­gis­tre­ment des opé­ra­tions trai­tées dans le sha­dow ban­king 263

Sep­tième mesure : l’o­bli­ga­tion faite aux gérants de hedge funds de domi­ci­lier leurs fonds à l’en­droit où ils les gèrent            265

Hui­tième mesure : l’har­mo­ni­sa­tion fis­cale en Europe 267

Neu­vième mesure : l’har­mo­ni­sa­tion des normes comp­tables autour de cri­tères ins­pi­rés par le bon sens et la néces­si­té d’as­su­rer la sta­bi­li­té finan­cière          269

Dixième mesure : la mise en place d’une taxe car­bone euro­péenne   271

Une gou­ver­nance inter­na­tio­nale entre les mains des gou­ver­ne­ments et non des ban­quiers cen­traux          273

2) Réta­blir notre sou­ve­rai­ne­té éco­no­mique en redon­nant de la flexi­bi­lité moné­taire et bud­gé­taire à la zone euro    276

Des diri­geants poli­tiques enfin tou­chés par la grâce dans le débat sur l’eu­ro ? La parole à Léon Blum     277

Sor­tir de l’entre-deux par plus d’in­té­gra­tion poli­tique ne peut se faire sans réfé­ren­dum      280

Un big-bang ins­ti­tu­tion­nel qui serait plein de dan­gers          285

Les peuples n’at­tendent pas plus d’in­té­gra­tion mais au contraire plus d’in­dé­pen­dance et de flexi­bi­li­té       289

La refon­da­tion des trai­tés exige d’a­bord l’as­sou­plis­se­ment des cri­tères bud­gé­taires de Maas­tricht et de la règle d’or du TSCG (Pacte bud­gé­taire)        289

La refon­da­tion des trai­tés exige aus­si de revoir entiè­re­ment les moda­li­tés de fonc­tion­ne­ment de la mon­naie unique            291

N’ayons pas peur des tur­bu­lences pro­vo­quées par la tran­si­tion vers un sys­tème plus flexible !       294

3) Gou­ver­nance inter­na­tio­nale et sou­ve­rai­neté éco­no­mique sont deux notions com­plé­men­taires et non pas oppo­sées, deux fils conduc­teurs face à la mon­dia­li­sa­tion    299

Res­tau­rer la pri­mau­té du poli­tique pour évi­ter un effon­dre­ment       300

Maî­tri­ser le capi­ta­lisme finan­cier, cette face noire de la mon­dia­li­sa­tion       301

Le débat sur la mon­dia­li­sa­tion est légi­time et néces­saire       302

Conclu­sion

Agir main­te­nant        305


Rap­pel de quatre billets mémo­rables publiés sur ce blog sur ce thème : 

• CHARTALISME : les peuples crèvent par MANQUE D’ARGENT. C’est L’ÉTAT qui DOIT créer l’argent, AVANT qu’on le lui rende en impôts, et PAS LE CONTRAIRE (30 mai 2014)

https://​www​.chouard​.org/​2​0​1​4​/​0​5​/​3​0​/​c​h​a​r​t​a​l​i​s​m​e​-​l​e​s​-​p​e​u​p​l​e​s​-​c​r​e​v​e​n​t​-​p​a​r​-​m​a​n​q​u​e​-​d​a​r​g​e​n​t​-​c​e​s​t​-​l​e​t​a​t​-​q​u​i​-​d​o​i​t​-​c​r​e​e​r​-​l​a​r​g​e​n​t​-​a​v​a​n​t​-​q​u​o​n​-​l​e​-​l​u​i​-​r​e​n​d​e​-​e​n​-​i​m​p​o​t​s​-​e​t​-​p​a​s​-​l​e​-​c​o​n​t​r​a​i​re/

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• Révolution monétaire – Débat avec Stéphane Laborde et Jean-Baptiste Bersac : les perspectives d’émancipation politique offertes par le chartalisme et par la théorie relative de la monnaie (TRM) (25 sept 2014)

https://​www​.chouard​.org/​2​0​1​4​/​0​9​/​2​5​/​r​e​v​o​l​u​t​i​o​n​-​m​o​n​e​t​a​i​r​e​-​d​e​b​a​t​-​a​v​e​c​-​s​t​e​p​h​a​n​e​-​l​a​b​o​r​d​e​-​e​t​-​j​e​a​n​-​b​a​p​t​i​s​t​e​-​b​e​r​s​a​c​-​l​e​s​-​p​e​r​s​p​e​c​t​i​v​e​s​-​d​e​m​a​n​c​i​p​a​t​i​o​n​-​p​o​l​i​t​i​q​u​e​-​o​f​f​e​r​t​e​s​-​p​a​r​-​l​e​-​c​h​a​r​t​a​l​i​s​m​e​-​e​t​-​p​a​r​-​l​a​-​t​h​e​o​r​i​e​-​r​e​l​a​t​i​v​e​-​d​e​-​l​a​-​m​o​n​n​a​i​e​-​t​rm/

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• ÉPOUVANTAILS (PRÉTENDUE MENACE D’HYPERINFLATION) OU REFLATION (RETOUR VOLONTAIRE À L’INFLATION) ? RELANCER LA DEMANDE AVEC DE L’HELICOPTER MONEY. VITE !

https://​www​.chouard​.org/​2​0​1​4​/​1​0​/​1​2​/​e​p​o​u​v​a​n​t​a​i​l​s​-​o​u​-​r​e​f​l​a​t​i​o​n​-​r​e​l​a​n​c​e​r​-​l​a​-​d​e​m​a​n​d​e​-​a​v​e​c​-​d​e​-​l​h​e​l​i​c​o​p​t​e​r​-​m​o​n​e​y​-​v​i​te/

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À pro­pos des gou­ver­ne­ments qui ne font « rien » (rien pour nous mais tout pour les banques), NE RATEZ PAS ÇA : 

Histoire détaillée d’un odieux complot, celui de la dérégulation financière : INSIDE JOB, enquête essentielle pour comprendre la prochaine « crise » et l’énorme trahison des « élites »

https://​www​.chouard​.org/​2​0​1​6​/​0​2​/​2​0​/​h​i​s​t​o​i​r​e​-​d​e​t​a​i​l​l​e​e​-​d​u​n​-​o​d​i​e​u​x​-​c​o​m​p​l​o​t​-​c​e​l​u​i​-​d​e​-​l​a​-​d​e​r​e​g​u​l​a​t​i​o​n​-​f​i​n​a​n​c​i​e​r​e​-​i​n​s​i​d​e​-​j​o​b​-​e​n​q​u​e​t​e​-​e​s​s​e​n​t​i​e​l​l​e​-​p​o​u​r​-​c​o​m​p​r​e​n​d​r​e​-​l​a​-​p​r​o​c​h​a​i​n​e​-​c​r​i​se/


Fil Face­book cor­res­pon­dant à ce billet :
https://​www​.face​book​.com/​e​t​i​e​n​n​e​.​c​h​o​u​a​r​d​/​p​o​s​t​s​/​1​0​1​5​5​0​5​0​3​4​0​2​7​7​317

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Étienne

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8 Commentaires

  1. Merome

    Cher Étienne et autres lec­teurs des com­men­taires de ce blog, je porte à votre connais­sance l’ou­ver­ture de la cam­pagne de finan­ce­ment par­ti­ci­pa­tif inti­tu­lée « Voter ne suf­fit pas ».

    J’en avais déjà par­lé ici-même en novembre der­nier, mais cette fois, ça y est, c’est lancé.

    Il s’a­git de récol­ter des fonds pour finan­cer une cam­pagne de publi­ci­té géante sur le thème « Nous ne sommes pas en démo­cra­tie ». L’i­dée étant de tou­cher un autre public que les inter­nautes déjà rom­pus à toutes ces questions.

    Ça se passe ici : 

    Voter ne suffit pas

    par Les Amis de l’Émancipation sociale

    https://​www​.hel​loas​so​.com/​a​s​s​o​c​i​a​t​i​o​n​s​/​l​e​s​-​a​m​i​s​-​d​e​-​l​-​e​m​a​n​c​i​p​a​t​i​o​n​-​s​o​c​i​a​l​e​/​c​o​l​l​e​c​t​e​s​/​c​e​c​i​-​n​-​e​s​t​-​p​a​s​-​u​n​e​-​d​e​m​o​c​r​a​tie

    À votre bon cœur !

    Réponse
  2. etienne

    Je viens de rece­voir le livre de JM NAu­dot => je vous ai scan­né et OCRisé/corrigé la table des matières 🙂

    J’ai mis tout ça dans le billet ci-dessus.

    Ça a l’air bien intéressant.

    C’est Jacques Géné­reux qui est le res­pon­sable de col­lec­tion => le livre est sûre­ment très bon 🙂

    Réponse
  3. Chalier Jean-Pierre

    Les mesures pré­co­ni­sées cherchent à amé­lio­rer le sys­tème mais ne touchent pas à son coeur et risquent d’être insuf­fi­santes. Le coeur, c’est la créa­tion moné­taire sous forme de dettes par des banques cen­trales hors contrôle démo­cra­tique : une créa­tion moné­taire exclu­si­ve­ment sous contrôle démo­cra­tique per­met­trait non seule­ment des prêts à taux zéro mais aus­si le paie­ment de tous ceux qui tra­vaillent pour la col­lec­ti­vi­té. Les impôts n’in­ter­vien­draient que pour redis­tri­buer l’argent des plus riches vers les plus pauvres. Voir : http://​demo​cra​tie​-sociale​.fr/​2​0​1​7​/​l​a​-​r​e​v​o​l​u​t​i​o​n​-​m​o​n​e​t​a​i​re/

    Réponse
  4. etienne

    Sta­nis­las Jour­dan vient de publier une bonne tri­bune dans L’Obs :

    Pourquoi la BCE devrait verser de l’argent directement aux citoyens

    TRIBUNE. Pourquoi la BCE devrait verser de l’argent directement aux citoyensEt si, pour faire repartir l’économie, la BCE distribuait de l’argent directement aux citoyens plutôt que d’injecter des milliards d’euros dans les marchés ? (Russ Rohde/Cultura Creative/AFP)

    En uti­li­sant la « mon­naie héli­co­ptère », la BCE pour­rait relan­cer l’é­co­no­mie plus effi­ca­ce­ment tout en injec­tant bien moins de mon­naie qu’a­vec sa poli­tique actuelle d’assouplissement quan­ti­ta­tif. Et elle ferait ain­si taire de nom­breuses cri­tiques de l’u­nion monétaire.

    « Depuis deux ans la Banque cen­trale euro­péenne (BCE) a injec­té pas moins de 1.750 mil­liards d’eu­ros dans les mar­chés finan­ciers de la zone euro avec son pro­gramme de quan­ti­ta­tive easing (QE). Cet argent est uti­li­sé par la BCE pour rache­ter des actifs finan­ciers, y com­pris des dettes des mul­ti­na­tio­nales euro­péennes les plus pol­luantes. La BCE estime à 1,3% la crois­sance sup­plé­men­taire cau­sée par son pro­gramme, alors même qu’il repré­sente près de 20% du PIB de la zone euro. Un ren­de­ment très faible !

    La poli­tique de la BCE échoue car la créa­tion de liqui­di­tés est inutile si les banques pri­vées ne font pas leur tra­vail de trans­mis­sion de la poli­tique moné­taire en octroyant plus de cré­dits. Il est vrai que sous l’im­pul­sion de la BCE, les banques ont lar­ge­ment réduit les taux d’in­té­rêt et ont assou­pli les condi­tions d’ac­cès au cré­dit. Mais cela est vain s’il n’y a pas en face des entre­prises ou des ménages dési­reux de s’en­det­ter. Et c’est bien là tout le pro­blème : l’oc­ca­sion ne fait pas le lar­ron quand les pers­pec­tives de crois­sance sont atones et que l’é­co­no­mie est déjà surendettée.

    Le Quan­ti­ta­tive easing expli­qué à un enfant de 5 ans. Bon, OK, 12 ans

    Mais il y a pire. Conju­gué à sa poli­tique de taux d’in­té­rêts néga­tifs, le QE de la BCE fausse le fonc­tion­ne­ment du mar­ché des capi­taux. Par exemple, les assu­rances et les fonds de pen­sion font face à une crise exis­ten­tielle en l’ab­sence d’ac­tifs sûrs et ren­tables leur per­met­tant de garan­tir les ren­de­ments futurs pro­mis à leurs clients. Cette dis­tor­sion du rôle du taux d’in­té­rêt conduit à créer des inci­ta­tions contre-pro­duc­tives pour les inves­tis­seurs abou­tis­sant à une mau­vaise allo­ca­tion des capi­taux, une sur-éva­lua­tion de cer­tains actifs, comme le dénonce par exemple l’an­cien membre du direc­toire de la BCE Jür­gen Stark ou, en France, l’ancien régu­la­teur à l’Au­to­ri­té des mar­chés finan­ciers Jean-Michel Naulot.

    Et si la planche à billets ces­sait de nour­rir les marchés ?

    Mais gar­dons-nous de jeter le bébé avec l’eau du bain. Lais­ser aux seuls gou­ver­ne­ments la tâche de relan­cer la crois­sance grâce à la poli­tique bud­gé­taire et autres réformes n’est pas une approche suf­fi­sante. L’ex­pé­rience de ces der­nières années l’a démon­tré : les réformes struc­tu­relles sont défla­tion­nistes et conduisent à des situa­tions poli­ti­que­ment très hasardeuses.

    Les éco­no­mies de la zone euro ont bel et bien besoin d’un coup de pouce de la poli­tique moné­taire. Mais il est temps d’ap­prendre des leçons de trois années de poli­tique moné­taire ultra-accom­mo­dante et d’es­sayer de nou­velles approches pour s’at­ta­quer au pro­blème fon­da­men­tal : le manque de demande.

    Com­ment rendre la zone euro enfin effi­cace ? Voi­ci huit propositions

    Moins d’injections, un meilleur fléchage

    Une idée fait son che­min en Europe : le « Quan­ti­ta­tive easing for people » ou « mon­naie héli­co­ptère » : il s’a­git de créer de la mon­naie en l’in­jec­tant direc­te­ment sur les comptes ban­caires des citoyens. Bien qu’i­né­dite, une telle poli­tique a beau­coup plus de chances de rem­plir les objec­tifs de la BCE tout en créant moins d’ef­fets pervers.

    Ima­gi­nez : au lieu d’in­jec­ter 1.750 mil­liards d’eu­ros dans les mar­chés, la BCE aurait pu créer trois fois moins de mon­naie et dis­tri­buer à la place 200 euros par mois à chaque citoyen adulte pen­dant un an. A mesure que les gens dépen­se­raient cet argent, cela sti­mu­le­rait à la fois la crois­sance mais aus­si les recettes de TVA des gou­ver­ne­ments. Ceux qui ont des emprunts peuvent choi­sir de les rem­bour­ser plus vite, et pour­ront donc aug­men­ter leur consom­ma­tion future plus rapi­de­ment. Selon une ana­lyse de la banque néer­lan­daise ING, une telle mesure serait sus­cep­tible d’aug­men­ter le PIB d’en­vi­ron 2%, soit lar­ge­ment plus que le QE actuel.

    Et si la banque cen­trale balan­çait des billets par héli­co­ptère ? Pas si farfelu

    La mesure est certes spec­ta­cu­laire, mais n’a pour­tant rien d’une nou­veau­té sur le plan éco­no­mique. Au final, l’ef­fet recher­ché est très proche d’une relance bud­gé­taire key­né­sienne. La véri­table inno­va­tion est ins­ti­tu­tion­nelle. Il s’a­git de confier à la BCE les outils dont elle a réel­le­ment besoin pour contrô­ler la masse moné­taire et parer aux risques défla­tion­nistes, sans pour autant mar­cher sur les plates-bandes de la poli­tique budgétaire.

    Mais est-ce légal ? Étran­ge­ment oui : l’i­dée est tel­le­ment inha­bi­tuelle chez les finan­ciers qu’ils n’ont même pas pen­sé à l’in­ter­dire. Mario Dra­ghi lui-même le recon­nais­sait à demi-mot dans une lettre adres­sée à un par­le­men­taire euro­péen en décembre dernier.

    Viabilité politique

    Si la créa­tion moné­taire de la BCE est tech­ni­que­ment illi­mi­tée, elle ne peut s’af­fran­chir d’un cadre ins­ti­tu­tion­nel robuste pour que cette pro­po­si­tion soit poli­ti­que­ment viable. Il revien­drait à la BCE de four­nir un cadre ins­ti­tu­tion­nel à cette mesure, mais on peut déjà envi­sa­ger ces deux prin­cipes de bon sens :

    • Pre­miè­re­ment, il doit reve­nir à la BCE de gérer la pla­ni­fi­ca­tion et la mise en œuvre d’un tel pro­gramme en toute indé­pen­dance, sans inter­fé­rence des États membres ou des ins­ti­tu­tions européennes.
    • Deuxiè­me­ment, la BCE devrait annon­cer des règles lisibles d’ac­ti­va­tion de cette poli­tique. Par exemple en expli­quant qu’un tel pro­gramme ne serait acti­vé que lorsque l’in­fla­tion de base (hors prix de l’éner­gie) est infé­rieure à 1% conju­guée à une crois­sance en-des­sous d’un cer­tain seuil éga­le­ment. Cette règle per­met­trait d’é­vi­ter de lais­ser entendre à la popu­la­tion que l’argent gra­tuit cou­le­ra à flot en toutes circonstances.

    Dis­tri­buer direc­te­ment de l’argent aux citoyens ? La BCE y réfléchit

    Actuel­le­ment, l’in­fla­tion remonte en zone euro à un niveau proche de l’ob­jec­tif de 2% de la BCE. Mais cette remon­tée est essen­tiel­le­ment due à la hausse des prix de l’éner­gie, fac­teur sur lequel la BCE n’a aucun contrôle. Cela ne signale donc pas un quel­conque suc­cès de la poli­tique moné­taire de la BCE ni une relance de l’ac­ti­vi­té éco­no­mique. Au contraire, cette infla­tion impor­tée va de nou­veau heur­ter le pou­voir d’a­chat des ménages, et donc dimi­nuer à terme la consom­ma­tion. Un son­dage montre même que seule­ment 14% des Euro­péens seraient oppo­sésà cette idée (contre 54% en faveur). La mesure fonc­tion­ne­rait, elle est légale, et ferait un grand bien au sens com­mun européen.

    Ange­la Mer­kel cri­tique l’eu­ro, mais qu’at­tend-elle pour le réparer ?

    Qu’at­tend la BCE ? Natu­rel­le­ment, les ban­quiers cen­traux craignent qu’un tel trans­fert d’argent à la popu­la­tion dépasse le cadre de leur man­dat. Il est donc éga­le­ment du res­sort des citoyens et de leurs repré­sen­tants de lan­cer un signal à la BCE pour réaf­fir­mer leur confiance dans la légi­ti­mi­té de la BCE afin de mettre en œuvre de nou­veaux ins­tru­ments de poli­tique moné­taire. Par là même, les diri­geants euro­péens offri­raient un réponse forte à la mon­tée des appels à la sor­tie de l’euro. »

    Michel Cri­netz, ancien super­vi­seur financier
    Gilles Raveaud, Ins­ti­tut d’é­tudes euro­péennes, uni­ver­si­té Paris 8 – Saint-Denis
    Ber­nard Bar­tha­lay, éco­no­miste et pré­sident de Puis­sance Europe
    Sta­nis­las Jour­dan, coor­di­na­teur de la cam­pagne « Quan­ti­ta­tive easing for People »

    Source : L’Obs, http://​temps​reel​.nou​ve​lobs​.com/​l​e​-​l​a​b​o​/​2​0​1​7​0​3​2​2​.​O​B​S​6​9​6​5​/​t​r​i​b​u​n​e​-​p​o​u​r​q​u​o​i​-​l​a​-​b​c​e​-​d​e​v​r​a​i​t​-​v​e​r​s​e​r​-​d​e​-​l​-​a​r​g​e​n​t​-​d​i​r​e​c​t​e​m​e​n​t​-​a​u​x​-​c​i​t​o​y​e​n​s​.​h​tml

    Réponse
  5. jytou

    Cher Étienne,
    je vous suis depuis quelques temps déjà, et vous m’a­vez convain­cu que l’é­man­ci­pa­tion des peuples pas­se­ra par une consti­tu­tion écrite par eux-mêmes pour les pro­té­ger de ceux qui gou­vernent, ce qui serait une véri­table révo­lu­tion politique.

    Mais ceci va de pair avec la libé­ra­tion des peuples de la créa­tion moné­taire. C’est visible rien que par le fait que la mon­naie per­met ou non d’a­che­ter faci­le­ment des médias et donc d’in­fluer sur l’o­pi­nion publique… ce qui per­met actuel­le­ment que l’in­for­ma­tion de votre mes­sage soit « conte­nue » par des médias ache­tés. Vous le répé­tez sans cesse, pour faire gagner un can­di­dat aux pré­si­den­tielles, il suf­fit de par­ler de lui à la télé (on en a une preuve criante aujourd’­hui avec Macron). Ce n’est pas dif­fé­rent pour n’im­porte quelle autre opi­nion, dont celle sur la consti­tu­tion qui est immé­dia­te­ment qua­li­fiée dans les médias de popu­liste au mieux, et far­fe­lue au pire his­toire de bien convaincre M. et Mme Michu que c’est une inutile perte de temps de s’y intéresser.

    Tout comme les hommes de pou­voir écrivent les règles du pou­voir en leur faveur, les mêmes hommes de pou­voir émettent la mon­naie de telle manière que cette émis­sion leur soit favo­rable (dans l’es­pace et dans le temps). Il n’y a qu’à voir com­ment la BCE joue avec les mar­chés depuis quelques temps déjà et par­ti­cu­liè­re­ment depuis 2 ans. Mais cela, M. et Mme Michu ne le savent même pas, et même s’ils le savaient, ils n’en com­pren­draient pas les impli­ca­tions sans qu’on le leur explique sim­ple­ment et en boucle à la télé. Le pou­voir des peuples est donc tota­le­ment asy­mé­trique en terme poli­tique grâce à la consti­tu­tion qui pro­tège les élus au lieu du peuple ain­si qu’en terme moné­taire grâce à la créa­tion de la mon­naie par des acteurs privilégiés.

    Alors tout comme le peuple doit écrire les règles du pou­voir pour rendre le pou­voir symé­trique (pou­voir des tirés au sort de « faire » ce qu’il faut pour faire tour­ner le pays, et pou­voir du peuple sur ces tirés au sort, il y a réci­pro­ci­té, symé­trie), il doit aus­si se libé­rer du joug de la créa­tion moné­taire asy­mé­trique, et j’ai bien peur que ces titres émis par les états ne soient qu’un « patch » sur un sys­tème qui est vicié à la racine, par le simple fait que cer­tains pri­vi­lé­giés contrôlent tou­jours l’é­mis­sion moné­taire (on rem­place la BCE par l’é­tat, ça ne change fon­da­men­ta­le­ment pas grand-chose tant qu’on n’est pas en démo­cra­tie, M. et Mme Michu sont tou­jours à la traîne). C’est certes légè­re­ment moins injuste que le sys­tème actuel, mais pour ma part, j’en ai pris mon par­ti, rajou­ter des patchs sur le sys­tème ne fait que retar­der la prise de conscience col­lec­tive de la per­ver­si­té du sys­tème. Je pense que c’est la rai­son pour laquelle énor­mé­ment de pro­po­si­tions de « chan­ge­ments » deviennent popu­laires ces der­niers temps, telles que le reve­nu de base par exemple. Les oli­garques ont com­pris que les peuples com­mencent à mettre à nu les failles du sys­tème, ils lâchent donc un peu de lest avant que tout cela ne s’embrase, et chaque patch rajou­té per­met de gagner du temps, sans chan­ger ce qui compte fon­da­men­ta­le­ment. Car chaque « amé­lio­ra­tion » retarde la prise de conscience col­lec­tive des pro­blèmes réels, sans chan­ger radi­ca­le­ment le sys­tème. La Suisse n’est plus la garante du secret ban­caire qu’elle était parce qu’elle était deve­nue trop visible, elle a donc été sacri­fiée (au moins en par­tie), main­te­nant on cache tout cela aux Caï­mans et ailleurs, mais les pro­cé­dés res­tent les mêmes.

    J’ai décou­vert grâce à l’un de vos mumbles la mon­naie libre de Sté­phane Laborde, et il me semble qu’elle convient par­fai­te­ment à l’é­man­ci­pa­tion moné­taire des peuples, tout comme le « plan C » convient à leur éman­ci­pa­tion poli­tique. Et de mon point de vue, l’une aura du mal à réus­sir sans l’autre : la consti­tu­tion par le peuple seule se fera bouf­fer toute crue en terme d’o­pi­nion par les médias au ser­vice des oli­garques par la mon­naie qui per­met les trust média­tiques, et la mon­naie libre seule se fera écra­ser par le pou­voir et la jus­tice au ser­vice des mêmes oli­garques par la consti­tu­tion qui per­met la cor­rup­tion des élus. Ce n’est qu’en déblo­quant les deux ver­rous qu’on pour­ra faire sau­ter le système.

    Réponse
  6. etienne

    La disparition des espèces ou la lutte des banquiers contre les libertés publiques

    valerie_bugault

    Par Valé­rie Bugault et Jean Rémy – Le 17 mars 2017


    Source : le Saker fran­co­phone, http://​lesa​ker​fran​co​phone​.fr/​l​a​-​d​i​s​p​a​r​i​t​i​o​n​-​d​e​s​-​e​s​p​e​c​e​s​-​o​u​-​l​a​-​l​u​t​t​e​-​d​e​s​-​b​a​n​q​u​i​e​r​s​-​c​o​n​t​r​e​-​l​e​s​-​l​i​b​e​r​t​e​s​-​p​u​b​l​i​q​ues

    1. La lutte contre le terrorisme, argument fallacieux pour faire disparaître les espèces

    Un récent docu­ment de la Com­mis­sion euro­péenne pro­pose d’unifier au niveau euro­péen la légis­la­tion ten­dant à réduire, puis sup­pri­mer les pos­si­bi­li­tés de paie­ment en espèces. Cette pro­po­si­tion éma­nant de la Com­mis­sion euro­péenne est parée des bonnes inten­tions de la lutte contre le blan­chi­ment d’argent et, par voie de consé­quence, contre le finan­ce­ment du ter­ro­risme. Nous allons voir que la jus­ti­fi­ca­tion annon­cée est par­fai­te­ment fal­la­cieuse et cache d’autres inten­tions, beau­coup moins avouables, des prin­ci­paux pro­prié­taires de capi­taux. Cette ana­lyse fait écho à celle, plus géné­rale, que nous avions faites des entre­prises ban­caires.

    2. Contexte dans lequel la proposition de la Commission européenne s’inscrit

    Ce texte est une copie qua­si conforme des régle­men­ta­tions coer­ci­tives issues du Patriot Act de Georges Bush, qui ont don­né le signal d’une impor­tante réduc­tion des liber­tés publiques, plus pré­ci­sé­ment des liber­tés fon­da­men­tales, pour les citoyens amé­ri­cains. La décli­nai­son euro­péenne du Patriot Act s’est faite pro­gres­si­ve­ment depuis le 11 sep­tembre 2001. Les banques amé­ri­caines et euro­péennes ont ain­si été ame­nées à recru­ter des cohortes de nou­veaux employés dotés de pou­voirs exor­bi­tants : ils sont char­gés, au sein de nou­veaux dépar­te­ments appe­lés « contrôle per­ma­nent » et « confor­mi­té« , de pro­fi­ler les clients et leurs opé­ra­tions afin de les contrô­ler au moyen de sys­tèmes infor­ma­tiques experts. Ce nou­veau type de per­son­nel, impro­duc­tif (« bull­shit job » dénon­cé par Jean-Fran­çois Zobrist, pré­cur­seur de « l’entreprise libé­rée »), a été char­gé de mis­sions de déla­tion et de contrôle des per­sonnes ; il s’élève, rien qu’en France, à plu­sieurs dizaines de mil­liers de per­sonnes, soit envi­ron un tiers des effec­tifs de la gen­dar­me­rie nationale !

    Pour cou­ron­ner le tout, la « fonc­tion confor­mi­té » (Com­pliance func­tions) a été ins­ti­tuée en France en 2012. Son rôle est de veiller à réduire au maxi­mum les risques de non-confor­mi­té, c’est-à-dire les risques de sanc­tions encou­rues pour non-res­pect de dis­po­si­tions propres aux acti­vi­tés finan­cières et ban­caires, en matière légis­la­tive ou régle­men­taire (fis­ca­li­té incluse). Il s’agit notam­ment de mettre la pres­sion pour que le contrôle per­ma­nent des per­sonnes soit irré­pro­chable et effi­cace dans tous les établissements.

    La France est par­mi les pays d’Europe et du monde les plus impli­qués dans les régle­men­ta­tions ban­caires coer­ci­tives, mais rap­pe­lons qu’en Europe, au-delà de l’échelon natio­nal, se trouvent les ins­ti­tu­tions de l’Union Euro­péenne. Il faut ici rap­pe­ler ce qui est trop peu sou­vent expli­qué au public : à savoir que les ins­ti­tu­tions euro­péennes orga­nisent, via les Trai­tés euro­péens (TUE et TFUE issus du Trai­té de Lis­bonne, ver­sion à peine édul­co­rée de la Consti­tu­tion euro­péenne reje­tée par le peuple fran­çais), la sou­ve­rai­ne­té com­mer­ciale des mul­ti­na­tio­nales ; au tra­vers de cette sou­ve­rai­ne­té com­mer­ciale, il s’agit en réa­li­té de la sou­ve­rai­ne­té des prin­ci­paux déten­teurs de capi­taux, au pre­mier rang des­quels se trouvent jus­te­ment les prin­ci­paux pro­prié­taires des grandes banques sys­té­miques. Les Trai­tés euro­péens, bâtis autour de la ques­tion du com­merce, uti­lisent le terme de « Par­le­ment » de façon fal­la­cieuse, pour lais­ser entendre aux res­sor­tis­sants euro­péens que ces ins­ti­tu­tions sont, comme les anciennes ins­ti­tu­tions natio­nales, orga­ni­sées autour du prin­cipe de démo­cra­tie repré­sen­ta­tive. Or, il n’en est rien. D’une part, le pré­ten­du Par­le­ment euro­péen n’a aucune légi­ti­mi­té poli­tique, puisqu’il ne repré­sente aucun peuple homo­gène doté d’une même his­toire poli­tique, d’une même culture sociale, d’une même langue et, plus géné­ra­le­ment d’un même mode de vie. D’autre part, ce Parle-ment ne dis­pose pas de l’initiative des lois, qui appar­tient exclu­si­ve­ment à la Com­mis­sion. Par ailleurs, les ins­ti­tu­tions qui ont le plus de poids dans la créa­tion des « lois » euro­péennes (droit déri­vé) sont incon­tes­ta­ble­ment les lob­bies, avec une moyenne de trente lob­byistes par « déci­deur » (par­le­men­taires, com­mis­saires) ; chaque immeuble, dans un rayon d’un kilo­mètre autour de la Com­mis­sion, du Conseil et du Parle-ment euro­péen est occu­pé par les « grands noms du monde des affaires ».

    3. L’argument de la distorsion de compétitivité développé par le texte va dans le sens d’un renforcement du fédéralisme et donc dans celui de la disparition du concept d’État

    La pro­po­si­tion de la Com­mis­sion argue du fait qu’une légis­la­tion res­tric­tive des paie­ments en espèces existe d’ores et déjà dans cer­tains États membres et que son absence dans d’autres États induit une dis­tor­sion de concur­rence sur le mar­ché inté­rieur ; il est ain­si impli­ci­te­ment sug­gé­ré que cette situa­tion génère, à l’intérieur de l’Union euro­péenne, un espace de non droit dans lequel vont s’engouffrer les indi­vi­dus cher­chant à blan­chir de l’argent, notam­ment à des fins de finan­ce­ment de terrorisme.

    Le docu­ment pré­cise que les légis­la­tions exis­tantes res­tric­tives des paie­ments en espèces sont com­pa­tibles avec la loi de l’Union. Une telle pré­ci­sion relève de la tau­to­lo­gie, si l’on veut bien consi­dé­rer que de telles légis­la­tions ont pour rôle et fonc­tion essen­tiels de ren­for­cer le pou­voir des banques… Il serait plus juste de dire et d’écrire que ces légis­la­tions sont émi­nem­ment sou­hai­tées par les ins­tances euro­péennes, les­quelles sont sous le contrôle des prin­ci­paux pro­prié­taires de capitaux.

    Il faut ici rap­pe­ler plu­sieurs choses. La pre­mière est que la liber­té de cir­cu­la­tion des capi­taux est orga­ni­sée et pro­té­gée par l’article 63 du TFUE (Trai­té sur le fonc­tion­ne­ment de l’Union euro­péenne), non seule­ment à l’intérieur des fron­tières de l’Union, c’est-à-dire dans les pays membres, mais encore dans le monde entier. La seconde pré­ci­sion à appor­ter est que seules les mul­ti­na­tio­nales et les orga­ni­sa­tions implan­tées sur dif­fé­rents États peuvent jouer de ces dif­fé­rentes légis­la­tions. Les simples par­ti­cu­liers ne sont pas concer­nés par cette course à la moins-disance juri­dique et régle­men­taire, com­prise comme « une dis­tor­sion de concur­rence » par la Com­mis­sion euro­péenne (laquelle révèle par là même où sont ses centres de pré­oc­cu­pa­tions) ; ce sont pour­tant eux qui sup­por­te­ront le poids de la dis­pa­ri­tion des espèces et de leur auto­no­mie juri­dique et sociale. Le par­ti­cu­lier lamb­da sera le seul réel per­dant de cette légis­la­tion har­mo­ni­sée ten­dant à la sup­pres­sion des espèces car il devien­dra, pour le dérou­le­ment de sa vie quo­ti­dienne, tota­le­ment dépen­dant des banques.

    Ain­si, peu à peu, confor­mé­ment à la poli­tique des petits pas sui­vie depuis tou­jours dans la construc­tion euro­péenne, les banques tendent à se sub­sti­tuer aux États. Les par­ti­cu­liers ne dépen­dront plus, dans leur vie quo­ti­dienne, de la légis­la­tion de leur État mais du bon vou­loir de leur banque. Inutile de pré­ci­ser toutes les garan­ties, en termes de jus­tice et liber­té (foin de l’organisation poli­tique, foin de la sépa­ra­tion des pou­voirs, foin de la recon­nais­sance juri­dique et social des res­sor­tis­sants des anciens États), qui seront per­dues par les par­ti­cu­liers ; la liber­té devient le dom­mage col­la­té­ral essen­tiel de la trans­la­tion du pou­voir de l’État vers les banques.

    En conclu­sion, les orga­ni­sa­tions et indi­vi­dus qui pro­tègent juri­di­que­ment la liber­té mon­diale des capi­taux (article 63 du TFUE, OMC, OCDE…), sont éga­le­ment ceux qui apportent une solu­tion « sur mesure », dans l’intérêt des prin­ci­paux pro­prié­taires de capi­taux, au pro­blème induit de la mul­ti­pli­ca­tion des pos­si­bi­li­tés de blan­chi­ment d’argent.

    L’argument des dis­tor­sions de com­pé­ti­ti­vi­té – induit par l’hétérogénéité des légis­la­tions des États membres sur les res­tric­tions aux paie­ments en espèces – sur le mar­ché euro­péen, c’est-à-dire par­mi les États membres (cf. p. 2 du docu­ment) est en réa­li­té un simple pré­texte pour ren­for­cer le fédé­ra­lisme euro­péen et dimi­nuer les liber­tés publiques. Étant pré­ci­sé que le fédé­ra­lisme euro­péen n’est pas au ser­vice des peuples, mais au ser­vice des ini­tia­teurs de la construc­tion euro­péenne, c’est-à-dire, depuis tou­jours, au ser­vice des plus grands pro­prié­taires de capitaux.

    4. Les institutions européennes, au premier rang desquelles se trouvent la Commission européenne, sont une simple courroie de transmission des intérêts bancaires supérieurs

    La sup­pres­sion des espèces revient à pri­va­ti­ser la tota­li­té de la mon­naie et à sup­pri­mer les der­niers ves­tiges d’une mon­naie enten­due comme ins­ti­tu­tion d’État, c’est-à-dire comme un ser­vice ren­du par l’État à ses res­sor­tis­sants ; alors même que la rai­son d’être de la mon­naie est fon­da­men­ta­le­ment un ser­vice ren­du par l’État afin de faci­li­ter les échanges. Autre­ment dit, alors que la mon­naie est, de façon fon­da­men­tale, un ser­vice public de l’État, ce ser­vice a été aujourd’hui qua­si-tota­le­ment pri­va­ti­sé par quelques per­sonnes, qui se sont arro­gé le droit de battre mon­naie envers et contre les États et leurs ressortissants.

    Réduire et inter­dire l’usage des espèces est en réa­li­té l’ultime étape de l’accaparement de l’institution moné­taire par des inté­rêts pri­vés. Cet acca­pa­re­ment se cache, comme tou­jours, der­rières les argu­ments fal­la­cieux de sécu­ri­té publique et de jus­tice fis­cale. Jus­tice fis­cale, dont la dis­pa­ri­tion est déli­bé­ré­ment et savam­ment orches­trée par ces mêmes inté­rêts, via l’organisation et la ges­tion non seule­ment de la liber­té mon­diale de cir­cu­la­tion des capi­taux, mais aus­si et sur­tout des para­dis fis­caux, qui sont le corol­laire ins­ti­tu­tion­nel indis­pen­sable à la liber­té mon­diale de cir­cu­la­tion des capitaux.

    Via le contrôle total des mon­naies en cir­cu­la­tion, les prin­ci­pales banques de la pla­nète orga­nisent l’accaparement des biens maté­riels tan­gibles mais s’arrogent éga­le­ment, via tout un tas d’institutions – natio­nales (banques cen­trales), inter­na­tio­nales (OMC, FMI, Banque mon­diale, BRI, OCDE…) et supra-natio­nales (Banque cen­trale euro­péenne, Union euro­péenne…) – l’intégralité du pou­voir politique.

    Au bout de cette logique d’asservissement, les indi­vi­dus ne seront plus jus­ti­ciables d’États, enten­dus au sens poli­tique du terme, c’est-à-dire dans son accep­tion d’organisation de la vie en socié­té dans un objec­tif de paci­fi­ca­tion, mais des banques qui se seront arro­gées de façon ins­ti­tu­tion­nelle le droit de vie et mort, tant au niveau social qu’au niveau bio­lo­gique, sur les indi­vi­dus. Une façon simple de mesu­rer ce phé­no­mène est de consi­dé­rer le suc­cès des sys­tèmes de sub­sti­tu­tion pour des ser­vices mini­mum de paie­ments pré­payés, comme le compte Nickel, qui peut être ouvert dans cer­tains bureaux de tabac en cinq minutes.

    5. L’entretien volontaire d’une confusion entre l’anonymat du paiement en espèces et l’anonymat des détenteurs de capitaux

    D’un point de vue tech­nique, la trans­pa­rence reven­di­quée (cf. p. 3 du docu­ment) dans l’interdiction du paie­ment des espèces est en réa­li­té la trans­pa­rence totale des par­ti­cu­liers vis-à-vis de leur banque, elle n’est pas celle des para­dis fis­caux dans les­quels tran­sitent les véri­tables finan­ce­ments d’activités terroristes.
    Dans le contexte actuel, il est en effet logique et facile de ne consi­dé­rer que la seule appa­rence, selon laquelle les paie­ments en espèces pour des mon­tants exa­gé­rés sont des moyens faciles de blan­chi­ment d’argent sale. Néan­moins, il ne faut pas perdre de vue l’essentiel : de tels blan­chi­ments ne peuvent exis­ter que parce qu’existent, en amont, la liber­té de cir­cu­la­tion des capi­taux et son corol­laire que sont les para­dis fis­caux, refuges inal­té­rables des pro­fits résul­tants de tous les tra­fics illi­cites. Or, ces para­dis fis­caux n’existent que par la volon­té des prin­ci­paux déten­teurs de capi­taux, via les grandes banques sys­té­miques et les grands cabi­nets d’audit ; ce sont les prin­ci­paux déten­teurs de capi­taux qui orga­nisent et gèrent les para­dis fiscaux.

    Il faut ici rap­pe­ler que la lutte contre les para­dis fis­caux n’est pas réel­le­ment menée par les« pou­voirs publics ».

    La pré­ten­due lutte contre le blan­chi­ment d’argent par les paie­ments en espèces est en réa­li­té une figure de style rhé­to­rique, des­ti­née à faire pas­ser des ves­sies pour des lan­ternes : il s’agit ici d’assimiler déli­bé­ré­ment le finan­ce­ment du ter­ro­risme avec l’anonymat du paie­ment en espèces par les par­ti­cu­liers. En réa­li­té, le paie­ment en espèces, aus­si impor­tant soit-il, n’est un pro­blème que parce qu’existent en amont les para­dis fis­caux qui reçoivent en toute indé­pen­dance les pro­fits résul­tant des pires tra­fics. En résu­mé, la néces­si­té de blan­chir l’argent dans de grandes pro­por­tions n’existe que parce que les para­dis fis­caux accueillent l’argent de tous les tra­fics illi­cites, que les banques qui y sont ins­tal­lées per­mettent de reti­rer par­tout dans le monde. Il n’y aurait aucune néces­si­té de blan­chi­ment en l’absence de reve­nus tirés des tra­fics illi­cites, les­quels sont entre­te­nus par l’existence des para­dis fiscaux.

    En d’autres termes : le blan­chi­ment n’existe que parce que l’argent sale existe, aujourd’hui dans des pro­por­tions tout à fait extra­va­gantes, grâce à l’organisation mon­diale de la liber­té de cir­cu­la­tion des capi­taux et des para­dis fiscaux.
    Le ter­ro­risme finan­cier trouve en réa­li­té essen­tiel­le­ment sa source dans l’opacité des para­dis fis­caux et des chambres de com­pen­sa­tion, les­quels sont sous le contrôle capi­ta­lis­tique des prin­ci­paux pro­prié­taires de capi­taux, pas dans l’anonymat des paie­ments en espèces.

    En réa­li­té, la lutte contre le ter­ro­risme et l’évasion fis­cale per­met de justifier :

    1. le res­ser­re­ment de l’emprise des banques sur les indi­vi­dus, fai­sant échap­per ces der­niers à la juri­dic­tion de l’État, lui-même en voie de dis­pa­ri­tion rapide,
    2. la pro­gres­sion de l’idée fédé­rale en Europe, laquelle pro­gres­sion abou­ti­ra de façon méca­nique à la dis­pa­ri­tion de la sou­ve­rai­ne­té éta­tique et à la dis­pa­ri­tion du concept même d’État.

    La véri­table lutte contre le blan­chi­ment d’argent ne passe pas par la sup­pres­sion de l’argent liquide (qui serait illi­co rem­pla­cé par des espèces étran­gères, des dol­lars par exemple, qui ont une pari­té plus ou moins proche de l’euro) mais par la sup­pres­sion juri­dique de l’anonymat des capi­taux et par la dis­pa­ri­tion de la liber­té de cir­cu­la­tion des capi­taux (acté, au niveau mon­dial, par l’article 63 du Trai­té sur le Fonc­tion­ne­ment de l’Union euro­péenne), que l’OMC est char­gée de mettre en œuvre dans tous les pays du monde. Ces deux mesures sont, à elles seules, de nature à rendre obso­lète le concept de para­dis fis­cal qui ne serait dès lors plus un refuge pour tra­fics illi­cites. L’assèchement de l’argent sale géné­rant auto­ma­ti­que­ment l’assèchement d’argent à blanchir.

    Dans le contexte décrit, on peut aller plus loin et affir­mer que la lutte contre le finan­ce­ment du ter­ro­risme serait seule effi­ca­ce­ment réa­li­sée par un pou­voir poli­tique réno­vé, qui repren­drait le contrôle du fait moné­taire. Un pou­voir poli­tique réno­vé s’entend d’une rup­ture concep­tuelle de l’organisation sociale, dont le contrôle devrait être fait par les res­sor­tis­sants d’un État et non par les prin­ci­paux pro­prié­taires de capitaux.

    Valé­rie Bugault et Jean Rémy

    Valé­rie Bugault est Doc­teur en droit, ancienne avo­cate fis­ca­liste, ana­lyste de géo­po­li­tique juri­dique et économique.

    Jean Rémy est un spé­cia­liste des sys­tèmes d’information ban­caire, ancien ban­quier inter­na­tio­nal, il a créé il y a une tren­taine d’années la théo­rie struc­tu­rale de la mon­naie. Aujourd’hui en retraite, il est confé­ren­cier, et mili­tant pour une mora­li­sa­tion de la finance et de la banque.

    Source : le Saker fran­co­phone, http://​lesa​ker​fran​co​phone​.fr/​l​a​-​d​i​s​p​a​r​i​t​i​o​n​-​d​e​s​-​e​s​p​e​c​e​s​-​o​u​-​l​a​-​l​u​t​t​e​-​d​e​s​-​b​a​n​q​u​i​e​r​s​-​c​o​n​t​r​e​-​l​e​s​-​l​i​b​e​r​t​e​s​-​p​u​b​l​i​q​ues

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