Démocratie, c’est pas foutu : Un dossier spécial du (remarquable) journal « L’âge de faire » – #pasdedémocratiesanscitoyensconstituants

15/01/2017 | 34 commentaires

 

Démocratie, c’est pas foutu

Un dos­sier spé­cial du (remar­quable) jour­nal « L’âge de faire », qui y étu­die l’i­dée qui gran­dit des ate­liers consti­tuants populaires 🙂


http://​www​.lage​de​faire​-lejour​nal​.fr/​d​e​m​o​c​r​a​t​i​e​-​c​e​s​t​-​f​o​u​tu/

Com­man­der ce numé­ro ne coûte que 2 € (ils en ont évi­dem­ment besoin), et on peut s’a­bon­ner là : http://​maga​sin​.lage​de​faire​-lejour​nal​.fr/

#pas­de­dé­mo­cra­tie­sans­ci­toyens­cons­ti­tuants

http://wiki.gentilsvirus.org/index.php/Cat%C3%A9gorie:Atelier_constituant

—–

Et vous, vos propres ate­liers consti­tuants, ça avance ? 🙂
Don­nez-nous des nou­velles, s’il vous plaît 🙂

Bon cou­rage à tous
et res­tez bien concen­trés sur l’essentiel :
ce n’est pas aux hommes au pou­voir d’é­crire les règles du pouvoir.

Étienne.

Fil Face­book cor­res­pon­dant à ce billet :
https://​www​.face​book​.com/​e​t​i​e​n​n​e​.​c​h​o​u​a​r​d​/​p​o​s​t​s​/​1​0​1​5​4​8​8​0​1​5​1​0​3​2​317

Pour m'aider et m'encourager à continuer, il est désormais possible de faire un don.
Un grand merci aux donatrices et donateurs : par ce geste, vous permettez à de beaux projets de voir le jour, pour notre cause commune.
Étienne

Catégorie(s) de l'article :

34 Commentaires

  1. etienne

    Les citoyens déjà consti­tuants devraient se pro­cu­rer ce numé­ro, comme un ren­fort pour réveiller les endor­mis, non ? 🙂

    Réponse
  2. etienne

    « À peine sortis des massacres de la Commune, rappelons à ceux qui seraient tentés de l’oublier que la gauche versaillaise, non moins que la droite, a commandé le massacre de Paris, et que l’armée des massacreurs a reçu les félicitations des uns comme des autres. Versaillais de droite et Versaillais de gauche doivent être égaux devant la haine du peuple. »

    Manifeste des proscrits de la Commune, Londres, 1874.

    (Cité par Jean-Claude Michéa en exergue de son der­nier livre.)

    Réponse
  3. etienne

    « Le prin­ci­pal secret du gou­ver­ne­ment consiste à affai­blir l’es­prit public, au point de le dés­in­té­res­ser com­plè­te­ment des idées et des prin­cipes avec les­quels on fait aujourd’­hui les révo­lu­tions. Dans tous les temps, les peuples comme les hommes se sont payés de mots. Les appa­rences leur suf­fisent presque tou­jours ; ils n’en demandent pas plus. On peut donc éta­blir des ins­ti­tu­tions fac­tices qui répondent à un lan­gage et à des idées éga­le­ment fac­tices ; il faut avoir le talent de ravir aux par­tis cette phra­séo­lo­gie libé­rale, dont ils s’arment contre le gou­ver­ne­ment. Il faut en satu­rer les peuples jus­qu’à la las­si­tude, jus­qu’au dégoût. On parle sou­vent aujourd’­hui de la puis­sance de l’o­pi­nion, je vous mon­tre­rai qu’on lui fait expri­mer ce qu’on veut quand on connaît bien les res­sorts cachés du pou­voir. Mais avant de son­ger à la diri­ger, il faut l’é­tour­dir, la frap­per d’in­cer­ti­tude par d’é­ton­nantes contra­dic­tions, opé­rer sur elle d’in­ces­santes diver­sions, l’é­blouir par toutes sortes de mou­ve­ments divers, l’é­ga­rer insen­si­ble­ment dans ses voies. Un des grands secrets du jour est de savoir s’emparer des pré­ju­gés et des pas­sions popu­laires, de manière à intro­duire une confu­sion de prin­cipes qui rend toute entente impos­sible entre ceux qui parlent la même langue et ont les mêmes intérêts. »

    “Dia­logue aux enfers entre Machia­vel et Mon­tes­quieu” (Machia­vel parle ici par la plume de Mau­rice Joly, 1864)

    Ce livre est épa­tant ! À connaître absolument.


    http://​www​.edi​tions​-allia​.com/​f​r​/​l​i​v​r​e​/​1​6​2​/​d​i​a​l​o​g​u​e​-​a​u​x​-​e​n​f​e​r​s​-​e​n​t​r​e​-​m​a​c​h​i​a​v​e​l​-​e​t​-​m​o​n​t​e​s​q​u​ieu

    Édi­tions Allia

    Réponse
  4. etienne

    Jean-Claude Michéa : « La gauche se réclame de la philosophie des Lumières mais le capitalisme aussi »

    httpv://www.youtube.com/watch?v=aF_xOpsX2ps

    Réponse
    • Ronald

      On ne com­prend rien si on veut pla­quer les notions de « gauche » et « droite » sur le XVIIIè siécle. L’un des moteur du mou­ve­ment des Lumières a été le modèle anglais. A l’é­poque, la Grande-Bre­tagne était deve­nue la pre­mière puis­sance Euro­péenne, et l’on se deman­dait en France com­ment ne pas se lais­ser dis­tan­cer. Il sem­blait que son suc­cès était dû à la plus grande liber­té dont on y jouis­sait : plus de liber­té poli­tique avec le gou­ver­ne­ment repré­sen­ta­tif, et plus de liber­té éco­no­mique avec le capi­ta­lisme et la révo­lu­tion indus­trielle (la pre­mière manu­fac­ture date de 1721). Aus­si, en France, on était par­ti­san soit des réformes libé­rales, soit de l’ab­so­lu­tisme. Mais les deux mou­ve­ments – liber­té éco­no­mique et liber­té poli­tique – res­tent encore conjoints jus­qu’à la période 1789–1792.
      En 1792, la Répu­blique est pro­cla­mée, et va alors s’ins­tal­ler un schisme : une par­tie des révo­lu­tion­naires estime que les buts sont atteints en termes éco­no­miques et poli­tiques et que l’on peut en res­ter là. L’autre estime que seule une par­tie de la Révo­lu­tion est faite est qu’il faut aller plus loin dans les réformes démo­cra­tiques. Ce sera la divi­sion entre Giron­dins – libé­raux éco­no­mi­que­ment, mais qui seront désor­mais pour le sta­tus quo poli­tique – et Jaco­bins, sou­hai­tant étendre les liber­tés poli­tiques au plus grand nombre (en Angle­terre, l’é­qui­valent sera le débat Edmund Burke/Thomas Paine).
      Ain­si, l’on ne peut réel­le­ment par­ler de pro­to-gauche et pro­to-droite qu’à par­tir de 1792–93, mais toutes deux sont bien issues du mou­ve­ment de Lumières.

      Réponse
  5. etienne
  6. etienne

    Formidable Jean-Claude Michéa :
    « Ceux d’en bas apparaissent de moins en moins sensibles à l’alternance unique »

    LE COMPTOIR LE 24 février 2016

    Socia­liste liber­taire, com­mu­nau­ta­rien et décrois­sant, qui n’hésite pas à tacler la gauche ou la reli­gion du pro­grès, Jean-Claude Michéa n’est pas de ceux qui se laissent faci­le­ment enfer­mer dans une case. 

    Une ori­gi­na­li­té qui lui a valu de nom­breuses attaques de son propre camp – Fré­dé­ric Lor­don, Phi­lippe Cor­cuff, Serge Hali­mi, Luc Bol­tans­ki, Isa­belle Garo et Jean-Loup Amselle, pour ne citer que les plus connus. 

    Pour­tant, depuis plus de vingt ans, le Mont­pel­lié­rain s’échine à mener une cri­tique radi­cale et ori­gi­nale du libé­ra­lisme et à réha­bi­li­ter les classes popu­laires et leurs pra­tiques – comme le foot­ball –, igno­rées et mépri­sées par les poli­tiques de droite comme de gauche. 

    Nous devons en par­tie au phi­lo­sophe la popu­la­ri­sa­tion récente de l’écrivain George Orwell, ain­si que l’introduction en France de la pen­sée du socio­logue et his­to­rien amé­ri­cain Chris­to­pher Lasch. Notre admi­ra­tion pour ce « pen­seur vrai­ment cri­tique », comme le qua­li­fient les édi­tions L’Échappée, n’est un secret pour personne. 

    Voi­là pour­quoi nous avons sou­hai­té lui sou­mettre quelques ques­tions. Vu la den­si­té de ses réponses, nous avons déci­dé de les publier en deux fois. Dans cette pre­mière par­tie, Michéa cla­ri­fie ces ana­lyses du peuple et du libéralisme. […]

    Lire la suite :
    https://comptoir.org/2016/02/24/jean-claude-michea-ceux-den-bas-apparaissent-de-moins-en-moins-sensibles-a-lalternance-unique‑2/

    Réponse
  7. anne jordan

    Etienne, bon­jour et bonne année ! 

    Il y a un bon moment que je n’a­vais pas visi­té le blog, je le regrette, car il est plus riche que jamais ! Michéa sort de son – rela­tif – silence, c’est une bonne façon de com­men­cer l’année ! 

    Voi­ci le lien vers l’é­mis­sion d’a­vant hier , same­di 14 janvier : 

    https://www.franceculture.fr/emissions/repliques/y‑t-il-une-alternative-la-societe-liberale

    Mer­ci aus­si pour la vidéo des  » VOEUX… pour la PAIX  » de JLM, que je sou­tiens, je ne m’en cache pas .
    Je pose­rai à l’oc­ca­sion la ques­tion qui me tient à coeur : « Ren­drez-vous à César( – CHOUARD ) ce qui lui appartient ? »
    Je conti­nue­rai à suivre le fil de ce blog , plus que jamais !

    Réponse
  8. etienne

    [Tra­hi­son des pré­ten­dues « élites »] [labo­ra­toire de ce qui nous pend au nez parce que nous ne sommes pas fou­tus de deve­nir consti­tuants] Le gou­ver­ne­ment indien, sous contrôle d’un pays étran­ger (comme l’est aus­si notre propre gou­ver­ne­ment, d’ailleurs), mar­ty­rise le peuple indien (qu’il est pour­tant payé pour défendre), en sup­pri­mant (car­ré­ment) toute la mon­naie liquide (scan­dale abso­lu, crime contre l’hu­ma­ni­té, tra­hi­son ignoble, on manque de mots pour pro­tes­ter contre cette ignominie) :

    Un secret de polichinelle bien gardé

    Washing­ton est der­rière la bru­tale expé­rience indienne d’abolition de l’argent liquide.

    Par Nor­bert Häring


    Des Indiens fai­sant la queue devant une banque

    « Début novembre, sans pré­avis, le gou­ver­ne­ment indien a décla­ré inva­lides les deux billets de banque de plus grande valeur, abo­lis­sant plus de 80 % de la valeur d’argent en cir­cu­la­tion. Mal­gré toute l’agitation et l’indignation qui en ont résul­té, per­sonne ne semble avoir pris conscience du rôle déci­sif qu’a joué Washing­ton dans cette déci­sion. C’est sur­pre­nant, car ce rôle a été à peine dissimulé.

    Le pré­sident amé­ri­cain Barack Oba­ma a décla­ré que le par­te­na­riat stra­té­gique avec l’Inde était une prio­ri­té de sa poli­tique étran­gère. La Chine doit être maî­tri­sée. Dans le cadre de ce par­te­na­riat, l’agence amé­ri­caine de déve­lop­pe­ment USAID a négo­cié des accords de coopé­ra­tion avec le minis­tère indien des Finances. L’un d’eux a pour objec­tif décla­ré de repous­ser l’utilisation de l’argent liquide en faveur des paie­ments numé­riques, en Inde mais aus­si dans le monde entier.

    Le 8 novembre, le Pre­mier ministre indien Naren­dra Modi a annon­cé que les deux plus grandes cou­pures, en valeur, de billets de banque ne pou­vaient plus être uti­li­sées, avec un effet presque immé­diat. Les pro­prié­taires ne pou­vaient récu­pé­rer leur valeur qu’en les dépo­sant sur un compte ban­caire avant la fin de la période de grâce qui expi­rait à la fin de l’année [2016], ce que beau­coup de gens et d’entreprises n’ont pas réus­si à faire, en rai­son des longues files d’attente devant les banques. Le mon­tant d’argent liquide que les banques ont été auto­ri­sées à payer aux clients indi­vi­duels a été sévè­re­ment restreint. 

    Près de la moi­tié des Indiens n’ont pas de compte ban­caire et beau­coup n’ont même pas de banque à proxi­mi­té. L’économie est lar­ge­ment basée sur l’argent liquide. Du coup, une grave pénu­rie de liqui­di­tés s’en est sui­vie. Ceux qui ont souf­fert le plus sont les plus pauvres et les plus vul­né­rables. Ils ont éprou­vé des dif­fi­cul­tés sup­plé­men­taires à gagner leur maigre vie dans le sec­teur infor­mel ou à payer des biens et des ser­vices essen­tiels comme la nour­ri­ture, la méde­cine ou les hôpi­taux. Le chaos et la fraude ont régné en décembre. […]

    Lire la suite :
    http://​lesa​ker​fran​co​phone​.fr/​u​n​-​s​e​c​r​e​t​-​d​e​-​p​o​l​i​c​h​i​n​e​l​l​e​-​b​i​e​n​-​g​a​rde

    Source : le Saker Francophone

    Réponse
    • etienne

      Inté­res­sant com­men­taire d’A­na, lu sur le fil Facebook :

      Ana Sailland : La cor­rup­tion et le blan­chi­ment sont en effet le pré­texte rêvé pour abo­lir la mon­naie pal­pable, pièces et billets. Ce qui revient à abo­lir toute pos­si­bi­li­té de com­mer­cer sans être sur­veillé. On y vient, ici, avec la dif­fi­cul­té gran­dis­sante de reti­rer de nos comptes plus que quelques petits sous, avec l’in­ter­dic­tion de payer de grosses sommes en liquide. Plus pos­sible de payer nos taxes au tré­sor public en liquide au delà de 300 euros. Signe des temps, alors qu’en prin­cipe le liquide est la seule mon­naie légale : la tolé­rance devient règle.

      Là des­sus vient se gref­fer l’im­mense pro­grès du pas­se­port bio­mé­trique. On ne doit pas sou­rire sur la pho­to … c’est très gen­til pour les logi­ciels de recon­nais­sance des formes qui per­mettent de nous iden­ti­fier dans la foule. … Il faut bien nous pro­té­ger du vilain ter­ro­riste, et après tout, si c’est au prix d’un sys­tème orwel­lien, c’est pas grave ; n’est ce pas.

      Mais je me demande ce qu’au­rait pu faire dans ce contexte la résis­tance des années quarante …

      Presque hors sujet : l’ar­gu­ment de ceux qui disent que les mon­naies locales c’est du pipeau à cause de l’a­dos­se­ment à l’eu­ro, cet argu­ment ne tient pas la route : outre cer­tains autres avan­tages, elles sont un outil de résis­tance à l’a­bo­li­tion du liquide.

      Encore plus hors sujet 🙂 En Grèce, une par­tie des salaires com­mence à être payée en bons d’a­chat. Cer­tains hurlent au scan­dale. Pour­tant, il s’a­git là de l’a­morce d’une mon­naie natio­nale com­plé­men­taire, qui aurait pu/du être mise en place bien plus tôt, une façon d’é­chap­per au chan­tage à la liqui­di­té phy­sique exer­cé par l’eu­ro­groupe, et dans le contexte de cette conver­sa­tion, un frein à l’a­bo­li­tion du liquide.

      Réponse
    • etienne

      [Article à connaître, de dés­in­for­ma­tion (cher­chant à jus­ti­fier une poli­tique publique indienne affreu­se­ment anti­so­ciale et appa­rem­ment ardem­ment vou­lue par Gold­man Sachs & Co…) et com­men­taires inté­res­sants sur le blog les​-crises​.fr]

      Démonétisation : l’Inde ouvre en fanfare le bal des QE fiscaux

      http://​www​.les​-crises​.fr/​d​e​m​o​n​e​t​i​s​a​t​i​o​n​-​l​i​n​d​e​-​o​u​v​r​e​-​e​n​-​f​a​n​f​a​r​e​-​l​e​-​b​a​l​-​d​e​s​-​q​e​-​f​i​s​c​a​ux/

      Source : Oli­vier Ber­ruyer les​-crises​.fr

      Réponse
  9. etienne

    Pour l’ancien ministre du Bugdet Alain Lambert,

    « La prolifération des normes a tué la « démocratie ». Les administrations règnent, comme au temps des monarchies »

    Alain Lambert : « Comment justifier la tenue d’élections si elles n’ont pas d’effet sur le fonctionnement du pays ? Ce ras-le-bol va encore entraîner une recrudescence du vote populiste. » 
    Alain Lam­bert : « Com­ment jus­ti­fier la tenue d’élections si elles n’ont pas d’effet sur le fonc­tion­ne­ment du pays ? Ce ras-le-bol va encore entraî­ner une recru­des­cence du vote populiste. »
     
    Alain Lam­bert est pré­sident du conseil dépar­te­men­tal de l’Orne, média­teur des normes appli­cables aux col­lec­ti­vi­tés locales.

    Vous avez été nom­mé « média­teur des normes » en mars 2014. Esti­mez-vous que l’inflation nor­ma­tive est moins vivace aujourd’hui ?

    Non, je crois au contraire qu’aucun pro­grès n’a été réa­li­sé. Pour­tant, des objec­tifs avaient été fixés par le Pré­sident de la Répu­blique. En juillet 2013, il avait annon­cé « un choc de sim­pli­fi­ca­tion ». En fait, on a assis­té à un défer­le­ment de mesures et cir­cu­laires cen­sées sim­pli­fier les choses, dont les effets ont été au mieux nuls mais le plus sou­vent contreproductifs.

    Les admi­nis­tra­tions cen­trales ont pris le pou­voir en France. Aujourd’hui, comme dans toutes les périodes d’alternance, elles font le gros dos et conti­nuent à faire ce qu’elles ont envie de faire. Elles dis­posent, sous cou­vert des lois qui ren­voient toutes à un décret d’application (y com­pris quand ce n’est pas néces­saire), d’un authen­tique pou­voir nor­ma­tif, pour ne pas dire un pou­voir qua­si exclusif.

    L’intrusion de l’État dans la vie quo­ti­dienne des ménages et des entre­prises a entraî­né la modi­fi­ca­tion du rap­port de l’administration à la loi : les lois sont deve­nues des textes-cadres dont la por­tée est fixée et pré­ci­sée par l’administration. Cette der­nière est ain­si pro­gres­si­ve­ment deve­nue le « centre de pro­duc­tion du droit » par excel­lence. Cela fait cin­quante ans que je fais du droit, je constate aujourd’hui une forme de « chaos juri­dique », pire encore que celui des finances publiques…

    Pen­sez-vous que si le nombre de fonc­tion­naires est for­te­ment dimi­nué, comme le pro­met par exemple Fran­çois Fillon, le nombre de normes dimi­nue­ra de façon drastique ?

    Cela ne se fera pas de façon méca­nique, mais il est vrai que le nombre éle­vé de fonc­tion­naires dans les admi­nis­tra­tions cen­trales explique en par­tie la mul­ti­pli­ca­tion de normes, dans des pro­por­tions très supé­rieures à ce qui serait nécessaire.

    Par exemple, ce n’est plus l’Etat qui construit les routes ; alors que font les ingé­nieurs qui tra­vaillent au minis­tère de l’Ecologie ? Ils créent des normes envi­ron­ne­men­tales. En France, les reven­di­ca­tions liées à l’environnement ou à la consom­ma­tion sont deve­nues un domaine réser­vé de cer­tains hauts fonc­tion­naires. On arrive à des situa­tions ubuesques, dans une mai­rie par exemple, seul un tech­ni­cien accré­di­té est habi­li­té à chan­ger une ampoule grillée ! La régle­men­ta­tion anti­sis­mique est aus­si un exemple pré­gnant d’absurdité, sur­tout quand elle est appli­cable aux nou­velles construc­tions dans des zones qui n’ont jamais connu de secousses sis­miques. Une ville comme Le Mans se voit ain­si impo­ser des normes construc­tives plus dra­co­niennes. Pour un sur­coût esti­mé de l’ordre de 1% à 5% sui­vant le type d’édifice.

    « Il s’agit d’une lutte de pouvoirs sans merci entre les administrations et les élus. Nos administrations centrales ignorent l’éthique démocratique, elles méprisent le pouvoir politique »

    Com­ment expli­quez-vous la résis­tance au chan­ge­ment dont font preuve les administrations ?

    Il s’agit d’une lutte de pou­voirs sans mer­ci entre les admi­nis­tra­tions et les élus. Nos admi­nis­tra­tions cen­trales ignorent l’éthique démo­cra­tique, elles méprisent le pou­voir poli­tique. Elles répondent à toute com­mande de sa part avec leurs outils bureau­cra­tiques. Elles plient sous les assauts mais ne cèdent pas.

    Pire, pro­gres­si­ve­ment, les hauts fonc­tion­naires ont colo­ni­sé la sphère poli­tique, ils se font élire et tiennent ain­si le sys­tème par les deux bouts !

    L’administration a aus­si peur et hor­reur du chan­ge­ment. Un exemple, il avait été conve­nu que le silence de l’administration valait accep­ta­tion pour une demande effec­tuée par une entre­prise ou un par­ti­cu­lier. Mais une série de décrets et d’arrêtés sont venus mettre un frein à ce prin­cipe simple, en intro­dui­sant des mil­liers d’exceptions.

    Enfin, la pro­li­fé­ra­tion des normes tient sou­vent au sup­port juri­dique qui les pres­crit. Des lois, des décrets, des arrê­tés contiennent des pres­crip­tions tech­niques qui devraient rele­ver, en fait, d’un guide de bonnes pra­tiques ou d’un réfé­ren­tiel. Toute amé­lio­ra­tion tech­no­lo­gique entraîne de nou­veaux textes, avec le cor­tège de com­plexi­té qui en résulte. Mais ce sont sou­vent des prés car­rés pour per­mettre à l’administration de conser­ver la main­mise sur le fonc­tion­ne­ment du pays.

    Il y a aujourd’hui une schi­zo­phré­nie entre l’affirmation sin­cère du pou­voir poli­tique d’une recherche de sim­pli­fi­ca­tion et la méthode uti­li­sée par les admi­nis­tra­tions pour y répondre. Celles-ci imposent des condi­tions nou­velles qui alour­dissent les dis­po­si­tifs et finissent par miner la confiance, tout en entrai­nant sur des dépenses sup­plé­men­taires à la charge des par­ti­cu­liers comme des entre­prises. Une « légis­tique » qui pré­sente de nom­breux effets pervers.

    En pre­nant le pou­voir, les admi­nis­tra­tions cen­trales ont-elles confis­qué la démocratie ?

    Oui, la pro­li­fé­ra­tion des normes a tué la démo­cra­tie. Les élus ont confié la plume qui leur a été remise par le Peuple fran­çais aux admi­nis­tra­tions, alors que ce sont eux, les élus, qui ont la légi­ti­mi­té pour écrire le droit. Parce que le pou­voir poli­tique semble ne plus être en capa­ci­té d’imposer sa volon­té à l’administration, il détruit le mythe démo­cra­tique, qui repose sur l’exercice du pou­voir par le sys­tème de représentation.

    De plus, au pré­texte de la démo­cra­tie par­ti­ci­pa­tive, uti­li­sant des groupes de pres­sion, l’administration tente de manière ram­pante de se doter d’une légi­ti­mi­té démo­cra­tique, paral­lèle et concur­rente à celle des élus. Com­ment jus­ti­fier la tenue d’élections si elles n’ont pas d’effet sur le fonc­tion­ne­ment du pays ? Les votes popu­listes en France sont, en par­tie, direc­te­ment liés à cette accu­mu­la­tion de normes qui étouffent le pays et le citoyen. Et par le constat que les admi­nis­tra­tions règnent, comme au temps des monarchies.Les Fran­çais ne sup­portent plus les admi­nis­tra­tions cen­trales et les normes qu’elles édictent. Ce ras-le-bol va encore entraî­ner une recru­des­cence du vote popu­liste dont la vio­lence me semble sous-esti­mée. Tout cela pour­rait mal finir, dans la rue.

    Entre­tien : 

    Source : L’O­pi­nion

    Réponse
    • Ronald

      L’in­va­sion admi­nis­tra­tive est un sou­ci sérieux. Car, alors que beau­coup de pro­blèmes seraient amé­lio­rés par la démo­cra­ti­sa­tion, la puis­sance de l’ad­mi­nis­tra­tion risque elle d’être accrue. Des diri­geants poli­tiques pro­fes­sion­nels élus peuvent rela­ti­ve­ment faire contre­poids face à l’ad­mi­nis­tra­tion. Mais des citoyens tirés au sort, ama­teurs, pour un man­dat court, risquent d’être une proie bien plus facile pour des tech­no­crates. Je n’ai pas trop de solu­tion à ce pro­blème. Davis Grae­ber raconte (dans ‘Bureau­cra­tie’) que quand une bureau­cra­tie s’est embal­lée, il n’y a plus moyen de reve­nir en arrière : les seule fois dans l’his­toire où l’on a trou­vé une méthode pour y arri­ver, c’est ce qu’ont fait les Wisi­goth en enva­his­sant Rome, et les Mon­gols au Proche-Orient : ils ont exter­mi­né tous les fonctionnaires …

      Réponse
      • Adeline

        Je ne com­prends pas cette « ana­lyse ». Les admi­nis­tra­tions ne répondent qu’aux com­mandes des élus. Ce sont les élus qui pondent les lois, soit par le gou­ver­ne­ment soit par l’as­sem­blée, sou­vent pour mettre en appli­ca­tion les direc­tives de Bruxelles. 

        Les gou­ver­ne­ments somment les fonc­tion­naires d’é­crire des textes pour mettre en appli­ca­tion les lois ou ordon­nances qu’ils ont EUX pon­dus. Les fonc­tion­naires ne courent pas après les chan­ge­ment de normes, ça les gave autant que le com­mun des mor­tels.

        Ce que fait l’ex-ministre ici, c’est du fonc­tion­naires bashing, tel­le­ment à la mode des GOPE de Bruxelles ces temps-ci.

        Réponse
        • Ronald

          Non, ça c’est pen­ser les choses comme des concepts, mais dans la ‘réa­li­té vraie’ cela ne se passe pas ain­si. La « neu­tra­li­té bureau­cra­tique » est un concept de Max Weber, mais on ne voit plus aujourd’­hui les choses ain­si. L’ad­mi­nis­tra­tion est un corps consti­tué d’in­di­vi­dus qui ont leur mode de pen­sée, leurs inté­rêts, leurs objec­tifs. Ils ne sont pas for­cé­ment cor­ré­lés à ceux de leurs don­neurs d’ordre poli­tiques. L’exemple cari­ca­tu­ral étant la poli­tique des USA en Syrie, où la Mai­son Blanche, la CIA et le Penta­gone en sont arri­vés à sou­te­nir des groupes dif­fé­rents qui se combattent.
          Ce phé­no­mène a d’a­bord été consta­té dans le pri­vé où l’on a consta­té que les diri­geants n’a­vaient pas for­cé­ment le même calen­drier que les action­naires, et que cela pou­vait nuire à l’en­tre­prise. Les tra­vaux sur le sujet s’ap­pellent « théo­rie de l’a­gence ». C’est suite à cela qu’on a déve­lop­pé les stock-options, pour que les diri­geants admi­nis­tra­tifs deviennent aus­si action­naires et par­tagent leurs objectifs.
          Pour une intro­duc­tion sur le sujet, voir par exemple le cours ici, pages 3–22 :
          https://cours.univ-paris1.fr/pluginfile.php/583372/mod_resource/content/1/C‑RATBUREAUCRATIE.pdf

          Réponse
          • Adeline

            « L’administration est un corps consti­tué d’individus qui ont leur mode de pen­sée, leurs inté­rêts, leurs objec­tifs. » Pou­vez-vous illus­trer ces affir­ma­tions par des exemples concrets en France. Il ne faut pas confondre fonc­tion­naires et politiques.

            Vous êtes en train de nous dire que l’ad­mi­nis­tra­tion est cor­rom­pue, qu’elle est une mafia paral­lèle aux gou­ver­ne­ments et élus intègres ? Un État dans l’État que les pauvres élus poli­tiques ne pour­raient contrô­ler et qui se finan­ce­rait par lui-même par quelques pra­tiques hors-la-loi ?
            Sans doute avez-vous rai­son en ce qui concerne la CIA qui se financent par la drogue ou autres crimes et pots de vin. Mais « l’État pro­fond » (ou « les États pro­fonds ») en France, ce n’est pas la « cor­po­ra­tion » des fonctionnaires.

            Un fonc­tion­naire n’a rien à perdre ou gagner dans les poli­tiques vou­lues et mises en place par les élus, il ira jus­qu’à sa retraite. Ce ne sont pas des action­naires de l’entreprise. Et c’est pour cela qu’ils peuvent encore dire de façon neutre à un élu qu’il va à l’encontre du bien public. L’exemple qui me vient en tête c’est Asse­li­neau pla­car­di­sé par Sar­ko­zy pour avoir oser dire le contraire de la doxa poli­tique domi­nante sur l’UE. Bien que ce soit eux qui pondent les lois (et donc les normes), les élus ne sup­portent pas qu’il y ait des normes lorsque ça les dérange et y dérogent conti­nuel­le­ment en étant mys­té­rieu­se­ment impu­nis, mais les fonc­tion­naires s’y plient chaque jour. L’ad­mi­nis­tra­tion est quelque chose de lourd, et les fonc­tion­naires sont bien obli­gés d’o­béir à qui les com­mandent même en ayant des convic­tions oppo­sées, même sous Pétain, Hit­ler ou Sta­line. Ce sont les poli­tiques qui mettent au pas les fonc­tion­naires, pas l’inverse.

            Si cer­tains se font cor­rompre, croyez-moi, ce sont par les mêmes qui cor­rompent d’abord et avant tout leurs don­neurs d’ordre, et qui n’y voient donc rien à dire, bien au contraire, c’est pour les cou­vrir. Un fonc­tion­naire car­rié­riste cher­che­ra à com­plaire au sys­tème, aux don­neurs d’ordre. Ceux qui ont beau­coup à gagner dans ces guerres, ce ne sont pas les fonc­tion­naires (tout le monde peut pas­ser les concours sans faire par­tie d’une caste ou d’une mafia, contrai­re­ment aux pro­fes­sion­nels de la poli­tique), mais les mar­chands d’armes, les gros indus­triels, les financiers.

            Avec la fin de la fonc­tion publique, on revien­dra au temps du clien­té­lisme le plus com­plet, aux féo­da­li­tés. Les employés en livrée tels des mer­ce­naires ou des vas­saux prê­te­ront allé­geance aux puis­sants riches s’ils veulent man­ger Il n’y aura même plus le ver­nis de la décence.

          • Adeline

            L’administration de l’UE, matra­quée par les lob­bies des mul­ti­na­tio­nales en toute léga­li­té à Bruxelles, les com­mis­saires qui ne passent même pas par la case élec­tion, c’est sans doute ce qui a tué tout sem­blant de démo­cra­tie en France, liée par des trai­tés que le peuple a pour­tant clai­re­ment refu­sé en 2005. Les fonc­tion­naires en France ne font que mettre en appli­ca­tion des lois prises par le gou­ver­ne­ment élu pour trans­po­ser les direc­tives de Bruxelles. Sans quoi les sanc­tions et péna­li­tés pleuvent. Peut-on déso­béir à ces traités ?

          • Ronald

            @Adeline.

            Je ne vais pas cher­cher « des » exemples concrets en France, d’au­tant qu’é­tant Belge, je ne suis pas en détail la vie poli­tique française. 

            Mais je peux en don­ner un : l’ad­mi­nis­tra­tion des Affaires Exté­rieures fran­çaise à une tra­di­tion pro-arabe. Nico­las Sar­ko­zy vou­lait, lui, une diplo­ma­tie néo­con­ser­va­trice et pro-israé­lienne. Il a dès lors dû affai­blir le Quai d’Or­say, impo­ser ses hommes et mener une diplo­ma­tie parallèle :

            http://​www​.tole​rance​.ca/​A​r​t​i​c​l​e​.​a​s​p​x​?​I​D​=​1​0​2​9​9​8​&​L​=fr

          • Adeline

            Ben alors on est d’ac­cord, ce sont bien les élus qui mènent le bal.… et les fonc­tion­naires joue­raient plu­tôt le rôle du garde-fou.

    • joss

      C’est jus­te­ment parce que nous ne sommes pas en démo­cra­tie et qu’une mino­ri­té nous gou­verne, qu’ils génèrent une pro­li­fé­ra­tion de normes afin de se pro­té­ger du peuple, de le sur­veiller et de le punir. Ils uti­lisent la force de la loi (dic­tée par la mino­ri­té), ils ont la police et les pri­sons. Et lorsque la loi ne suf­fi­ra plus,… Nous pas­se­rons à la dictature.

      Réponse
  10. etienne

    [FMI, banques… au diable ces enne­mis des peuples ! Toutes ces « poli­tiques publiques » mar­ty­ri­sant le public nous menacent, nous aus­si, faute de citoyens dignes de ce nom pour défendre la socié­té contre les prédateurs !]

    Les documents secrets du FMI sur la Grèce

    « Nous met­tons à la dis­po­si­tion du public fran­co­phone des docu­ments tenus secrets par le FMI. Il s’agit de docu­ments authen­tiques qui ont été mis à la dis­po­si­tion de la Com­mis­sion pour la véri­té sur la dette publique grecque par Zoe Kons­tan­to­pou­lou, pré­si­dente du Par­le­ment grec du 6 février au 3 octobre 2015. Le conte­nu de ces 2 docu­ments qui datent de mars et de mai 2010 est acca­blant pour le FMI. »

    Le compte-ren­du offi­ciel de la réunion du 9 mai 2010 au cours de laquelle la direc­tion du FMI approu­vé un cré­dit de 30 mil­liards € à la Grèce montre très clai­re­ment qu’un nombre éle­vé de membres de la direc­tion ont expri­mé de très fortes cri­tiques à l’égard du pro­gramme que l’institution s’apprêtait à mettre en œuvre. 

    Cer­tains d’entre eux ont dénon­cé le fait que le pro­gramme visait à sau­ver les banques pri­vées euro­péennes qui étaient créan­cières de la dette publique et pri­vée grecque, prin­ci­pa­le­ment quelques grandes banques fran­çaises et allemandes. 

    Plu­sieurs d’entre eux ont dénon­cé une poli­tique qui repro­dui­sait ce qui avait conduit à la crise argen­tine de 2001 et à la crise asia­tique de 1996–1997 (voir enca­dré avec la cita­tion du direc­teur exé­cu­tif argentin). 

    Plu­sieurs diri­geants ont dénon­cé le fait que le noyau diri­geant du FMI avait modi­fié à l’insu des autres membres du conseil d’administration une des règles fon­da­men­tales qui condi­tionnent les cré­dits alloués par le FMI à ses membres. En effet, pour qu’un cré­dit puisse être octroyé par le FMI, il faut démon­trer que ce cré­dit et le pro­gramme qui l’accompagne ren­dront sou­te­nable le rem­bour­se­ment de la dette. Vu que cette condi­tion ne pou­vait pas être satis­faite dans le cas de la Grèce étant don­né que la direc­tion du FMI et les auto­ri­tés euro­péennes refu­saient de réduire la dette grecque et d’y faire par­ti­ci­per les banques pri­vées, la condi­tion men­tion­née plus haut a été sup­pri­mée en cati­mi­ni. Elle a été rem­pla­cée par un nou­veau cri­tère : la néces­si­té d’éviter un risque éle­vé de désta­bi­li­sa­tion finan­cière sys­té­mique inter­na­tio­nale. La direc­tion du FMI a jus­ti­fié par l’urgence ce chan­ge­ment de cri­tère non res­pec­tueux des règles de fonctionnement. 

    Afin de convaincre ceux des diri­geants du FMI qui émet­taient de très fortes réserves, les diri­geants fran­çais, alle­mand et hol­lan­dais ont men­ti en assu­rant que les banques de leur pays ne se débar­ras­se­raient pas des titres grecs. Selon eux, les banques fran­çaises, alle­mandes et hol­lan­daises allaient conser­ver les titres grecs en leur pos­ses­sion afin de per­mettre la réus­site du pro­gramme qui allait commencer. 

    Or il est prou­vé que les banques fran­çaises, alle­mandes et hol­lan­daises ont ven­du mas­si­ve­ment les titres qu’elles déte­naient sur le mar­ché secon­daire en pro­vo­quant une aggra­va­tion de la crise grecque et en repor­tant sur le dos des contri­buables euro­péens, et en pre­mier lieu sur le peuple de la Grèce, les risques qu’elles avaient pris et la crise qu’elles avaient très lar­ge­ment contri­bué à provoquer. 

    Tou­jours pour lever les réti­cences de cer­tains membres de la direc­tion du FMI, les res­pon­sables du FMI en charge des rela­tions avec la Grèce ont affir­mé que des mesures sociales seraient prises pour évi­ter que les bas salaires et les petits retrai­tés soient tou­chés par les mesures d’austérité. Ils ont menti. 

    Pour empor­ter éga­le­ment l’accord des membres de la direc­tion du FMI, ils ont affir­mé que les banques grecques étaient saines et que leurs pro­blèmes pro­ve­naient uni­que­ment des risques que fai­saient por­ter sur elles le poids d’une dette publique trop impor­tante et d’un défi­cit public abys­sal. C’était faux : les banques grecques se trou­vaient dans un état désastreux. 

    Tou­jours pour convaincre ceux des diri­geants qui dou­taient, on leur a décla­ré que le plan serait sou­mis pour appro­ba­tion au Par­le­ment grec. Or, en réa­li­té, le pro­gramme a été impo­sé à la hus­sarde au par­le­ment, sans pos­si­bi­li­té d’amendement et en bafouant la consti­tu­tion grecque, comme l’ont dénon­cé à l’époque de nom­breux juristes.

    Pour convaincre les membres de la direc­tion du FMI qui sou­hai­taient qu’on demande aux banques de par­ti­ci­per « col­lec­ti­ve­ment » à l’effort en accep­tant une réduc­tion de leurs créances, les res­pon­sables du dos­sier grec ont affir­mé que les auto­ri­tés grecques ne vou­laient pas d’une réduc­tion de la dette publique. Et le repré­sen­tant grec, Pana­gio­tis Rou­mé­lio­tis, a confir­mé cette ver­sion des faits. Plus tard, ce même repré­sen­tant a affir­mé que c’est sous la pres­sion du pré­sident de la Banque cen­trale euro­péenne (BCE) que la Grèce a décla­ré qu’elle ne sou­hai­tait pas une réduc­tion de sa dette. Selon le repré­sen­tant de la Grèce au FMI, Jean-Claude Tri­chet aurait mena­cé la Grèce de cou­per l’accès des banques grecques aux liqui­di­tés de la BCE. Il est cer­tain que Jean-Claude Tri­chet a uti­li­sé cette menace dans les mois au cours des­quels le mémo­ran­dum a été négo­cié. Il est éga­le­ment avé­ré qu’il a uti­li­sé la même menace à l’égard de l’Irlande quelques mois plus tard lors de la mise au point du mémo­ran­dum concer­nant ce pays. Il est éga­le­ment cer­tain que les ban­quiers grecs, tout comme les ban­quiers fran­çais, alle­mands ou hol­lan­dais ne vou­laient pas entendre par­ler d’une réduc­tion de la dette grecque car ils n’acceptaient pas d’être mis à contri­bu­tion pour assu­rer leur propre sau­ve­tage. Les ban­quiers ont obte­nu deux ans de répit afin de pou­voir se déga­ger et obte­nir des com­pen­sa­tions importantes.

    Le FMI affirme très clai­re­ment que, vu l’appartenance de la Grèce à la zone euro, il lui est impos­sible de retrou­ver de la com­pé­ti­ti­vi­té en déva­luant sa mon­naie. Du coup, le FMI consi­dère qu’il faut déva­luer les salaires et les allo­ca­tions sociales : c’est ce qu’on appelle la déva­lua­tion interne. Elle fait des ravages en Grèce et dans d’autres pays péri­phé­riques au sein de la zone euro. Le conte­nu de ces docu­ments secrets conforte le juge­ment por­té par la Com­mis­sion pour la véri­té sur la dette : les dettes récla­mées par le FMI à la Grèce sont illé­gi­times, illé­gales, odieuses et insou­te­nables (voir le cha­pitre 8 du rap­port de la commission)

    En pre­mier lieu, nous pro­po­sons à la lec­ture le compte-ren­du de la réunion du conseil d’administration du FMI du 9 mai 2010 car il met en évi­dence les diver­gences internes et n’est pas rédi­gé dans la langue de bois habi­tuelle du FMI. Ce compte-ren­du offi­ciel sort tout à fait de l’ordinaire. Il est cer­tain qu’il n’a pas été appré­cié par les prin­ci­paux diri­geants de cette ins­ti­tu­tion des­po­tique et mor­ti­fère. À vous de lire et de vous faire une opinion. » […]

    Lire la suite :
    https://​blogs​.media​part​.fr/​c​a​d​t​m​/​b​l​o​g​/​1​3​0​1​1​7​/​l​e​s​-​d​o​c​u​m​e​n​t​s​-​s​e​c​r​e​t​s​-​d​u​-​f​m​i​-​s​u​r​-​l​a​-​g​r​ece

    Source : CADTM

    Réponse
    • etienne

      Rappel, pour comprendre l’origine véritable (crapuleuse) de cette prétendue « crise grecque » : 

      « L’É­tat et les banques, les des­sous d’un hold-up his­to­rique » par Myret Zaki et Etienne Chouard (1 mil­lion de vues 🙂 )

      httpv://www.youtube.com/watch?v=TLjq25_ayWM

      Réponse
  11. etienne

    L’argent, ennemi de la démocratie : une vieille histoire

    par Jean-Pierre Gue­ne­baut

    « Les affaires poli­ti­co-finan­cières font aujourd’­hui la une des médias. Elles dis­cré­ditent la classe poli­tique et nous rap­pellent l’im­per­fec­tion, pour ne pas dire l’im­pos­ture, de notre régime poli­tique qui n’a de démo­cra­tique que le nom. L’i­né­ga­li­té sociale exces­sive mine la démo­cra­tie, fait qui est déplo­ré depuis très longtemps.

    Pla­ton fut le pre­mier à le dénon­cer, ana­ly­sant les causes de l’af­fai­blis­se­ment de la démo­cra­tie athé­nienne : « Si un État veut évi­ter la dés­in­té­gra­tion civile, il ne faut pas per­mettre à la pau­vre­té et à la richesse extrêmes de se déve­lop­per dans aucune par­tie du corps civil, car cela conduit au désastre. C’est pour­quoi le légis­la­teur doit éta­blir main­te­nant quelles sont les limites accep­tables à la richesse et à la pau­vre­té. » (Les lois V 744d

    L’his­to­rien romain Sal­luste explique ain­si les rai­sons de la déca­dence romaine et des guerres civiles : « Ces mêmes romains qui avaient sou­te­nus sans peine les tra­vaux, les périls, les incer­ti­tudes et les rigueurs des évè­ne­ments, furent tris­te­ment vain­cus par le loi­sir et les richesses, objets de tous les vœux. D’a­bord s’ac­crut la soif de l’or, ensuite celle du pou­voir : ce fut la double cause de tous nos maux. Car l’a­vi­di­té anéan­tit la bonne foi, la pro­bi­té et les autres ver­tus, pour leur sub­sti­tuer l’or­gueil, la cruau­té, le mépris des dieux et la véna­li­té uni­ver­selle… » (Cati­li­naires, IX, 1‑XII, 5)

    Un chro­ni­queur ita­lien, Ste­fa­ni, décrit en 1289 la situa­tion dans la répu­blique de Flo­rence : « Les citoyens accé­dant aux offices de Prieurs ne cher­chaient pas à obser­ver les lois, mais à les cor­rompre. Si un de leurs amis ou parents était pas­sible d’une peine, ils pre­naient soin, avec le concours de la Sei­gneu­rie et des offi­ciers, de dis­si­mu­ler leurs fautes, afin qu’ils res­tassent impu­nis. Ils ne veillaient pas sur le patri­moine de la Com­mune, et trou­vaient ain­si le moyen de la voler. De la sorte, ils tiraient beau­coup d’argent de la caisse de la Com­mune, sous pré­texte de rému­né­rer des hommes qui l’au­raient ser­vie. Les faibles n’é­taient pas secou­rus, mais les grands leur fai­saient du tort, et les « gras » qui occu­paient des charges et étaient appa­ren­tés aux grands agis­saient de la même manière. »

    Tho­mas More, ima­gi­nant un monde meilleur dans son Uto­pie publiée en 1566, écrit : « L’é­ga­li­té est impos­sible dans un État où la pos­ses­sion est soli­taire et abso­lue ; car cha­cun s’y auto­rise de divers titres et droits pour atti­rer à soi autant qu’il peut, et la richesse natio­nale (…) finit par tom­ber en la pos­ses­sion d’un petit nombre d’in­di­vi­dus qui ne laissent aux autres qu’in­di­gence et misère. (…) Le but des ins­ti­tu­tions sociales en Uto­pie est de four­nir d’a­bord aux besoins de la consom­ma­tion publique et indi­vi­duelle, puis de lais­ser à cha­cun le plus de temps pos­sible pour culti­ver libre­ment son esprit. »

    Fran­cis Bacon, s’in­ter­ro­geant sur les causes des troubles sociaux, décla­rait en 1625 :« Le gou­ver­ne­ment doit prendre des mesures pour évi­ter que tout l’argent ne s’ac­cu­mule en un petit nombre de mains (…) ; l’argent, comme le fumier, ne fruc­ti­fie que si on prend soin de le répandre. »

    Le cin­quième article de la Décla­ra­tion des droits de l’É­tat de Penn­syl­va­nie, rédi­gé en 1776 par William Penn et ses amis qua­kers, par­ti­sans de l’é­ga­li­té, affir­mait : « Le gou­ver­ne­ment est, et devrait être, ins­ti­tué pour le béné­fice com­mun, la pro­tec­tion et la sécu­ri­té du peuple, de la nation ou de la com­mu­nau­té ; et non à l’avantage ou pour les émo­lu­ments par­ti­cu­liers d’un homme, d’une famille, ou d’une caté­go­rie d’hommes qui ne forment qu’une par­tie de la communauté. »

    Citons aus­si J.J. Rous­seau qui jugeait la démo­cra­tie irréa­li­sable car : « D’ailleurs, que de choses dif­fi­ciles à réunir ne sup­pose pas ce gou­ver­ne­ment : beau­coup d’é­ga­li­té dans les rangs et dans les for­tunes, sans quoi l’é­ga­li­té ne sau­rait sub­sis­ter long­temps dans les droits et l’au­to­ri­té ; enfin, peu ou point de luxe, car ou le luxe est l’ef­fet des richesses, ou il les rend néces­saires ; il cor­rompt à la fois le riche et le pauvre, l’un par la pos­ses­sion, l’autre par la convoi­tise ; il vend la patrie à la mol­lesse, à la vani­té ; il ôte à l’É­tat tous ses citoyens pour les asser­vir les uns aux autres, et tous à l’o­pi­nion. » (Du Contrat Social, Livre III, 4)

    L’ab­bé Sieyes, qui joua un rôle impor­tant dans le déclen­che­ment de la révo­lu­tion fran­çaise, écri­vait en 1788 : « Les pri­vi­lé­giés englou­tissent et les capi­taux et les per­sonnes ; tout est voué sans retour à la sté­ri­li­té pri­vi­lé­giée. » (Sieyes, Essai sur les privilèges)

    Et qui ne connaît pas les pro­pos de Jacques Roux, le curé rouge chef des Enra­gés, qui décla­ra à la tri­bune de la Conven­tion Natio­nale le 25 juin 1793 :
    « La liber­té n’est qu’un vain fan­tôme, quand une classe d’hommes peut affa­mer l’autre impu­né­ment. L’é­ga­li­té n’est qu’un fan­tôme, quand le riche, par le mono­pole, exerce le droit de vie et de mort de son sem­blable. La répu­blique n’est qu’un vain fan­tôme, quand la contre-révo­lu­tion s’o­père de jour en jour par le prix des den­rées auquel les trois quarts des citoyens ne peuvent atteindre sans ver­ser des larmes. »

    Jean-Pierre Gue­ne­baut

    http://segolenomaniaousegolenisme.blogs.nouvelobs.com/archive/2013/04/06/l‑argent-ennemi-de-la-democratie-une-vieille-histoire.html

    Réponse
  12. etienne

    Pas­sion­nant Alain Supiot, ce matin sur France Culture :

    Du gouvernement par les lois à la gouvernance par les nombres 712
    L’essor des usages normatifs : la comptabilité et les statistiques

    https://www.franceculture.fr/emissions/les-cours-du-college-de-france/du-gouvernement-par-les-lois-la-gouvernance-par-les‑6

    Ne vous fiez pas au titre (pas sexy du tout   ) : Supiot parle de MONNAIE de façon très inté­res­sante, et il semble cher­cher, lui aus­si, la cause des causes des entorses au bien com­mun. Depuis des années, je trouve ce juriste passionnant.

    Réponse
  13. zedav

    Cours abso­lu­ment pas­sion­nant, mer­ci Étienne.

    Réponse
  14. BA

    Record his­to­rique battu !

    Pour empê­cher l’ef­fon­dre­ment total du sys­tème euro­péen, la Banque Cen­trale Euro­péenne a été obli­gée de rache­ter 24,7 mil­liards d’eu­ros en une semaine !

    Vous avez bien lu : 24,7 mil­liards d’eu­ros en une semaine !

    Pour empê­cher l’ef­fon­dre­ment total du sys­tème euro­péen, la BCE est obli­gée de racheter :

    - des obli­ga­tions d’E­tat pour­ries, qui n’ont plus aucune valeur, 

    - et aus­si des obli­ga­tions d’en­tre­prise, dont la valeur dépend de la soi-disant « crois­sance éco­no­mique », qui ne cesse de bais­ser en Europe.

    Pro­blème :

    1- Les pays membres de la zone euro sont en faillite, et ils ne pour­ront jamais rem­bour­ser leur dette publique.

    2- A part en Alle­magne, les entre­prises pri­vées de la zone euro ne connaissent pas la soi-disant « crois­sance éco­no­mique », qui aurait dû créer des mil­lions d’emplois dans la zone euro. Rap­pe­lez-vous des pro­messes qu’on nous avait faites au moment de la créa­tion de l’euro.

    3- Toute la zone euro est en faillite, et il n’y a plus que la Banque Cen­trale Euro­péenne pour empê­cher l’ef­fon­dre­ment du système.

    4- Mal­heu­reu­se­ment, une banque cen­trale n’a jamais pu, ne peut pas, et ne pour­ra jamais empê­cher une crise finan­cière. Lors de la pro­chaine crise finan­cière, c’est toute la zone euro qui explo­se­ra, et sa banque cen­trale explo­se­ra avec elle.

    Lun­di 16 jan­vier 2017 :

    La BCE a ache­té pour 24,7 mil­liards d’eu­ros d’ac­tifs en une semaine, un record.

    http://www.boursorama.com/actualites/la-bce-a-achete-pour-24–7‑milliards-d-euros-d-actifs-en-une-semaine-un-record-3171a89d1668028ae8b5e02891fdf5fe

    Réponse
  15. etienne

    Diabolique Fillon : vous ne pourrez pas dire que vous n’étiez pas prévenus :

    Réponse
  16. etienne

    Son­dage Opi­nion­Way pour Sciences Po, jan­vier 2017 : 

    Question : « La démocratie fonctionnerait mieux en France si les députés étaient en fait des citoyens tirés au sort »

    48% D’ac­cord (!!!)
    24% Ni d’ac­cord ni pas d’ac­cord (=> mau­vaise question ? 🙂 )
    22% Pas d’ac­cord (c’est peu !)

    Ça germe 🙂

    Source (page 75) : http://www.youscribe.com/catalogue/tous/actualite-et-debat-de-societe/barometre-de-la-confiance-politique-vague‑8–2792582

    Réponse
    • etienne

      Malaise dans la démocratie

      par Jacques Munier sur France Culture lun­di dernier :

      https://www.franceculture.fr/emissions/le-journal-des-idees/malaise-dans-la-democratie‑0

      Démo­cra­tie directe, par­ti­ci­pa­tive, inclu­sive… Les remèdes ne manquent pas face à la crise annon­cée de nos sys­tèmes politiques.

      On voit même reve­nir au goût du jour la pro­cé­dure du tirage au sort, déjà pra­ti­quée ponc­tuel­le­ment dans cer­tains pays comme l’Islande, après la ban­que­route de 2008, où une assem­blée de 950 citoyens tirés au sort a éla­bo­ré un pro­jet de réforme consti­tu­tion­nelle. Pour Gil Delan­noi, « ce dis­po­si­tif pour­rait ser­vir à redon­ner du goût à la poli­tique, et à cor­ri­ger cer­tains défauts des élec­tions. Aris­tote disait que le vote est aris­to­cra­tique, puisqu’il légi­time un très petit nombre d’élus, le tirage au sort étant par com­pa­rai­son plus éga­li­taire. » Le can­di­dat ain­si dési­gné ne serait pas sou­mis à l’influence des groupes de pres­sion, ses déci­sions ne seraient pas biai­sées par la pers­pec­tive de devoir faire cam­pagne. Le poli­to­logue sug­gère dans le men­suel Books de créer « une assem­blée consul­ta­tive de citoyens tirés au sort venant s’ajouter aux dépu­tés et séna­teurs », ou de tirer au sort une par­tie des séna­teurs par­mi les élites du pays : diri­geants divers, uni­ver­si­taires, méde­cins, juristes… Dans un pre­mier temps, on pour­rait expé­ri­men­ter la for­mule au niveau muni­ci­pal : for­mer un conseil tiré au sort que le maire et ses élus seraient tenus de consul­ter. Et face à l’objection sou­vent avan­cée d’incompétence de telles assem­blées, il rap­pelle que sur les ques­tions d’intérêt géné­ral, « nous sommes tous capables d’exercer notre juge­ment », et que sur des ques­tions plus tech­niques le recours à des experts est tou­jours pos­sible, comme dans les jurys d’assises, ou chez les anciens Grecs, les citoyens tirés au sort à Athènes pour pré­pa­rer les réunions de l’Assemblée ou exé­cu­ter « les tâches admi­nis­tra­tives dévo­lues chez nous à des fonc­tion­naires : l’impôt, la police, la justice… »

      Mais pour cer­tains cri­tiques de la démo­cra­tie, le mal est dans le fruit

      C’est le cas de Jean-Paul Cur­nier, qui fait l’étonnant paral­lèle entre sys­tème démo­cra­tique et pira­te­rie dans son der­nier livre, paru aujourd’hui aux édi­tions Lignes sous le titre La pira­te­rie dans l’âme. Fai­sant le constat du « malaise devant l’écart consi­dé­rable que cha­cun peut consta­ter entre l’idéal qui sous-tend le mot démo­cra­tie et les diverses formes de réa­li­té poli­tique qui s’en réclament », le phi­lo­sophe com­mence par décons­truire le mythe d’origine de la démo­cra­tie grecque. Il rap­pelle qu’elle est née de la néces­si­té de répondre à un nou­vel état de fait : « une trans­for­ma­tion de la com­po­si­tion de la socié­té athé­nienne qui se trou­vait de plus en plus tri­bu­taire de nou­velles forces sociales : les pro­prié­taires ter­riens, les exploi­tants miniers et les arma­teurs ».* Ce sont ces der­niers qui ont d’ailleurs consti­tué la cité en « empire de la mer », la tha­las­so­cra­tie athé­nienne qui, après la vic­toire sur les Perses, éten­dit autant que pos­sible son hégé­mo­nie en sou­met­tant les cités pla­cées sous sa pro­tec­tion à l’impôt. Fus­tel de Cou­langes, cité par l’auteur, observe par ailleurs que « la démo­cra­tie ne sup­pri­ma pas la misère ; elle la ren­dit au contraire plus sen­sible. L’égalité des droits poli­tiques fit res­sor­tir encore davan­tage l’inégalité des condi­tions ». Et lorsque la classe pauvre « après plu­sieurs guerres civiles recon­nut que ses vic­toires ne ser­vaient de rien, que le par­ti contraire reve­nait tou­jours au pou­voir », elle se réso­lut à se tour­ner vers les tyrans.

      Et la pira­te­rie dans tout ça ?

      « Les pre­miers grecs étaient tous pirates » écrit Mon­tes­quieu dans L’esprit des lois, ce que confirme Thu­cy­dide. Et Jean-Paul Cur­nier relève que rien n’était plus démo­cra­tique que le « code des pirates ». Ils éli­saient leur capi­taine, qui res­tait comp­table de sa charge et tou­jours mena­cé de des­ti­tu­tion par la com­mu­nau­té des réprou­vés, mutins, exi­lés poli­tiques, esclaves libé­rés puis enrô­lés qui for­maient le gros des équi­pages fli­bus­tiers. Tout pro­jet d’abordage était sou­mis à déli­bé­ra­tion. Et les pirates s’étaient même dotés d’un sys­tème de pro­tec­tion sociale. Jean-Paul Cur­nier pro­longe le paral­lé­lisme avec la démo­cra­tie en évo­quant le colo­nia­lisme, entre­prise mon­dia­li­sée de pré­da­tion, sous cou­vert d’un apport de la civi­li­sa­tion – mais pas de la démo­cra­tie, en l’occurrence. Et jusqu’à nos jours, selon lui, « si la démo­cra­tie se fait des enne­mis, ce n’est pas du fait de l’ignorance, de la mau­vaise foi ou de l’arriération des autres, mais du fait des dégâts qu’elle engendre dans les autres formes de socié­tés humaines ».

      Reste que le tirage au sort, héri­tage de la démo­cra­tie grecque mais aus­si des répu­bliques ita­liennes comme Venise et Flo­rence, semble avoir conser­vé toute son attractivité

      Dans Marianne, Thier­ry Pech se dit lui aus­si favo­rable à ce « qu’une par­tie du Sénat soit tirée au sort, de même que pour des assem­blées consul­ta­tives comme le Conseil éco­no­mique, social et envi­ron­ne­men­tal ». Le direc­teur de Ter­ra Nova livre son diag­nos­tic dans le Por­trait de la France qui vient, publié au Seuil sous le titre _Insoumissions_. « Le pro­blème le plus aigu en France, ce n’est pas la socié­té, c’est la scène démocratique ».

      Par Jacques Munier

      * « A Athènes, il y a 2500 ans, c’est la démo­cra­tie qui a été l’instrument de consti­tu­tion du peuple et non le peuple qui a consti­tué la démo­cra­tie » P. 66

      Réponse

Laisser un commentaire

Derniers articles

[Dérive du pouvoir scolaire] Le préparateur – Alain, 25 août 1906

[Dérive du pouvoir scolaire] Le préparateur – Alain, 25 août 1906

[LE PRÉPARATEUR] Un nouvel examen vient d'être institué, à la suite duquel on pourra recevoir un certificat d'aptitude aux fonctions de magistrat. Il en sera de cet examen comme de tous les autres, il donnera de bons résultats au commencement, et de mauvais ensuite....