[IMPORTANT] Le véritable objectif de l’Union européenne, mis en évidence par L’EXEMPLE GREC
[DÉTAILS de l’assassinat de la Grèce par les autorités européennes, grâce à la CRIMINELLE TRAHISON des Grecs par leur principal parti « de gauche »]
Écoutez bien (et notez sur un papier) le détail de ce qui est désormais infligé aux Grecs : ça nous pend au nez (parce qu’on regarde trop la télé et qu’on se fait intoxiquer).
Stathis KOUVELAKIS : « Après la capitulation de SYRIZA quelles stratégies pour la Gauche en Europe ? »
httpv://www.youtube.com/watch?v=asMWGIYc1s4&feature=youtu.be
Il faudrait retranscrire cette intervention, que je trouve très importante (ça va crescendo… ce qu’on fait aux Grecs est atroce).
Fil Facebook correspondant à ce billet :
https://www.facebook.com/etienne.chouard/posts/10154391848132317
[Edit : Véronique me dit qu’elle va s’occuper de la retranscription. Merci à elle 🙂 ]
Voici donc le script de cette intervention (merci Véronique !) :
STATHIS KOUVELAKIS :
APRÈS LA CAPITULATION DE SYRIZA,
QUELLES PERSPECTIVES POUR LA GAUCHE EN EUROPE ?
Le LIEU-DIT
Paris, samedi 4 juin 2016
La convergence de fait entre un mouvement social comme Nuit Debout et l’occupation des places, et les mobilisations syndicales et, c’est plus multiforme, contre la Loi Travail, a présenté des ressemblances évidentes avec le mouvement multiformes aussi tel qu’il s’est exprimé en Grèce pendant les grandes années 2010–2011 de la mobilisation contre les premiers mémorandums. Même si les mémorandums c’était la loi El Khomri à la puissance 10, parce que ce n’était pas simplement un renversement complet du code du travail et de la législation du travail mais un bouleversement de l’ensemble, disons, du contrat social. Donc, ce qui se passe maintenant en Grèce nous informe de l’étape à venir et de la gravité extrême de ce qui est en train de se préparer, et qui affecte, comme cela est devenu beaucoup plus clair, l’ensemble des pays européens.
La deuxième raison c’est que l’expérience grecque s’est soldée par une défaite, et je vais être très clair par rapport à ça, je vais l’expliquer de façon un peu plus détaillée par la suite, nous sommes encore dans l’onde de choc de cette défaite.
Or cette défaite est celle d’un pari politique de très grande ampleur qui a polarisé et suscité l’intérêt des mouvements sociaux des gauches radicales et anticapitalistes de l’Europe et au-delà, pendant toute une période, et, c’est une expérience qui a vu la conjonction d’un pari proprement politique avec Syriza, mais aussi de tout un capital de lutte et de mobilisation sociale.
Donc, il est tout à fait crucial de tirer les leçons justement de ce qui s’est passé en Grèce, précisément pour que les potentialités qui se dégagent maintenant, en France et je l’espère ailleurs, avec la reprise de la mobilisation sociale et du combat de classe, connaissent une issue différente.
Alors, je vais commencer par un premier point qui est tout simplement de vous dire un peu ce qui vient maintenant de se sceller avec les votes du parlement grec au cours du mois de mai.
Au cours du mois de mai, en deux vagues successives, le noyau dur du troisième mémorandum qui a été signé par Tsipras l’été dernier, est entré dans les faits. Alors la façon habituelle dont ceci est présenté est que c’est un nouveau paquet d’austérité, ce qui est bien sûr tout à fait exact. Ce nouveau paquet d’austérité implique une réforme du système des retraites avec la sixième vague de diminution des retraites, et la destruction du système de retraites par répartition et l’entrée dans un système de retraites par capitalisation, et la condamnation à des niveaux de pauvreté et de misère de la grande majorité des retraités grecs. Il se traduit aussi par une nouvelle vague de sur-taxation infligée aux ménages les plus fragiles et les plus modestes et aux classes moyennes aussi, qui sont déjà les plus lourdement taxées en Europe, sans que rien bien entendu ne soit fait pour changer la scandaleuse non-imposition du capital et des privilégiés en Grèce.
Donc tout ça si vous voulez c’est en rajouter une couche par rapport à ce qui a déjà été fait, ceci dans un pays dont le désastre économique et social continue sans aucune discontinuité. Prévision pour cette année : 1,5 % de récession après une récession cumulée de près de 26 à 27 % depuis le début de la crise, supérieure à celle des années trente, je le rappelle. Donc on s’acharne sur un cadavre à l’heure actuelle. Mais ce n’est pas tout, et ce serait même gravement insuffisant de ne voir que ça, et c’est ce sur quoi je veux insister maintenant.
Ce qui se passe en Grèce est une véritable entreprise de néo-colonisation du pays. Je pèse mes mots et je n’exagère en rien ce n’est pas du tout une figure de rhétorique et je vais tenter de vous expliquer pourquoi. La néo-colonisation passe par la combinaison de deux choses. Premièrement un modèle d’accumulation, un modèle économique si vous voulez qui est basé sur ce que David Harvey a appelé l’accumulation par dépossession. C’est-à-dire un système d’accumulation du capital qui ne fonctionne pas simplement et peut-être même pas essentiellement par l’exploitation capitaliste habituelle, celle de la force de travail si vous voulez, mais par la prédation directe de ressources et tout particulièrement de ressources publiques. C’est une notion que David Harvey a développé au cours de son analyse de ce qu’il appelle « le nouvel impérialisme ». Et pour comprendre justement les formes particulièrement violentes et brutales par lesquelles le néo-libéralisme s’est imposé dans les pays du sud. Et c’est précisément ce qui est en train de se passer en Grèce. La Grèce c’est l’application pour la première fois, il n’y a aucune originalité en réalité dans la thérapie de choc qui a été appliquée en Grèce, en tant que telle, c’est des choses que le FMI a fait dans les pays du sud global, la seule originalité c’est que c’est fait dans un pays d’Europe occidentale.
La deuxième chose, qui est tout à fait essentielle d’un point de vue politique, c’est que se trouve démantelé ce qui restait de la souveraineté de l’Etat grec et de ses institutions. Et là la Grèce se trouve maintenant placée sous un régime de tutelle, qui existait déjà bien entendu depuis le début des mémorandums et du règne de la Troïka, mais qui se trouve maintenant verrouillée à un niveau sans précédent. L’Etat grec a été dépouillé de tous ses leviers d’action possibles. Ceci a été constitutionnalisé en quelque sorte par le troisième mémorandum et va peser très lourd comme vous comprenez dans toute la période qui vient et dans la manière dont les rapports de force vont se construire pendant la période qui vient. C’est-à-dire que ce à quoi vont faire face les résistances et les mobilisations populaires pendant la période qui vient c’est quelque chose de bien plus grave, bien plus féroce, bien plus verrouillé que ce qu’on avait jusqu’à présent.
En quoi ce nouveau modèle économique s’applique ? Premièrement, et ça c’était l’une des premières choses que le gouvernement Tsipras II a fait à l’automne dernier, ce qu’on appelle la recapitalisation des banques grecques, c’est-à-dire leur vente à des fonds spéculatifs, après avoir absorbé près de 40 milliards d’argent public, pour lequel le contribuable grec, le peuple grec, s’est endetté, tout cela a été revendu à des prix complètement ridicules à des fonds spéculatifs.
Donc le système bancaire grec qui se trouvait majoritairement sous contrôle étatique en réalité, même si ce contrôle n’était pas actif, avec toutes les injections qui avaient été faites de fonds publics et de recapitalisation, est maintenant entièrement passé dans les mains d’un secteur privé, de fonds privés et de fonds privés étrangers d’ailleurs, donc le secteur financier a été complètement cédé aux vautours de la finance internationale. Et c’est la première grande réforme du gouvernement Tsipras II.
Le deuxième mécanisme c’est celui de la dette. Alors évidemment je ne vais pas développer ce point, (devant Éric [Toussaint], ce serait complètement ridicule, il va vous dire ce qui est nécessaire), ce que je veux simplement souligner, c’est que l’un des bluffs de ce très grand bluffeur et manipulateur qu’est Alexis Tsipras au cours de la dernière période, ça a été de dire, écoutez ok on va passer des mesures douloureuses etc. on peut pas faire autrement, nanani nananère, mais on obtiendra un allègement de la dette. Allègement de la dette, allègement de la dette, la promesse de l’allègement de la dette, on a fait un deal vous verrez, etc. Le résultat est qu’on a eu ces mesures d’austérité féroces et tout le reste, les réformes de structure dont je vais parler, et évidemment aucun allègement sur la dette, une vague promesse que la discussion va reprendre à partir de 2018 (Éric nous en dira davantage).
Donc deuxième crime. Moi je considère que tout ça c’est des crimes. Et je ne le considère pas personnellement, Éric pourra nous en dire davantage, c’est des choses qui sont passibles pénalement, pour tous les gouvernements antérieurs, et évidemment Syriza a été le premier à le dire, et maintenant pour le gouvernement Syriza II.
Troisième chose, les privatisations. Alors là on entre dans quelque chose qui est du jamais vu. Ce qui a été voté par le Parlement grec c’est la constitution d’une agence nouvelle, qui vient se substituer à l’agence existante des privatisations, et qui par rapport à l’ancienne, qui s’appelait Taiped, présente trois différences.
Premièrement, c’est une agence qui a une structure de société privée, ce n’est pas une agence publique, même d’un point de vue formel, légal.
Deuxièmement, elle a été créée pour une durée de 99 ans, contre 6 pour l’agence qui existait déjà.
Troisièmement, sont passés sous son contrôle la to-ta-li-té des actifs publics de l’Etat grec contre 25 actifs de l’agence qui existait jusqu’à présent. Je dis bien la totalité des actifs de l’Etat grec. La première liste provisoire est de 11.900 actifs.
C’est le plus gigantesque transfert de propriété jamais opéré dans un pays européen de l’ouest, je mets ici évidemment sous une catégorie séparée les pays des anciens régimes du socialisme dit réel, c’est l’opération du plus gigantesque transfert de propriété jamais opéré dans un pays occidental (il y avait un article du Guardian d’ailleurs très explicite sur cette question).
Que va faire cette agence ? Elle va vendre tout jusqu’à hauteur des 50 milliards d’euros, c’est ça l’objectif, dont les recettes seront consacrées à 50% pour la consolidation des banques qui sont passées sous le contrôle du secteur privé, à hauteur de 25 % pour le remboursement de la dette, et à hauteur de 25% pour des investissements non spécifiés. Le Conseil d’Administration de cette nouvelle société, entièrement indépendant de tout contrôle politique, est fait de 5 membres, 3 sont nommés par le gouvernement grec sous condition explicite d’avoir reçu l’approbation préalable de la Troïka, les deux autres sont nommés directement par la Troïka. Et c’est pour 99 ans. La presse économique internationale a immédiatement interprété cette durée totalement incroyable, c’est du jamais vu, dans aucun pays quelle que soit l’étendue des conditions de privatisations n’a été créé une agence qui fonctionne selon ces principes, comme un désaveu de toute « confiance » des institutions financières internationales par rapport à la Grèce.
Cerise sur le gâteau, dans le modèle économique, pour débloquer une tranche supplémentaire de prêt, qui est due en septembre, en plus des 7 milliards qui vont être débloqués dans les jours qui viennent, la Troïka a demandé tout un nombre de conditions supplémentaires, concernant les taxes etc., mais le noyau dur c’est une réforme du code du travail, et ceci alors que les conventions collectives en Grèce ont déjà été supprimées, ça n’existe plus, le seul verrou législatif qui existe c’est le Smic, alors vous vous demandez si le système des conventions collectives a été démantelé qu’est ce qui reste à démanteler ? Eh bien ce qui reste à démanteler c’est : la libération complète des licenciements collectifs, la restriction du droit de grève, qui est pour le moment le plus favorable en Europe, la diminution de la protection dont jouissent les syndicalistes et les délégués syndicaux et la diminution drastique du financement public qui est destiné aux syndicats.
Voilà ce qui est au menu des négociations d’ici le mois de septembre. À ceci s’ajoutent les réformes de structure. Les réformes de structure sont essentiellement au nombre de deux. Premièrement a été créé un Conseil de discipline fiscale, depuis l’automne dernier, composé de sept membres, là encore dont la nomination se fait par le ministère des finances mais qui exige l’accord préalable de la Troïka. Quelle est la tâche de ce Conseil ? La tâche de ce Conseil, qui était déjà prévue en tant que telle par le mémorandum, est d’activer des coupes budgétaires automatiques si les objectifs d’excédents budgétaires ne sont pas atteints, donc s’il y a un soupçon qu’ils ne seront pas atteints. Or dans une économie qui est en récession pour la septième année consécutive, et malgré un véritable écrasement de la dépense publique, l’objectif qui est fixé est un excédent budgétaire primaire, c’est-à-dire avant le remboursement de la dette, de 3,5 % du PIB pour à l’horizon 2018.
C’est des choses qu’aucune économie au monde même les plus puissantes n’est en mesure d’assurer. Donc il est certain d’avance que cet objectif complètement irréaliste ne va pas être tenu et les coupes budgétaires seront activées par le mécanisme qui vient d’être voté maintenant et donc juridiquement verrouillé par le Parlement grec de ce que les grecs appellent « κόπτης [kóptis] » ça veut dire au sens strict « le coupeur », c’est-à-dire c’est ce mécanisme automatique qui va faire les coupes sans même que les coupes passent par un vote parlementaire, par un simple décret. Donc dépossession complète vraiment de ce qui pouvait exister encore de contrôle de la politique, de ce qui restait de contrôle de la politique macroéconomique, bon en réalité très peu vu les mémorandums.
Deuxième réforme de structure, le Secrétariat d’Etat aux revenus, ce qu’on appellerait ici le Trésor Public je pense, est devenu complètement indépendant. Alors il était déjà autonome, c’est-à-dire qu’il pouvait décider de façon propre de son budget et de ses actions. Ça c’était une condition qui avait été posée dès le premier mémorandum et c’est l’un des obstacles d’ailleurs auxquels le premier gouvernement Syriza a dû faire face. La vice-ministre de l’économie, Nadia Valavani, a écrit des textes extrêmement intéressants qui racontent les démêlés justement du ministère pendant les premiers mois du premier gouvernement Syriza quand il a essayé de passer un minimum de mesures favorables aux couches populaires. Mais là ça devient une agence complètement indépendante dont les décisions ont valeur de décrets ministériels, qui a l’exclusivité de l’interprétation de la législation en matière fiscale, qui est contrôlée directement par des gens approuvés par la Troïka, et en réalité ça veut dire que la Troïka contrôle directement la collecte des taxes, de l’impôt et du revenu de l’Etat grec.
Donc on contrôle les taxes, on contrôle les dépenses, le secteur financier est parti, la politique monétaire est à Frankfort. Qu’est-ce qui reste ? Il reste que la Grèce est devenue un grand Kosovo. Voilà, en gros. Et cela se fait sous un gouvernement, Syriza, qui dans les votes parlementaires n’a eu qu’une seule perte en terme de voix et de députés c’est-à-dire moins que ce que le Pasok et la Nouvelle Démocratie avaient subi comme pertes au parlement de leur propre groupe parlementaire quand ils étaient au gouvernement et faisaient passer des mesures similaires.
Intervention d’une personne dans le public : « Ça veut dire qu’il n’y a qu’un député qui les a abandonnés ? »
Kouvelakis répond et reprend : Un seul oui, une seule députée, qui a démissionné. Elle a même, démissionné ce qui veut dire que son siège a été rempli par le suppléant qui est un loyaliste elle n’a même pas pris la décision disons de garder son siège et de continuer à avoir une présence indépendante au Parlement (elle a voté contre deux mesures principales, c’était pas contre l’ensemble du paquet).
Alors la deuxième chose maintenant, et je vais conclure cette présentation par cela : quel est l’état d’esprit qui existe en Grèce à l’heure actuelle ?
Il ne faut pas se raconter des histoires, on est dans l’onde de choc de la défaite. Les réactions sociales qu’il y a eu, des réactions sur le fond social en termes de mobilisations ou de grèves, étaient les plus faibles qu’on ait vues depuis le début de la période des mémorandums. Alors bien sûr on peut chercher des explications, l’état délabré du mouvement syndical, les choix qui sont faits par des directions syndicales pour leur majorité corrompues qui, là, ont été aidées par la tactique à la fois attentiste et extrêmement sectaire du parti communiste. Mais ce qui à mon avis est encore plus important que cela c’est le climat de démoralisation qui existe dans la société. Les gens ont reçu un énorme coup de massue sur la tête et l’état d’esprit qui règne c’est que quoi qu’on fasse, quoi qu’on vote, à la fin on se retrouve avec un mémorandum et il n’y a aucune issue qui apparaît à ce tunnel.
Et il faut bien comprendre que l’issue n’apparaît pas à ce tunnel car la barre est placée toujours à ce niveau-là, c’est une perspective, si perspective alternative il y a, ce n’est pas pour construire une petite force minoritaire qui va continuer à accumuler des forces, même si en réalité on ne peut pas faire autre chose pour l’instant que ça, mais pour la société ce qu’elle ne voit pas c’est quelque chose qui trace une véritable voie alternative. Et cela veut dire que c’est un constat d’échec pour l’ensemble des forces qui ont lutté y compris celles qui ont lutté contre le tournant et la capitulation de Syriza, et on pourra revenir, pendant la discussion si vous voulez, sur les raisons plus profondes.
Alors ma dernière remarque de conclusion sera la suivante : je crois que la vraie discussion qui a commencé en Europe c’est celle sur ce qu’on appelle les plans B, les plans alternatifs. Alors vous savez qu’il y a déjà eu deux initiatives, l’une à Paris, l’autre à Madrid, Éric a participé aux deux il pourra nous en dire davantage. L’idée de ce plan B pour l’Europe c’est que il faut, si vous voulez, des plans B qui soient adaptés aux diverses réalités et qui tirent la leçon de ce qui s’est passé en Grèce. C’est-à-dire il est absolument clair que si on s’engage dans une perspective de rupture avec l’austérité et avec le néolibéralisme sans avoir prévu les moyens concrets pour mener la confrontation avec les institutions européennes, avec l’Union Européenne, y compris d’ailleurs avec l’euro, avant tout d’ailleurs avec l’euro pour les pays qui en font partie, et avec les classes dominantes au niveau national, ces expériences n’auront pas d’issue différente que celle de la Grèce. Et par rapport à ça, c’est bien sûr insuffisant comme conclusion mais c’est à mon avis le point de départ obligé pour toute réflexion, il faut absolument abandonner les illusions et les discours sur changer l’actuelle Union Européenne, réformer l’actuelle Union Européenne, changer graduellement le rapport de force, rejeter les gens qui proposent des solutions de rupture comme soit disant des nationalistes ou des gens qui veulent le repli national. Tout ceci en Grèce a fait la preuve du fait qu’il ne pouvait conduire qu’au désastre. C’est un discours de l’impuissance politique. La rupture avec cela est une condition absolument pas suffisante mais tout à fait nécessaire pour engager une réflexion sur le sujet.
Mais il faut aller au-delà. Et l’Union Européenne ce n’est pas simplement l’euro et l’utilisation politique de l’euro comme cela a été fait en Grèce pour briser tout gouvernement national qui veut rompre avec les politiques d’austérité. L’Union Européenne c’est un modèle économique qui produit de la polarisation en son sein, qui produit des divergences et des polarisations croissantes entre les pays dits du centre et les pays de la périphérie. Et il y a deux périphéries en réalité en Europe, il y a la périphérie du sud européen au sens où je parlais auparavant et il y a la périphérie de l’est européen également. Et l’Union Européenne ce n’est pas simplement ce qui se passe à l’intérieur de l’Union Européenne, c’est aussi ce qui se passe à l’extérieur de l’Union Européenne. On ne peut pas ici ne pas appeler les choses par leur nom. L’Union Européenne n’est pas simplement une construction qui verrouille le néolibéralisme. Elle n’est pas simplement une construction qui détruit la démocratie, dépossède les peuples et les citoyens de leurs moyens de contrôle et d’action, à quelque niveau que ce soit. C’est une machine impérialiste. Ce n’est pas un impérialisme unifié bien sûr. Il n’y a pas un impérialisme européen en tant que tel. Mais la France est un pays impérialiste. Et François Hollande a été le président le plus va-t-en-guerre qu’on a vu pendant ces dernières décennies. François Hollande est dans la continuité de Guy Mollet, Emmanuel Valls évidemment de Jules Moch. La Grande-Bretagne aussi est un pays impérialiste. Et l’Allemagne est un pays qui n’a pas un impérialisme militaire mais qui a un impérialisme économique, et pour laquelle la construction européenne est précisément le cadre où se déploie son impérialisme économique. Et l’euro a bien entendu été conçu dans cette perspective-là.
Mais l’Union Européenne fonctionne comme un impérialisme unifié sur au moins un niveau, et je terminerai vraiment là par ça.
C’est la construction de l’Europe forteresse, qui est l’autre face justement de la construction européenne. Et, comme cela était tout à fait prévisible, la capitulation complète de Tsipras, au niveau du mémorandum, au niveau du néolibéralisme, au niveau des politiques d’austérité, au niveau de la démocratie, a été suivie par sa bruyante approbation de l’accord inique qui a été signé entre l’Union Européenne et la Turquie, qui empêche les réfugiés d’accéder à l’Europe et qui transforme la Grèce en garde-chiourme de la forteresse européenne.
Parce que c’est ça le rôle qui est dévolu aux néo-colonisés. C’est d’accepter docilement le sort qui leur est fait et de servir de flics de la forteresse, pour empêcher que les va-nu-pieds du sud global atteignent les pays du centre impérialistes, prospères et repus dans leur richesse.
Et par rapport à cela il faut souligner, et c’est de mon côté la seule nouvelle positive que j’ai eu de la Grèce à une échelle significative, que la société grecque a réagi de manière positive et solidaire, dans sa majorité bien sûr, par rapport à cette situation. Je dirais que c’est une solidarité des humbles, c’est une solidarité de ceux qui se sentent eux aussi écrasés, qui n’ont pas peut-être perdu la mémoire qu’une partie importante de la population grecque actuelle vient également de vagues de réfugiés, a vécu la situation de réfugiés, leurs ancêtres ont vécu la situation de réfugiés en 1922, et a donc refusé de suivre les discours racistes, xénophobes, qui n’ont pas manqué, mais ce n’est pas eux qui l’ont emporté dans la réaction de la société.
Et je pense que cette réaction solidaire de la société montre qu’il reste des réflexes profonds qui pour le moment ne peuvent pas trouver une voie collective et articulée pour s’exprimer mais qui dans l’avenir constitueront le socle de la résistance et de la mobilisation populaire à venir.
Stathis KOUVELAKIS.
[Édifiant] Situation économique de la Grèce avant son adhésion à la CEE
httpv://www.youtube.com/watch?v=gU1XL5-gOkU
Info signalée par les-crises.fr
[Trahisons politiciennes] Chirac sur l’Europe : constance et cohérence
httpv://www.youtube.com/watch?v=qYYbE4iPK_M
Dans ce domaine comme ailleurs, il conviendrait de faire un peu de thermodynamique pour comprendre ce qu’est un système.
Une question pour illustrer : « un réfrigérateur, ça refroidit ? » ?
Oui, bien sûr !… un frigo sert à refroidir ! Enfin ce qui est à l’intérieur, mais globalement un frigo ça réchauffe !…
Il serait temps que les occidentaux comprennent, sur le même principe de la compartimentation, du cloisonnement (des murs, entre les USA et le Mexique, entre Israël et la Palestine, etc.)… que les « valeurs occidentales » évoquées par Chirac, comme la paix vantée pour justifier la construction européenne, loin de produire globalement la paix ou le progrès, engagent le monde vers la guerre et le chaos.
Alors quand on est « dans le frigo », on peut faire semblant d’y croire, si les cloisons sont joliment peintes ou si nos bons maitres ont ouvert des fenêtres pour qu’on voit loin, mais la réalité, malgré les bonnes intentions, les ONG et autres œillères que nous nous mettons, c’est que notre mode de vie produit inexorablement la compétition dans toutes ses formes, dont celle, ultime, qui vient toujours : la guerre, celle que nous avons ingénieusement repoussée hors de nos frontières, mais qui revient comme un boomerang, dans sa modalité sale : le terrorisme.
[Depuis toujours, les pires ennemis de l’humanité sont bien les banques, repaires d’usuriers]
Banque mondiale, une zone de non-droit protégée par des juges
23 juillet par Renaud Vivien
Un tribunal de Washington a autorisé la Banque mondiale à ne pas répondre de ses actes devant la justice étasunienne |1|. Les plaignants indiens ont déjà fait appel de cette décision qui confère à la Banque mondiale une immunité qui la place de facto au dessus des lois.
Le litige oppose des pêcheurs et des paysans indiens à la Société financière internationale (SFI) – la branche de la Banque mondiale chargée de soutenir le secteur privé – qui a financé à hauteur de 450 millions de dollars la construction d’une centrale à charbon (dans l’État fédéré de Gujarat situé dans la partie ouest de l’Inde). Les plaignants demandent aux juges de Washington, où se trouve le siège de la Banque mondiale, de condamner la SFI (Banque mondiale) à réparer le préjudice social et environnemental causé par cette centrale de charbon construite près des terres où ils vivent et travaillent. Les conséquences néfastes sont multiples : dégradation de l’air et de l’écosystème marin, empoisonnement de l’eau, déplacement de populations, destruction du mode de vie des communautés locales.
Ce qui est reproché précisément à la Banque mondiale est « sa conduite irresponsable et négligente » à toutes les étapes du projet. La SFI a non seulement financé la centrale à charbon mais a également fourni des conseils et supervisé l’ensemble de sa construction. Pourtant, dès le début de ce projet, la SFI a elle-même reconnu qu’il comportait des risques importants et que ses impacts néfastes étaient potentiellement irréversibles sur les communautés locales et leur environnement. Une plainte en interne a ensuite été déposée par les paysans et pêcheurs indiens auprès du service de médiation de la Banque mondiale : the Compliance Advisor Ombudsman (CAO). Ce dernier a donné raison aux communauté locales dans un rapport concluant que la SFI n’a pas respecté ses propres procédures de sauvegarde environnementale et sociale. Mais la banque a décidé de rejeter ces conclusions et de poursuivre la projet.
Cette affaire est loin d’être un cas isolé. La Banque mondiale a admis en mars 2015 que « la supervision de ces projets était souvent peu ou non documentée, que l’application des mesures de protection ne faisait pas l’objet du suivi nécessaire et que le risque élevé de certains projets pour les populations environnantes n’avait pas été suffisamment évalué » |2|. Selon une étude d’OXFAM, la SFI « n’a qu’une connaissance limitée des résultats pour les bénéficiaires finaux |3| » car l’évaluation des projets qu’elle finance se base uniquement sur des chiffres transmis par l’institution financière cliente et intermédiaire de la SFI.
Comme l’a souligné le Conseil consultatif belge sur la cohérence des politiques |4|, plusieurs projets financés par la SFI se sont traduits par de graves infractions aux droits humains : accaparement des terres, répression, arrestations arbitraires ou meurtres afin de faire taire les mouvements de protestation contre certains projets financés par la banque. Le cas de la l’entreprise Dinant au Honduras illustre bien cette situation |5|. En 2010, Dinant avait été impliquée dans un conflit foncier au cours duquel six paysans avaient été abattus par les forces de sécurité privée de la firme. L’enquête subséquente du CAO de la Banque mondiale a démontré que la SFI était au courant des problèmes entourant les activités de Dinant. Mais aucune condamnation n’a suivi. Citons également l’enquête de terrain réalisée dans quatorze pays, couplée à un travail d’analyse de milliers de rapports par le consortium international de journaliste d’investigation (ICIJ) |6|, qui révèle que les projets financés par la Banque mondiale ont contraint près de 3,4 millions de personnes à quitter leur domicile depuis 2004, parfois avec le recours des policiers armés chargés de les expulser.
Constatant toutes ces violations, le Rapporteur spécial de l’ONU sur les droits de l’homme et l’extrême pauvreté Philip Alston a présenté devant l’Assemblée générale de l’ONU le 4 août 2015 un rapport cinglant consacré à la Banque mondiale, affirmant que « la Banque mondiale s’assied sur les droits humains, elles les considère davantage comme un maladie infectieuse que comme des valeurs et des obligations universelles |7| ».
Ce comportement de la banque est en total décalage avec ses obligations juridiques. En effet, la Banque mondiale a non seulement l’obligation de respecter ses règles internes (comme les procédures de sauvegarde environnementale et sociale) mais aussi toute règle pertinente du droit international général incluant les instruments de protection de droits humains. Comme l’a rappelé récemment le Comité de l’ONU pour les droits économiques, sociaux et culturels dans une déclaration officielle datée du 24 juin 2016 |8|, la Banque mondiale comme toute autre organisation internationale doit impérativement respecter la Déclaration universelle des droits de l’homme, les principes généraux du droit international et les Pactes de 1966 sur les droits humains |9|. De plus, la Banque mondiale et le Fonds monétaire international (FMI), en tant qu’agences spécialisées de l’ONU, sont liés par les objectifs et principes généraux de la Charte des Nations Unies, parmi lesquels figurent le respect des droits humains et des libertés fondamentales |10|. Par conséquent, il leur est interdit d’imposer des mesures qui empêchent les États de se conformer à leurs propres obligationss nationales et internationales en matière de droits humains |11|.
La Banque mondiale agit donc dans l’illégalité lorsqu’elle finance des projets, tels que la centrale à charbon en Inde, qui ont des conséquences préjudiciable sur les droits humains et l’environnement mais aussi lorsqu’elle fixe avec le FMI des conditionnalités à leurs prêts, qui vont à l’encontre des droits humains. Le droit à l’eau est, par exemple, régulièrement violé par les privatisations imposées dans ce secteur tout comme le droit à la santé est bafoué par les réductions de dépenses publiques dans la santé. Autre exemples, les conditionnalités visant la dérégulation du marché du travail et le démantèlement des système publics de protection sociale vont directement à l’encontre du droit au travail et à la protection sociale. Ces droits sont aussi sérieusement mis à mal dans le rapport « Doing Business |12| » publié tous les ans par la banque. Dans ce rapport, tous les États sont évalués et classés en fonction de la facilité à y « faire des affaires », sur base d’une batterie d’indicateurs comme l’indicateur « employing workers » qui considère que toute forme de législation protégeant les travailleurs est un obstacle au « business » |13|. Dans le secteur agricole, l’amélioration du « climat des affaires » encourage fréquemment l’accaparement des terres. A titre d’exemple, les réformes ayant permis aux Philippines d’améliorer sa position dans ce classement de la Banque mondiale ont permis aux « investisseurs » dans ce pays de développer des monocultures au préjudice des communautés locales, qui ont été expulsées de leurs terres ancestrales. Dans le domaine agricole toujours, la Banque mondiale publie un autre rapport intitulé « Enabling the Business of Agriculture |14| » qui encourage les gouvernements à privatiser des filières agricoles au détriment notamment des petits producteurs |15|.
Alors qu’un principe élémentaire du droit est de réparer le dommage qu’on a causé du fait de sa propre faute, les juges de Washington ont rendu une décision qui va à l’encontre de ce principe puisqu’ils considèrent que la Banque mondiale jouit d’une immunité en tant qu’organisation internationale. Ce qui lui garantit une impunité pour toutes ses actions qui violeraient les droits des populations. Pire, plus ses actions illégales sont nombreuses et plus les juges étasuniens la protègent, au motif que la multiplication d’actions en justice contre la banque risquerait d’entraver le bon déroulement de ses activités. C’est ce qu’indique le raisonnement des juges de Washington.
En effet, lorsque les avocats des plaignants indiens invoquent à juste titre l’article 7 section 3 |16| des statuts de la Banque mondiale qui prévoit explicitement que la banque peut être poursuivie en justice sous certaines conditions, les juges rétorquent que cette possibilité de poursuivre en justice ne vaut que dans les cas où ces poursuites sont dans l’intérêt de la banque ! Selon les juges, il faut appliquer cet article 7 section 3 en tenant compte de l’article 7 section 1 des statuts, qui indique que la banque a renoncé à son immunité dans le but de remplir ses fonctions |17|. Ce qui fait dire aux juges que la Banque mondiale a eu l’intention de lever son immunité uniquement dans les cas où cela lui profite |18|. Lorsque les avocats des paysans indiens répondent que cette action en justice aura comme effet positif d’inciter la Banque mondiale à respecter ses propres procédures de sauvegardes sociales et environnementales et donc à agir de façon responsable à l’avenir, le tribunal rejette cet argument en disant que le « bénéfice » pour la banque est marginal comparé aux « coûts substantiels » qu’entraînerait la levée de cette immunité |19|. Accepter de juger ce cas de violation de droits humains aurait de trop lourdes conséquences pour la banque car cela ouvrirait la « boîte de pandore » avec d’autres actions en justice contre elle. Rappelons, en effet, que la Banque mondiale tout comme le FMI n’ont jamais eu à rendre de compte devant la justice, en plus de soixante ans d’existence ?
Alors que plusieurs rapports épinglent les multiples violations de droits humains par la Banque mondiale – ce qui devrait logiquement inciter les tribunaux à (enfin) sanctionner ces violations – les juges étasuniens font l’inverse en renforçant la Banque mondiale comme « zone exempte de droits de l’homme » comme l’a qualifiée le Rapporteur spécial de l’ONU sur les droits de l’homme et l’extrême pauvreté |20|.
Face à ce jugement, les communautés indiennes affectées ne baissent pas les bras et ont déjà fait appel. Le CADTM les soutient pleinement dans leur lutte et appelle à multiplier les procès à chaque fois que cette banque cause des dommages à la population et l’environnement. L’impunité de la Banque mondiale n’a que trop duré.
Notes
|1| Jam v. International Finance Corporation, No. 1:15-cv-00612.https://www.earthrights.org/sites/default/files/documents/jam_v_ifc_-_order_granting_mtd.pdf
|2| http://www.banquemondiale.org/fr/news/press-release/2015/03/04/worldbank-shortcomings-resettlement-projects-plan-fix-problems
|3| Oxfam (2015). The suffering of the others, Oxford : Oxfam GB, p. 2.https://www.oxfam.org/en/research/suffering-others
|4| Voir son avis portant sur « le mandat de la Belgique au sein de la Banque mondiale » accessible surhttp://www.ccpd-abco.be/. Le Conseil consultatif sur la cohérence des politiques a été créé en avril 2014. Il a pour mission principale de donner des avis aux autorités fédérales belges pour plus de respect de la cohérence des politiques en faveur du développement. Ces avis sont préparés par des experts du monde syndical, des ONG et du monde académique réunis dans une ‘commission thématique’. Ils sont ensuite étudiés et validés par le Conseil consultatif sur la cohérence des politiques présidé par Olivier De Schutter. Le CADTM Belgique a participé à l’élaboration de cet Avis sur la Banque mondiale.
|5| Cette société hondurienne productrice d’huile de palme était le troisième client de la banque hondurienne Ficohsa, dans laquelle la SFI a investi 70 millions de dollars en 2011.
Lire l’article « Comment la Banque mondiale finance le massacre de dizaines de paysans »http://www.cncd.be/Comment-la-Banque-mondiale-finance
|6| http://www.lesoir.be/852058/article/actualite/monde/2015–04-15/enquete-internationale-34-millions-personnes-expulsees-par-banque-mondiale
|7| http://www.un.org/en/ga/search/view_doc.asp?symbol=A/70/274
Lire aussi l’article « La Banque mondiale sous les feux de la critique du Rapporteur Spécial de l’ONU sur l’extrême pauvreté et les droits humains » http://www.cadtm.org/spip.php?page=imprimer&id_article=12427#nb1
|8| E/C.12/2016/1 « Public debt, austerity measures and the International Covenant on Economic, Social and Cultural Rights ». Statement by the Committee on Economic, Social and Cultural Rights :
Extrait : « The Lenders themselves have obligations under general international law. As any other subjects of international law, international financial institutions and other international organisations are ’bound by any obligations incumbent upon them under general rules of international law, under their constitutions or under international agreements to which they are parties’.They are therefore bound to comply with human rights, as listed in particular in the Universal Declaration of Human Rights, that are part of customary international law or of the general principles of law, both of which are sources of international law »
https://xa.yimg.com/kq/groups/2743668/1005740263/name/Conditional%20lending%20E_C-12_2016_1_8064_E%2Epdf
|9| Cour internationale de justice, Interprétation de l’accord du 25 mars 1951 entre l’OMS et l’Égypte, avis consultatif du 20 décembre 1980, CIJ Rec. 1980, para 37, pp. 89–90.
|10| Charte des Nations Unies, articles 57, 63, 1(3) et 55(3).
|11| Commission du droit international. (2011). Projet d’articles sur la responsabilité des organisations internationales, adopté par la CDI à sa 63e session (A/66/10, para. 87), art. 16.
|12| http://www.doingbusiness.org/
|13| http://www.cncd.be/Doing-Business-un-rapport-au
|14| http://eba.worldbank.org/
|15| Letter from the UN Rapporteur on Right to food and the UN Independent Expert on foreign debt to World Bank to
President World Bank, 9 octobre 2012.
|16| « La Banque ne peut être poursuivie que devant un tribunal ayant juridiction sur les territoires d’un État membre où elle possède un bureau, a désigné un agent chargé de recevoir les significations ou notifications de sommations ou a émis ou garanti des titres. Aucune action judiciaire ne pourra cependant être intentée par des États membres ou par des personnes agissant pour le compte desdits États, ou faisant valoir des droits cédés par ceux-ci. Les biens et avoirs de la Banque où qu’ils soient situés et quel qu’en soit le détenteur, seront à l’abri de toute forme de saisie, d’opposition ou d’exécution tant qu’un jugement définitif n’aura pas été prononcé contre la Banque ».http://web.worldbank.org/WBSITE/EXTERNAL/ACCUEILEXTN/EXTABTUSFRENCH/0„contentMDK:20405772 menuPK:866224 pagePK:64094163 piPK:64094165 theSitePK:328614,00.html#article7section7
|17| « En vue de mettre la Banque en mesure de remplir les fonctions qui lui sont confiées, le statut juridique, les immunités et privilèges définis dans le présent article seront accordés à la Banque sur les territoires de chaque Etat membre ».http://web.worldbank.org/WBSITE/EXTERNAL/ACCUEILEXTN/EXTABTUSFRENCH/0„contentMDK:20405772 menuPK:866224 pagePK:64094163 piPK:64094165 theSitePK:328614,00.html#article7section7
voir également le jugement « Mendaro contre la Banque mondiale », US Court of Appeals, D.C Cir., Sept. 27, 1983 ( 717 F.2d 610)
|18| Extrait du jugement : ‘when the benefits accruing to the organization as a result of the waiver would be substantially outweighe d by the burdens caused by judicial scrutiny of the organization’s discretion to select and administerts programs, it is logically less probable that the organization actually intended to waive its immunity.’” (…) The relevant question is thus “whether a waiver of immunity to allow this type of suit, by this type of plaintiff, would benefit the organization over the long term.”
https://www.earthrights.org/sites/default/files/documents/jam_v_ifc_-_order_granting_mtd.pdf
|19| Extrait du jugement : « This Court will not completely dismiss the possibility that a waiver could provide some incentive for IFC to adhere more scrupulously to its policies, over and above the pressure already applied by the CAO. But that marginal benefit must be weighed against the relevant costs which, in suits like this by these kinds of plaintiffs ‚remain quite substantial. In the Court’s view, for all the reasons reviewed above, suits like plaintiffs’ are likely to impose considerable costs upon IFC without providing commensurate benefits. Hence, IFC has not waived its immunity to this suit ».
https://www.earthrights.org/sites/default/files/documents/jam_v_ifc_-_order_granting_mtd.pdf
|20| http://www.un.org/press/fr/2015/agshc4142.doc.htm
Auteur.e
Source : CADTM
[Inévitable hubris (démesure) des pouvoirs sans limites]
Israël autorise la prison pour actes « terroristes » à partir de 12 ans :
http://www.europe1.fr/international/israel-autorise-la-prison-pour-actes-terroristes-a-partir-de-12-ans-2812930
Source : Europe1, via rezo.net
…
L’élection donne le pouvoir aux pires.
Donc, les pires gouvernent.
Et ça s’aggrave.
Et la solution ne viendra pas d’eux. Ceux qui se considèrent comme « les élus » SONT le plus grave problème de l’humanité.
Il va falloir commencer à vous occuper vous-même de vos affaires, si vous ne voulez pas finir enfermé‑e dans un camp de concentration.
Écoutez bien (et notez sur un papier) le détail expliqué (par Stathis KOUVELAKIS) de ce qui est désormais infligé aux Grecs : ça nous pend au nez (parce qu’on regarde trop la télé et qu’on se fait intoxiquer).
« Un homme enchaîné sait qu’il aurait dû agir plus tôt, car sa capacité à influer sur l’action de l’État touche à sa fin. »
Julian Assange (fondateur de Wikileaks), dans « L’art de la fuite. Des effets non-linéaires des fuites sur les systèmes de gouvernance injustes » (2006).
https://old.chouard.org/Europe/precieuses_pepites.pdf
Voici donc le script de cette intervention (merci Véronique !) :
STATHIS KOUVELAKIS :
APRÈS LA CAPITULATION DE SYRIZA,
QUELLES PERSPECTIVES POUR LA GAUCHE EN EUROPE ?
Le LIEU-DIT
Paris, samedi 4 juin 2016
La convergence de fait entre un mouvement social comme Nuit Debout et l’occupation des places, et les mobilisations syndicales et, c’est plus multiforme, contre la Loi Travail, a présenté des ressemblances évidentes avec le mouvement multiformes aussi tel qu’il s’est exprimé en Grèce pendant les grandes années 2010–2011 de la mobilisation contre les premiers mémorandums. Même si les mémorandums c’était la loi El Khomri à la puissance 10, parce que ce n’était pas simplement un renversement complet du code du travail et de la législation du travail mais un bouleversement de l’ensemble, disons, du contrat social. Donc, ce qui se passe maintenant en Grèce nous informe de l’étape à venir et de la gravité extrême de ce qui est en train de se préparer, et qui affecte, comme cela est devenu beaucoup plus clair, l’ensemble des pays européens.
La deuxième raison c’est que l’expérience grecque s’est soldée par une défaite, et je vais être très clair par rapport à ça, je vais l’expliquer de façon un peu plus détaillée par la suite, nous sommes encore dans l’onde de choc de cette défaite.
Or cette défaite est celle d’un pari politique de très grande ampleur qui a polarisé et suscité l’intérêt des mouvements sociaux des gauches radicales et anticapitalistes de l’Europe et au-delà, pendant toute une période, et, c’est une expérience qui a vu la conjonction d’un pari proprement politique avec Syriza, mais aussi de tout un capital de lutte et de mobilisation sociale.
Donc, il est tout à fait crucial de tirer les leçons justement de ce qui s’est passé en Grèce, précisément pour que les potentialités qui se dégagent maintenant, en France et je l’espère ailleurs, avec la reprise de la mobilisation sociale et du combat de classe, connaissent une issue différente.
Alors, je vais commencer par un premier point qui est tout simplement de vous dire un peu ce qui vient maintenant de se sceller avec les votes du parlement grec au cours du mois de mai.
Au cours du mois de mai, en deux vagues successives, le noyau dur du troisième mémorandum qui a été signé par Tsipras l’été dernier, est entré dans les faits. Alors la façon habituelle dont ceci est présenté est que c’est un nouveau paquet d’austérité, ce qui est bien sûr tout à fait exact. Ce nouveau paquet d’austérité implique une réforme du système des retraites avec la sixième vague de diminution des retraites, et la destruction du système de retraites par répartition et l’entrée dans un système de retraites par capitalisation, et la condamnation à des niveaux de pauvreté et de misère de la grande majorité des retraités grecs. Il se traduit aussi par une nouvelle vague de sur-taxation infligée aux ménages les plus fragiles et les plus modestes et aux classes moyennes aussi, qui sont déjà les plus lourdement taxées en Europe, sans que rien bien entendu ne soit fait pour changer la scandaleuse non-imposition du capital et des privilégiés en Grèce.
Donc tout ça si vous voulez c’est en rajouter une couche par rapport à ce qui a déjà été fait, ceci dans un pays dont le désastre économique et social continue sans aucune discontinuité. Prévision pour cette année : 1,5 % de récession après une récession cumulée de près de 26 à 27 % depuis le début de la crise, supérieure à celle des années trente, je le rappelle. Donc on s’acharne sur un cadavre à l’heure actuelle. Mais ce n’est pas tout, et ce serait même gravement insuffisant de ne voir que ça, et c’est ce sur quoi je veux insister maintenant.
Ce qui se passe en Grèce est une véritable entreprise de néo-colonisation du pays. Je pèse mes mots et je n’exagère en rien ce n’est pas du tout une figure de rhétorique et je vais tenter de vous expliquer pourquoi. La néo-colonisation passe par la combinaison de deux choses. Premièrement un modèle d’accumulation, un modèle économique si vous voulez qui est basé sur ce que David Harvey a appelé l’accumulation par dépossession. C’est-à-dire un système d’accumulation du capital qui ne fonctionne pas simplement et peut-être même pas essentiellement par l’exploitation capitaliste habituelle, celle de la force de travail si vous voulez, mais par la prédation directe de ressources et tout particulièrement de ressources publiques. C’est une notion que David Harvey a développé au cours de son analyse de ce qu’il appelle « le nouvel impérialisme ». Et pour comprendre justement les formes particulièrement violentes et brutales par lesquelles le néo-libéralisme s’est imposé dans les pays du sud. Et c’est précisément ce qui est en train de se passer en Grèce. La Grèce c’est l’application pour la première fois, il n’y a aucune originalité en réalité dans la thérapie de choc qui a été appliquée en Grèce, en tant que telle, c’est des choses que le FMI a fait dans les pays du sud global, la seule originalité c’est que c’est fait dans un pays d’Europe occidentale.
La deuxième chose, qui est tout à fait essentielle d’un point de vue politique, c’est que se trouve démantelé ce qui restait de la souveraineté de l’Etat grec et de ses institutions. Et là la Grèce se trouve maintenant placée sous un régime de tutelle, qui existait déjà bien entendu depuis le début des mémorandums et du règne de la Troïka, mais qui se trouve maintenant verrouillée à un niveau sans précédent. L’Etat grec a été dépouillé de tous ses leviers d’action possibles. Ceci a été constitutionnalisé en quelque sorte par le troisième mémorandum et va peser très lourd comme vous comprenez dans toute la période qui vient et dans la manière dont les rapports de force vont se construire pendant la période qui vient. C’est-à-dire que ce à quoi vont faire face les résistances et les mobilisations populaires pendant la période qui vient c’est quelque chose de bien plus grave, bien plus féroce, bien plus verrouillé que ce qu’on avait jusqu’à présent.
En quoi ce nouveau modèle économique s’applique ? Premièrement, et ça c’était l’une des premières choses que le gouvernement Tsipras II a fait à l’automne dernier, ce qu’on appelle la recapitalisation des banques grecques, c’est-à-dire leur vente à des fonds spéculatifs, après avoir absorbé près de 40 milliards d’argent public, pour lequel le contribuable grec, le peuple grec, s’est endetté, tout cela a été revendu à des prix complètement ridicules à des fonds spéculatifs.
Donc le système bancaire grec qui se trouvait majoritairement sous contrôle étatique en réalité, même si ce contrôle n’était pas actif, avec toutes les injections qui avaient été faites de fonds publics et de recapitalisation, est maintenant entièrement passé dans les mains d’un secteur privé, de fonds privés et de fonds privés étrangers d’ailleurs, donc le secteur financier a été complètement cédé aux vautours de la finance internationale. Et c’est la première grande réforme du gouvernement Tsipras II.
Le deuxième mécanisme c’est celui de la dette. Alors évidemment je ne vais pas développer ce point, (devant Éric [Toussaint], ce serait complètement ridicule, il va vous dire ce qui est nécessaire), ce que je veux simplement souligner, c’est que l’un des bluffs de ce très grand bluffeur et manipulateur qu’est Alexis Tsipras au cours de la dernière période, ça a été de dire, écoutez ok on va passer des mesures douloureuses etc. on peut pas faire autrement, nanani nananère, mais on obtiendra un allègement de la dette. Allègement de la dette, allègement de la dette, la promesse de l’allègement de la dette, on a fait un deal vous verrez, etc. Le résultat est qu’on a eu ces mesures d’austérité féroces et tout le reste, les réformes de structure dont je vais parler, et évidemment aucun allègement sur la dette, une vague promesse que la discussion va reprendre à partir de 2018 (Éric nous en dira davantage).
Donc deuxième crime. Moi je considère que tout ça c’est des crimes. Et je ne le considère pas personnellement, Éric pourra nous en dire davantage, c’est des choses qui sont passibles pénalement, pour tous les gouvernements antérieurs, et évidemment Syriza a été le premier à le dire, et maintenant pour le gouvernement Syriza II.
Troisième chose, les privatisations. Alors là on entre dans quelque chose qui est du jamais vu. Ce qui a été voté par le Parlement grec c’est la constitution d’une agence nouvelle, qui vient se substituer à l’agence existante des privatisations, et qui par rapport à l’ancienne, qui s’appelait Taiped, présente trois différences.
Premièrement, c’est une agence qui a une structure de société privée, ce n’est pas une agence publique, même d’un point de vue formel, légal.
Deuxièmement, elle a été créée pour une durée de 99 ans, contre 6 pour l’agence qui existait déjà.
Troisièmement, sont passés sous son contrôle la to-ta-li-té des actifs publics de l’Etat grec contre 25 actifs de l’agence qui existait jusqu’à présent. Je dis bien la totalité des actifs de l’Etat grec. La première liste provisoire est de 11.900 actifs.
C’est le plus gigantesque transfert de propriété jamais opéré dans un pays européen de l’ouest, je mets ici évidemment sous une catégorie séparée les pays des anciens régimes du socialisme dit réel, c’est l’opération du plus gigantesque transfert de propriété jamais opéré dans un pays occidental (il y avait un article du Guardian d’ailleurs très explicite sur cette question).
Que va faire cette agence ? Elle va vendre tout jusqu’à hauteur des 50 milliards d’euros, c’est ça l’objectif, dont les recettes seront consacrées à 50% pour la consolidation des banques qui sont passées sous le contrôle du secteur privé, à hauteur de 25 % pour le remboursement de la dette, et à hauteur de 25% pour des investissements non spécifiés. Le Conseil d’Administration de cette nouvelle société, entièrement indépendant de tout contrôle politique, est fait de 5 membres, 3 sont nommés par le gouvernement grec sous condition explicite d’avoir reçu l’approbation préalable de la Troïka, les deux autres sont nommés directement par la Troïka. Et c’est pour 99 ans. La presse économique internationale a immédiatement interprété cette durée totalement incroyable, c’est du jamais vu, dans aucun pays quelle que soit l’étendue des conditions de privatisations n’a été créé une agence qui fonctionne selon ces principes, comme un désaveu de toute « confiance » des institutions financières internationales par rapport à la Grèce.
Cerise sur le gâteau, dans le modèle économique, pour débloquer une tranche supplémentaire de prêt, qui est due en septembre, en plus des 7 milliards qui vont être débloqués dans les jours qui viennent, la Troïka a demandé tout un nombre de conditions supplémentaires, concernant les taxes etc., mais le noyau dur c’est une réforme du code du travail, et ceci alors que les conventions collectives en Grèce ont déjà été supprimées, ça n’existe plus, le seul verrou législatif qui existe c’est le Smic, alors vous vous demandez si le système des conventions collectives a été démantelé qu’est ce qui reste à démanteler ? Eh bien ce qui reste à démanteler c’est : la libération complète des licenciements collectifs, la restriction du droit de grève, qui est pour le moment le plus favorable en Europe, la diminution de la protection dont jouissent les syndicalistes et les délégués syndicaux et la diminution drastique du financement public qui est destiné aux syndicats.
Voilà ce qui est au menu des négociations d’ici le mois de septembre. À ceci s’ajoutent les réformes de structure. Les réformes de structure sont essentiellement au nombre de deux. Premièrement a été créé un Conseil de discipline fiscale, depuis l’automne dernier, composé de sept membres, là encore dont la nomination se fait par le ministère des finances mais qui exige l’accord préalable de la Troïka. Quelle est la tâche de ce Conseil ? La tâche de ce Conseil, qui était déjà prévue en tant que telle par le mémorandum, est d’activer des coupes budgétaires automatiques si les objectifs d’excédents budgétaires ne sont pas atteints, donc s’il y a un soupçon qu’ils ne seront pas atteints. Or dans une économie qui est en récession pour la septième année consécutive, et malgré un véritable écrasement de la dépense publique, l’objectif qui est fixé est un excédent budgétaire primaire, c’est-à-dire avant le remboursement de la dette, de 3,5 % du PIB pour à l’horizon 2018.
C’est des choses qu’aucune économie au monde même les plus puissantes n’est en mesure d’assurer. Donc il est certain d’avance que cet objectif complètement irréaliste ne va pas être tenu et les coupes budgétaires seront activées par le mécanisme qui vient d’être voté maintenant et donc juridiquement verrouillé par le Parlement grec de ce que les grecs appellent « κόπτης [kóptis] » ça veut dire au sens strict « le coupeur », c’est-à-dire c’est ce mécanisme automatique qui va faire les coupes sans même que les coupes passent par un vote parlementaire, par un simple décret. Donc dépossession complète vraiment de ce qui pouvait exister encore de contrôle de la politique, de ce qui restait de contrôle de la politique macroéconomique, bon en réalité très peu vu les mémorandums.
Deuxième réforme de structure, le Secrétariat d’Etat aux revenus, ce qu’on appellerait ici le Trésor Public je pense, est devenu complètement indépendant. Alors il était déjà autonome, c’est-à-dire qu’il pouvait décider de façon propre de son budget et de ses actions. Ça c’était une condition qui avait été posée dès le premier mémorandum et c’est l’un des obstacles d’ailleurs auxquels le premier gouvernement Syriza a dû faire face. La vice-ministre de l’économie, Nadia Valavani, a écrit des textes extrêmement intéressants qui racontent les démêlés justement du ministère pendant les premiers mois du premier gouvernement Syriza quand il a essayé de passer un minimum de mesures favorables aux couches populaires. Mais là ça devient une agence complètement indépendante dont les décisions ont valeur de décrets ministériels, qui a l’exclusivité de l’interprétation de la législation en matière fiscale, qui est contrôlée directement par des gens approuvés par la Troïka, et en réalité ça veut dire que la Troïka contrôle directement la collecte des taxes, de l’impôt et du revenu de l’Etat grec.
Donc on contrôle les taxes, on contrôle les dépenses, le secteur financier est parti, la politique monétaire est à Frankfort. Qu’est-ce qui reste ? Il reste que la Grèce est devenue un grand Kosovo. Voilà, en gros. Et cela se fait sous un gouvernement, Syriza, qui dans les votes parlementaires n’a eu qu’une seule perte en terme de voix et de députés c’est-à-dire moins que ce que le Pasok et la Nouvelle Démocratie avaient subi comme pertes au parlement de leur propre groupe parlementaire quand ils étaient au gouvernement et faisaient passer des mesures similaires.
Intervention d’une personne dans le public : « Ça veut dire qu’il n’y a qu’un député qui les a abandonnés ? »
Kouvelakis répond et reprend : Un seul oui, une seule députée, qui a démissionné. Elle a même, démissionné ce qui veut dire que son siège a été rempli par le suppléant qui est un loyaliste elle n’a même pas pris la décision disons de garder son siège et de continuer à avoir une présence indépendante au Parlement (elle a voté contre deux mesures principales, c’était pas contre l’ensemble du paquet).
Alors la deuxième chose maintenant, et je vais conclure cette présentation par cela : quel est l’état d’esprit qui existe en Grèce à l’heure actuelle ?
Il ne faut pas se raconter des histoires, on est dans l’onde de choc de la défaite. Les réactions sociales qu’il y a eu, des réactions sur le fond social en termes de mobilisations ou de grèves, étaient les plus faibles qu’on ait vues depuis le début de la période des mémorandums. Alors bien sûr on peut chercher des explications, l’état délabré du mouvement syndical, les choix qui sont faits par des directions syndicales pour leur majorité corrompues qui, là, ont été aidées par la tactique à la fois attentiste et extrêmement sectaire du parti communiste. Mais ce qui à mon avis est encore plus important que cela c’est le climat de démoralisation qui existe dans la société. Les gens ont reçu un énorme coup de massue sur la tête et l’état d’esprit qui règne c’est que quoi qu’on fasse, quoi qu’on vote, à la fin on se retrouve avec un mémorandum et il n’y a aucune issue qui apparaît à ce tunnel.
Et il faut bien comprendre que l’issue n’apparaît pas à ce tunnel car la barre est placée toujours à ce niveau-là, c’est une perspective, si perspective alternative il y a, ce n’est pas pour construire une petite force minoritaire qui va continuer à accumuler des forces, même si en réalité on ne peut pas faire autre chose pour l’instant que ça, mais pour la société ce qu’elle ne voit pas c’est quelque chose qui trace une véritable voie alternative. Et cela veut dire que c’est un constat d’échec pour l’ensemble des forces qui ont lutté y compris celles qui ont lutté contre le tournant et la capitulation de Syriza, et on pourra revenir, pendant la discussion si vous voulez, sur les raisons plus profondes.
Alors ma dernière remarque de conclusion sera la suivante : je crois que la vraie discussion qui a commencé en Europe c’est celle sur ce qu’on appelle les plans B, les plans alternatifs. Alors vous savez qu’il y a déjà eu deux initiatives, l’une à Paris, l’autre à Madrid, Éric a participé aux deux il pourra nous en dire davantage. L’idée de ce plan B pour l’Europe c’est que il faut, si vous voulez, des plans B qui soient adaptés aux diverses réalités et qui tirent la leçon de ce qui s’est passé en Grèce. C’est-à-dire il est absolument clair que si on s’engage dans une perspective de rupture avec l’austérité et avec le néolibéralisme sans avoir prévu les moyens concrets pour mener la confrontation avec les institutions européennes, avec l’Union Européenne, y compris d’ailleurs avec l’euro, avant tout d’ailleurs avec l’euro pour les pays qui en font partie, et avec les classes dominantes au niveau national, ces expériences n’auront pas d’issue différente que celle de la Grèce. Et par rapport à ça, c’est bien sûr insuffisant comme conclusion mais c’est à mon avis le point de départ obligé pour toute réflexion, il faut absolument abandonner les illusions et les discours sur changer l’actuelle Union Européenne, réformer l’actuelle Union Européenne, changer graduellement le rapport de force, rejeter les gens qui proposent des solutions de rupture comme soit disant des nationalistes ou des gens qui veulent le repli national. Tout ceci en Grèce a fait la preuve du fait qu’il ne pouvait conduire qu’au désastre. C’est un discours de l’impuissance politique. La rupture avec cela est une condition absolument pas suffisante mais tout à fait nécessaire pour engager une réflexion sur le sujet.
Mais il faut aller au-delà. Et l’Union Européenne ce n’est pas simplement l’euro et l’utilisation politique de l’euro comme cela a été fait en Grèce pour briser tout gouvernement national qui veut rompre avec les politiques d’austérité. L’Union Européenne c’est un modèle économique qui produit de la polarisation en son sein, qui produit des divergences et des polarisations croissantes entre les pays dits du centre et les pays de la périphérie. Et il y a deux périphéries en réalité en Europe, il y a la périphérie du sud européen au sens où je parlais auparavant et il y a la périphérie de l’est européen également. Et l’Union Européenne ce n’est pas simplement ce qui se passe à l’intérieur de l’Union Européenne, c’est aussi ce qui se passe à l’extérieur de l’Union Européenne. On ne peut pas ici ne pas appeler les choses par leur nom. L’Union Européenne n’est pas simplement une construction qui verrouille le néolibéralisme. Elle n’est pas simplement une construction qui détruit la démocratie, dépossède les peuples et les citoyens de leurs moyens de contrôle et d’action, à quelque niveau que ce soit. C’est une machine impérialiste. Ce n’est pas un impérialisme unifié bien sûr. Il n’y a pas un impérialisme européen en tant que tel. Mais la France est un pays impérialiste. Et François Hollande a été le président le plus va-t-en-guerre qu’on a vu pendant ces dernières décennies. François Hollande est dans la continuité de Guy Mollet, Emmanuel Valls évidemment de Jules Moch. La Grande-Bretagne aussi est un pays impérialiste. Et l’Allemagne est un pays qui n’a pas un impérialisme militaire mais qui a un impérialisme économique, et pour laquelle la construction européenne est précisément le cadre où se déploie son impérialisme économique. Et l’euro a bien entendu été conçu dans cette perspective-là.
Mais l’Union Européenne fonctionne comme un impérialisme unifié sur au moins un niveau, et je terminerai vraiment là par ça.
C’est la construction de l’Europe forteresse, qui est l’autre face justement de la construction européenne. Et, comme cela était tout à fait prévisible, la capitulation complète de Tsipras, au niveau du mémorandum, au niveau du néolibéralisme, au niveau des politiques d’austérité, au niveau de la démocratie, a été suivie par sa bruyante approbation de l’accord inique qui a été signé entre l’Union Européenne et la Turquie, qui empêche les réfugiés d’accéder à l’Europe et qui transforme la Grèce en garde-chiourme de la forteresse européenne.
Parce que c’est ça le rôle qui est dévolu aux néo-colonisés. C’est d’accepter docilement le sort qui leur est fait et de servir de flics de la forteresse, pour empêcher que les va-nu-pieds du sud global atteignent les pays du centre impérialistes, prospères et repus dans leur richesse.
Et par rapport à cela il faut souligner, et c’est de mon côté la seule nouvelle positive que j’ai eu de la Grèce à une échelle significative, que la société grecque a réagi de manière positive et solidaire, dans sa majorité bien sûr, par rapport à cette situation. Je dirais que c’est une solidarité des humbles, c’est une solidarité de ceux qui se sentent eux aussi écrasés, qui n’ont pas peut-être perdu la mémoire qu’une partie importante de la population grecque actuelle vient également de vagues de réfugiés, a vécu la situation de réfugiés, leurs ancêtres ont vécu la situation de réfugiés en 1922, et a donc refusé de suivre les discours racistes, xénophobes, qui n’ont pas manqué, mais ce n’est pas eux qui l’ont emporté dans la réaction de la société.
Et je pense que cette réaction solidaire de la société montre qu’il reste des réflexes profonds qui pour le moment ne peuvent pas trouver une voie collective et articulée pour s’exprimer mais qui dans l’avenir constitueront le socle de la résistance et de la mobilisation populaire à venir.
Stathis KOUVELAKIS.
Eric Toussaint : « Après la capitulation de SYRIZA quelles stratégies pour la Gauche en Europe ? » Dix propositions pour avancer.
L’intervention fait suite à celle Stathis Kouvélakis avec qui il donnait une conférence le 4 juin 2016 à Paris sur le thème.
Eric Toussaint présente dix propositions concernant les mesures prioritaires qu’une force de gauche, prétendant arriver au gouvernement, s’engage à prendre en cas de victoire électorale et de participation à un gouvernement. Ensuite il revient sur le bilan de la Grèce entre fin 2010 et 2015.
Lien : https://youtu.be/QgjpBslNQdc
Renaud Vivien : « Comment remettre en cause le programme d’austérité grec, un an après sa signature ? »
http://www.cadtm.org/Comment-remettre-en-cause-le
httpv://youtu.be/XHgEWAGZaf8