RELIGION DU CAPITAL
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ORAISON DOMINICALE :
Capital, notre père, qui êtes de ce monde, Dieu tout-puissant, qui changez le cours des fleuves et percez les montagnes, qui séparez les continents et unissez les nations ; créateur des marchandises et source de vie, qui commandez aux rois et aux sujets, aux patrons et aux salariés, que votre règne s’établisse sur toute la terre.
Donnez-nous beaucoup d’acheteurs prenant nos marchandises, les mauvaises et aussi les bonnes ;
Donnez-nous des travailleurs misérables acceptant sans révolte tous les travaux et se contentant du plus vil salaire ;
Donnez-nous des gogos croyant en nos prospectus :
Faites que nos débiteurs payent intégralement leurs dettes et que la Banque escompte notre papier ;
Faites que Mazas ne s’ouvre jamais pour nous et écartez de nous la faillite ;
Accordez-nous des rentes perpétuelles.
Amen.
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CREDO :
Je crois au Capital qui gouverne la matière et l’esprit ;
Je crois au Profit, son fils très légitime, et au Crédit, le Saint-Esprit, qui procède de lui et est adoré conjointement ;
Je crois à l’Or et à l’Argent, qui, torturés dans l’Hôtel de la Monnaie, fondus au creuset et frappés au balancier, reparaissent au monde Monnaie légale, et qui, trouvés trop pesants, après avoir circulé sur la terre entière, descendent dans les caves de la Banque pour ressusciter Papier-monnaie ;
je crois à la Rente cinq pour cent, au quatre et au trois pour cent également et à la Cote authentique des valeurs ;
je crois au Grand-Livre de la Dette publique, qui garantit le Capital des risques du commerce, de l’industrie et de l’usure ;
je crois à la Propriété individuelle, fruit du travail des autres, et à sa durée jusqu’à la fin des siècles ;
je crois à l’Éternité du Salariat qui débarrasse le travailleur des soucis de la propriété ;
je crois à la Prolongation de la journée de travail et à la Réduction des salaires et aussi à la Falsification des produits ;
je crois au dogme sacré :
ACHETER BON MARCHÉ ET VENDRE CHER ;
et pareillement je crois aux principes éternels de notre très sainte église, l’Économie politique officielle.
Amen.
Paul Lafargue, « La religion du capital » (1887).
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Le danger des coups d’État et du despotisme militaire ne cessera d’exister que lorsque l’armée permanente sera abolie et que la nation sera armée. »
Paul Lafargue, dans « Le Socialiste », 23 juillet 1887.
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Maximes de la sagesse divine
1. – Le matelot est assailli par la tempête ; le mineur vit entre le grisou et les éboulements, l’ouvrier se meut au milieu des roues et des courroies de la machine de fer ; la mutilation et la mort se dressent devant le salarié qui travaille : le capitaliste qui ne travaille pas est à l’abri de tout danger.
2 – Le travail éreinte, tue et n’enrichit pas : on amasse de la fortune, non pas en travaillant, mais en faisant travailler les autres.
3 – La propriété est le fruit du travail et la récompense de la paresse.
4 – On ne tire pas du vin d’un caillou, ni des profits d’un cadavre : on n’exploite que les vivants. Le bourreau qui guillotine un criminel fraude le capital d’un animal à exploiter.
5 – L’argent et tout ce qui rapporte n’ont point d’odeur.
6 – L’argent rachète ses qualités honteuses par sa quantité.
7 – L’argent tient lieu de vertu à celui qui possède,
8 – Un bienfait n’est pas un bon placement portant intérêt.
9 – En se couchant mieux vaut se dire j’ai fait une bonne affaire qu’une bonne action.
10 – Le patron qui fait travailler les salariés quatorze heures sur vingt-quatre ne perd pas sa journée.
11 – N’épargne ni le bon, ni le mauvais ouvrier, car le bon comme le mauvais cheval a besoin de l’éperon.
12 – L’arbre qui ne donne pas de fruits doit être arraché et brûlé ; l’ouvrier qui ne porte plus de profits doit être condamné à la faim.
13 – L’ouvrier qui se révolte, nourris-le avec du plomb.
14 – La feuille du mûrier prend plus de temps à se transformer en satin que le salarié en capital.
15 – Voler en grand et restituer en petit, c’est la philanthropie.
16 – Faire coopérer les ouvriers à l’édification de sa fortune, c’est la coopération.
17 – Prendre la plus grosse part des fruits du travail, c’est la participation.
18 – Le capitaliste, libertaire fanatique, ne pratique par l’aumône ; car elle enlève au sans-travail la liberté de mourir de faim.
19 – Les hommes ne sont rien de plus que des machines à produire et à consommer : le capitaliste achète les uns et court après les autres.
20 – Le capitaliste à deux langues dans sa bouche, l’une pour acheter et l’autre pour vendre.
21 – La bouche qui ment donne la vie à la bourse.
22 – La délicatesse et l’honnêteté sont les poisons des affaires.
23 – Voler tout le monde ce n’est voler personne.
24 – Démontre que l’homme est capable de dévouement ainsi que le caniche, en te dévouant à toi-même.
25 – Méfie-toi du malhonnête homme, mais ne te fie pas à l’homme honnête.
26 – Promettre prouve de la bonhomie et de l’urbanité, mais tenir sa promesse dénote de la faiblesse mentale.
27 – Les pièces de monnaie sont frappées à l’effigie du souverain ou de la République, parce que, comme les oiseaux du ciel, elles n’appartiennent qu’à celui qui les attrape.
28 – Les pièces de cent sous se relèvent toujours après être tombées, même dans l’ordure.
29 – Tu t’inquiètes de beaucoup de choses, tu te crées bien des soucis, tu t’efforces d’être honnête, tu ambitionnes le savoir, tu brigues les places, tu recherches les honneurs ; et tout cela n’est que vanité et pâture de vent ; une seule chose est nécessaire : le Capital, encore le Capital.
30 – La jeunesse se fane, la beauté se flétrit, l’intelligence s’obscurcit, l’or, seul, ne se ride, ni ne vieillit.
31 – L’argent est l’âme du capitaliste et le mobile de ses actions.
32 – Je le dis en vérité, il y a plus de gloire à être un portefeuille bourré d’or, et de billets de banque, qu’un homme plus chargé de talents et de vertus que l’âne portant des légumes au marché.
33 – Le génie, l’esprit, la pudeur, la probité, la beauté n’existent que parce qu’ils ont une valeur vénale.
34 – La vertu et le travail ne sont utiles que chez autrui.
35 – Il n’y a rien de meilleur pour le capitaliste que de boire, manger et paillarder : c’est aussi ce qui lui restera de plus certain quand il aura terminé ses jours.
36 – Tant qu’il demeure parmi les hommes qu’éclaire et que réchauffe le soleil, le capitaliste doit jouir, car on ne vit pas deux fois la même heure et on n’échappe pas à la méchante et à la vilaine vieillesse qui saisit l’homme par la tête et le pousse dans le tombeau.
37 – Au sépulcre où tu vas, tes vertus ne t’accompagneront pas ; tu ne trouveras que des vers.
38 – Hors un ventre plein et digérant gaillardement et des sens robustes et satisfaits, il n’y a que vanité et rongement d’esprit.
Paul Lafargue, « La religion du capital » (1887).
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Nombreux textes intégraux téléchargeables sur la mine insondable du site de l’UQAC :
http://classiques.uqac.ca/classiques/lafargue_paul/lafargue_paul.html
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Source : ‘Précieuses pépites’ sur Plan C. Pdf à télécharger librement (11 ans de boulot 🙂 ) :
https://old.chouard.org/Europe/precieuses_pepites.pdf
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Fil Facebook correspondant à ce billet :
https://www.facebook.com/etienne.chouard/posts/10154222320887317
Bonjour Etienne,
Pour info C.Sannat parle de toi aujourd’hui et surtout de F.Lenglet (soit-diant économiste de plateau TV)
http://www.insolentiae.com/pour-francois-lenglet-il-faut-sortir-de-leuro-sauf-quand-il-est-sur-france‑2/
Guillaume Meurice pose une (très) bonne question : et si on arrêtait de verser des dividendes [à des « frelons oisifs », comme Marat les appelait pendant la révolution française] pour baisser les prix [ou pour augmenter les salaires] ?
Marchés publics, Le moment Meurice par franceinter
Mais les capitalistes ne comprennent pas l’intérêt de l’idée de réfléchir au scandaleux (injustifiable et déplorable) COÛT DU CAPITAL 🙂
Emmanuel Todd : « Si je fais la somme de ce que les socialistes ont fait, le bon concept est violent et doux à la fois : il s’agit du fascisme rose »
http://www.atlantico.fr/decryptage/emmanuel-todd-fais-somme-que-socialistes-ont-fait-bon-concept-est-violent-et-doux-fois-agit-fascisme-rose-2718343.html
En septembre 1995, tout était déjà dit et annoncé :
– deux dixièmes ;
– tittytainment.
Du 27 septembre 1995 au 1er octobre 1995, à San Francisco, le grand hôtel Fairmont accueille 500 membres de l’élite mondiale : chefs d’Etat, hommes politiques, dirigeants d’entreprises multinationales, universitaires, chercheurs, etc.
Cette réunion du Fairmont se déroule dans le cadre de la fondation de Mikhaïl Gorbatchev. Elle a une grande importance historique. Elle fait intervenir Mikhaïl Gorbatchev, George Bush père, George Schultz, Margaret Thatcher, Ted Turner de l’entreprise CNN, John Gage de l’entreprise Sun Microsystems, ainsi que des dizaines d’autres personnalités de tous les continents. Elle a pour thème « l’avenir du travail ».
Citation :
« L’avenir, les pragmatiques du Fairmont le résument en une fraction et un concept : « Deux dixièmes » et « tittytainment ».
Dans le siècle à venir, deux dixièmes de la population active suffiraient à maintenir l’activité de l’économie mondiale. « On n’aura pas besoin de plus de main d’œuvre », estime le magnat Washington Sycip. Un cinquième des demandeurs d’emploi suffira à produire toutes les marchandises et à fournir les prestations de services de haute valeur que peut s’offrir la société mondiale. Ces deux dixièmes de la population participeront ainsi activement à la vie, aux revenus et à la consommation – dans quelque pays que ce soit. Il est possible que ce chiffre s’élève encore d’un ou deux pour cent, admettent les débatteurs, par exemple en y ajoutant les héritiers fortunés.
Mais pour le reste ? Peut-on envisager que 80 % des personnes souhaitant travailler se retrouvent sans emploi ? « Il est sûr, dit l’auteur américain Jeremy Rifkin, qui a écrit le livre La Fin du travail, que les 80 % restants vont avoir des problèmes considérables. » Le manager de Sun, John Gage, reprend la parole et cite le directeur de son entreprise, Scott McNealy : à l’avenir, dit-il, la question sera « to have lunch or be lunch » : avoir à manger ou être dévoré.
Cet aréopage de haut niveau qui était censé travailler sur « l’avenir du travail » se consacre ensuite exclusivement à ceux qui n’en auront plus. Les participants en sont convaincus : parmi ces innombrables nouveaux chômeurs répartis dans le monde entier, on trouvera des dizaines de millions de personnes qui, jusqu’ici, avaient plus d’accointances avec la vie quotidienne confortable des environs de la baie de San Francisco qu’avec la lutte quotidienne pour le survie à laquelle doivent se livrer les titulaires d’emplois précaires. C’est un nouvel ordre social que l’on dessine au Fairmont, un univers de pays riches sans classe moyenne digne de ce nom – et personne n’y apporte de démenti.
L’expression « tittytainment », proposée par ce vieux grognard de Zbigniew Brzezinski, fait en revanche carrière. Ce natif de Pologne a été quatre années durant conseiller pour la Sécurité nationale auprès du président américain Jimmy Carter. Depuis, il se consacre aux questions géostratégiques. Tittytainment, selon Brzezinski, est une combinaison des mots entertainment et tits, le terme d’argot américain pour désigner les seins. Brzezinski pense moins au sexe, en l’occurrence, qu’au lait qui coule de la poitrine d’une mère qui allaite. Un cocktail de divertissement abrutissant et d’alimentation suffisante permettrait selon lui de maintenir de bonne humeur la population frustrée de la planète. »
(Hans-Peter Martin, Harald Schumann, Le piège de la mondialisation, Solin Actes Sud, p.12)
http://www.placedeslibraires.fr/livre/9782742731046-le-piege-de-la-mondialisation-martin/
En août 2007, Zbigniew Brzezinski deviendra le conseiller du candidat démocrate Barack Obama. En janvier 2009, Barack Obama sera élu président des Etats-Unis.
http://thecaucus.blogs.nytimes.com/2007/08/24/brzezinski-offers-support-for-obama/?_r=0
En septembre 1995, pour empêcher les 80 % de la population de se révolter et de faire la révolution, Zbigniew Brzezinski déclare qu’il faut leur donner du « tittytainment ». Cette expression « tittytainment » me rappelle Juvénal quand il parlait du peuple romain :
« Depuis qu’il n’y a plus de suffrages à vendre, [le peuple romain] n’a cure de rien ; lui qui jadis distribuait les pleins pouvoirs, les faisceaux, les légions, tout enfin, il a rabattu de ses prétentions et ne souhaite plus anxieusement que deux choses : du pain et des jeux ! »
(Juvénal, Satires, traduction Pierre de Labriolle et François Villeneuve, Les Belles Lettres, p.127)
httpv://youtu.be/wsixsRI-Sz4
Les deux dernières minutes de cette intéressante interview avec Elon Musk évoquent très brièvement ce que pourrait être le système politique sur Mars.
Elon Musk parle d’une démocratie directe (moins susceptible à la corruption qu’une démocratie représentative dit-il). Il dit qu’il souhaiterait qu’il soit plus facile d’abolir une loi que d’en créer une.
Il est dommage que le sujet n’est été abordé seulement quand il n’y avait plus de temps pour discuter, peut être Musk aurait il put apporter quelques éléments originaux…
En tout cas il serait peut être temps pour nous d’écrire une Constitution martienne 😉
Carole, première bénéficiaire suisse d’un revenu « inconditionnel » de 2260 euros
« Cette jeune zurichoise a été tirée au sort par un collectif qui promeut l’instauration d’un revenu de base « inconditionnel », c’est-à-dire versé à tous sans condition. Les Suisses sont appelés à se prononcer ce dimanche pour ou contre son instauration dans l’ensemble de la Confédération.
http://www.lefigaro.fr/social/2016/06/02/09010–20160602ARTFIG00318-carole-premiere-beneficiaire-suisse-d-un-revenu-inconditionnel-de-2260-euros.php
Carole, zurichoise diplômée en ethnologie, est à 30 ans la première Suisse à percevoir un revenu de base inconditionnel, de 2500 francs suisses mensuels, soit 2260 euros. Gagnante d’un tirage au sort organisé par un groupe de citoyens zurichois, elle recevra cette somme pendant un an, sans avoir besoin de fournir un quelconque travail en contrepartie.
Le collectif « Grundeinkommen für dich », « un revenu de base pour toi » en français, est en effet parvenu à collecter 32.518 francs suisses via le site de crowdfunfing Wemakeit, auprès de quelque 500 internautes. 30.000 francs seulement étaient nécessaires au versement du revenu de base à une personne pendant un an, si bien que désormais, le collectif s’attèle à financer le versement d’un revenu de base à un deuxième chanceux. Carole, quant à elle, explique dans une vidéo vouloir consacrer cet argent à se former. « C’est un énorme soulagement de savoir que je peux faire des études tout en ayant un revenu assuré », y explique-t-elle.
Les promoteurs du revenu de base inconditionnel souhaitent en effet permettre à tous « de mener une existence digne et de participer à la vie publique », quels que soient les revenus perçus ou la situation professionnelle. Ils souhaitent délivrer les Suisses des contingences matérielles. « Que ferais-tu si ton revenu était garanti ? », demandent les organisateurs dans une vidéo de promotion publiée sur leur site. « créer, aimer, rêver », « chercher un travail qui me plaît réellement » ou « devenir écrivain » répondent les Suisses interrogés.
Une taxe sur les transactions électroniques
Car au-delà du cas individuel de Carole et des futurs gagnants de la loterie du collectif, il s’agit de convaincre l’ensemble des citoyens de la Confédération du bien-fondé d’un tel revenu, alors qu’ils s’apprêtent à voter dimanche pour ou contre son instauration à l’échelle nationale. « Nous voulons expérimenter [le revenu de base inconditionnel] maintenant tous ensemble afin d’en savoir plus », explique le collectif. » […]
religion ô combien dénoncée par l’Eglise de la très Sainte Consommation (à Lille) et son pape 40
https://youtu.be/HE3MDSTaK2o
https://youtu.be/cmMwPv9rtj0
bien à vous
Important et passionnant papier, signalé par Coralie Delaume sur son blog :
Une idéologie à la source de nos problèmes : le néolibéralisme (The Guardian)
http://l‑arene-nue.blogspot.fr/2016/06/une-ideologie-la-source-de-nos.html
[À voir] L’encerclement (Richard Brouillette)
La démocratie dans les rets du néolibéralisme :
httpv://youtu.be/OgCTn7MM6uU
Avec :
Ignacio Ramonet
François Denord
Noam Chomsky
Jean-Luc Migué
Normand Baillargeon
Susan George
Oncle Bernard (Maris)
Omar Aktouf
François Brune
Michel Chossudovsky