La juge Emma Arbuthnot refuse de se récuser dans le simulacre de procès de Julian Assange ! La séparation des pouvoirs ne suffit pas pour garantir les Droits de l’Homme ! il faut instituer UN POUVOIR POPULAIRE au-dessus de TOUS les pouvoirs.

28/02/2020 | 0 commentaires

La juge Emma Arbuthnot refuse de se récuser dans le simulacre de procès de Julian Assange

Par Thomas Scripps
12 juillet 2019

La juge Emma Arbuth­not a refu­sé de se récu­ser des audiences d’extradition de Julian Assange, le fon­da­teur de Wiki­Leaks. Voi­là à quoi res­semble la « jus­tice de classe ».

Arbuth­not, magis­trat en chef et juge de dis­trict supé­rieur pour l’Angleterre et le Pays de Galles, bafoue les prin­cipes juri­diques fon­da­men­taux pour s’assurer qu’elle pré­side un simu­lacre de pro­cès contre Assange. Le pro­cès doit reprendre au Tri­bu­nal de pre­mière ins­tance à West­mins­ter le 24 février pro­chain. En cas d’extradition, Assange fait face à des accu­sa­tions en ver­tu de la Loi sur l’espionnage aux États-Unis et encourt une peine d’emprisonnement de 175 ans. D’autres accu­sa­tions sont en ins­tance, qui pour­raient inclure la peine de mort.

La juge Emma Arbuthnot, magistrat en chef et juge de district supérieur pour l’Angleterre et le Pays de Galles.

La juge Emma Arbuth­not, magis­trat en chef et juge de dis­trict supé­rieur pour l’Angleterre et le Pays de Galles.

Le « Guide sur la conduite des juges » (« Guide to Judi­cial Conduct) en Angle­terre et au Pays de Galles, publié en 2018, sti­pule que « l’indépendance judi­ciaire est une pierre angu­laire de notre sys­tème de gou­ver­ne­ment dans une socié­té démo­cra­tique et une pro­tec­tion de la liber­té et des droits du citoyen dans le cadre de l’État de droit. La magis­tra­ture doit être per­çue comme indé­pen­dante des organes légis­la­tif et exé­cu­tif du gou­ver­ne­ment, tant à titre indi­vi­duel que dans son ensemble ».

Arbuth­not aurait dû se récu­ser d’office sur cette base.

Son mari, James Nor­wich Arbuth­not, est un membre conser­va­teur de la Chambre des Lords. Il est inti­me­ment lié aux forces armées et aux ser­vices de sécu­ri­té bri­tan­niques, dont les opé­ra­tions cri­mi­nelles ont été expo­sées par WikiLeaks.

En tant que dépu­té conser­va­teur, Lord Arbuth­not a pré­si­dé, entre 2005 et 2014, le Comi­té spé­cial de la défense, l’organe qui super­vise le minis­tère de la Défense et les forces armées bri­tan­niques. Il était en poste lors des opé­ra­tions mili­taires en cours en Afgha­nis­tan et en Irak, ain­si que des guerres pour le chan­ge­ment de régime en Libye et en Syrie.

Il est actuel­le­ment copré­sident du conseil consul­ta­tif du fabri­cant bri­tan­nique de maté­riel de défense Thales et membre du conseil consul­ta­tif de l’Institut royal des ser­vices unis pour les études de défense et de sécu­ri­té (RUSI). Lord Arbuth­not est éga­le­ment un ancien direc­teur d’une socié­té de conseil en sécu­ri­té et en ren­sei­gne­ment, SC Stra­te­gy, où il a tra­vaillé pen­dant deux ans aux côtés des codi­rec­teurs Lord Car­lile et Sir John Scarlett.

Car­lile est un émi­nent défen­seur du MI5 qui a sou­te­nu la Loi sur les pou­voirs d’enquête de 2016 (sur­nom­mée la « Charte des foui­neurs ») qui per­met à l’État bri­tan­nique d’accéder aux dos­siers de connexion Inter­net sans man­dat. Il a fait valoir que les révé­la­tions d’Edward Snow­den sur la sur­veillance de masse per­pé­trée illé­ga­le­ment par l’État « équi­va­laient à un acte cri­mi­nel ». Il a super­vi­sé la mise en œuvre de la légis­la­tion anti­ter­ro­riste et exa­mi­né les pro­cé­dures de sécu­ri­té natio­nale en Irlande du Nord.

Scar­lett est l’ancien direc­teur du MI6 et l’ancien pré­sident du Comi­té mixte du ren­sei­gne­ment (JIC) du gou­ver­ne­ment. Il a super­vi­sé la pro­duc­tion d’un rap­port qui plaide en faveur du droit des ser­vices secrets à « col­lec­ter des don­nées de com­mu­ni­ca­tion en masse ». Enfin, il a eu la res­pon­sa­bi­li­té de com­pi­ler le « dos­sier dou­teux » sur les armes de des­truc­tion mas­sive en Irak.

Les acti­vi­tés de Lord Arbuth­not et de ses col­lègues ont fait l’objet de mil­liers de révé­la­tions de Wiki­Leaks. La base de don­nées de Wiki­Leaks contient près de 2.000 réfé­rences à Thales et près de 450 à RUSI. Lord Arbuth­not lui-même peut être trou­vé dans plus de 50 entrées.

Comme l’ont fait valoir l’équipe juri­dique d’Assange et le rap­por­teur de l’ONU sur la tor­ture, Nils Mel­zer, ce « conflit d’intérêts grave » oblige Lady Arbuth­not à se reti­rer de l’affaire Assange. Son mari a consa­cré toute sa vie poli­tique à écra­ser la trans­pa­rence et la res­pon­sa­bi­li­té pré­co­ni­sées par WikiLeaks.

Le « Guide sur la conduite des juges » sti­pule expli­ci­te­ment que « Lorsqu’un proche membre de la famille d’un juge est poli­ti­que­ment actif, le juge doit gar­der à l’esprit la pos­si­bi­li­té que, dans cer­taines pro­cé­dures, cette acti­vi­té poli­tique puisse sou­le­ver des pré­oc­cu­pa­tions quant à l’impartialité du juge et son déta­che­ment du pro­ces­sus poli­tique et doit agir en conséquence ».

De plus, « une ani­mo­si­té per­son­nelle à l’égard d’un par­ti est aus­si une rai­son impé­rieuse de disqualification ».

L’animosité d’Arbuthnot envers Assange a été ren­due publique.

Aucun argu­ment juri­dique ne convain­cra Arbuth­not de se récu­ser. Ses liens fami­liaux avec les ser­vices de sécu­ri­té sont la rai­son pour laquelle elle a été choi­sie pour super­vi­ser cette affaire. La classe diri­geante bri­tan­nique exige qu’un fonc­tion­naire approuve le trans­fert d’Assange aux États-Unis, ce qui équi­vaut à une res­ti­tu­tion extraordinaire.

Deux pré­cé­dents cas de juges qui se sont récu­sés d’affaires judi­ciaires anglaises offrent un contraste frap­pant avec l’affaire du fon­da­teur de WikiLeaks.

La pre­mière concerne Arbuth­not elle-même. En août 2018, elle a été contrainte de se reti­rer d’un pro­cès contre Uber après que l’Observateur eut révé­lé que son mari avait un inté­rêt com­mer­cial dans la socié­té de trans­port via SC Stra­te­gy et son client, la Qatar Invest­ment Autho­ri­ty. Un porte-parole judi­ciaire a décla­ré : « Dès que ce lien lui a été signa­lé, elle a confié l’affaire à un autre juge. C’est essen­tiel que les juges soient non seule­ment abso­lu­ment impar­tiaux, mais qu’ils soient per­çus comme tels. »

Ces pré­oc­cu­pa­tions ne semblent pas exis­ter dans le cas d’Assange. Aucun article dans les médias grand public n’a fait état de la contra­dic­tion fla­grante entre les actions d’Arbuthnot en 2018 et celles d’aujourd’hui.

Le deuxième cas est celui d’un juge qui ne s’est pas récu­sé en 1998. Il s’agissait de la ten­ta­tive d’extradition de l’ancien dic­ta­teur, tor­tion­naire et bour­reau chi­lien Augus­to Pino­chet pour faire face à des accu­sa­tions pénales en Espagne.

Lord Hoff­mann a été sévè­re­ment atta­qué pour ne pas avoir éta­bli clai­re­ment ses liens avec le groupe de défense des droits humains Amnes­ty Inter­na­tio­nal, qui était une par­tie dans l’affaire. Il a été pré­sident du ser­vice de col­lecte de fonds de l’organisme de bien­fai­sance à titre béné­vole. Hoff­mann avait été l’un des trois juges sur cinq (Lords juristes) à voter en faveur de l’annulation d’une déci­sion de la Haute Cour qui confir­mait l’immunité de Pino­chet contre les pour­suites judi­ciaires en rai­son de son sta­tut de chef d’État au moment de ses crimes. Dans un geste sans pré­cé­dent, le ver­dict de la Chambre des Lords contre Pino­chet (impli­quant Hoff­mann) a été annu­lé par cinq juges et n’a été recon­fir­mé qu’un an plus tard, la plu­part des accu­sa­tions por­tées contre Pino­chet ayant été inva­li­dées par d’importantes réserves.

Les Lords juristes, diri­gés par Lord Browne-Wil­kin­son, ont déve­lop­pé des argu­ments qui exi­ge­raient abso­lu­ment qu’Arbuthnot se récuse dans l’affaire Assange. Aupa­ra­vant, pour qu’un juge soit auto­ma­ti­que­ment dis­qua­li­fié d’une affaire, il fal­lait qu’il ait un inté­rêt finan­cier dans son issue. La déci­sion de Lord Browne-Wil­kin­son a éten­du le prin­cipe de la dis­qua­li­fi­ca­tion auto­ma­tique aux caté­go­ries beau­coup plus larges d’«intérêts » non finan­ciers ou de sou­tien à des « causes ».

Le ver­dict d’annulation a accep­té l’affirmation de Pino­chet selon laquelle le droit à un pro­cès équi­table lui avait été refu­sé en ver­tu de l’article 6 de la Conven­tion euro­péenne des droits de l’homme, qui sti­pule que « tout juge pour lequel il y aurait rai­son légi­time de craindre un manque d’impartialité doit se retirer ».

Les dénon­cia­tions d’Hoffmann ont été bru­tales. Le Guar­dian a rap­por­té le 16 jan­vier 1999 que cinq Lords juristes avaient « cri­ti­qué Lord Hoff­mann pour avoir bafoué le prin­cipe fon­da­men­tal selon lequel “la jus­tice ne doit pas seule­ment être ren­due, mais doit être vue comme telle”. Cette cri­tique dévas­ta­trice a jeté le doute sur l’avenir de Lord Hoff­mann en tant que Lord juriste ».

Le Guar­dian pour­suit : « Les juges accusent Lord Hoff­mann d’avoir igno­ré un prin­cipe judi­ciaire de base appris par chaque étu­diant en pre­mière année de droit. La règle est si bien connue, a décla­ré Lord Hope, qu’aucun tri­bu­nal civil du Royaume-Uni n’a vu son juge­ment annu­lé pour une vio­la­tion de cette règle au cours de ce siècle… “Les juges sont bien conscients qu’ils ne devraient pas sié­ger dans une affaire dans laquelle ils ont le moindre inté­rêt per­son­nel, que ce soit comme défen­deur ou comme pro­cu­reur”, a décla­ré Lord Hope. »

« Lord Hut­ton a dit que la confiance du public dans l’intégrité de l’administration de la jus­tice serait ébran­lée si le vote déci­sif de Lord Hoff­mann selon lequel le géné­ral Pino­chet pour­rait être pour­sui­vi était maintenu. »

En jan­vier 2000, le ministre de l’Intérieur du gou­ver­ne­ment tra­vailliste de Blair, Jack Straw, est inter­ve­nu pour pro­té­ger le meur­trier de masse, en annu­lant la déci­sion de la Chambre des Lords et insis­tant pour que les pro­cé­dures d’extradition soient sus­pen­dues en rai­son de la mau­vaise san­té pré­su­mée de Pino­chet. Pino­chet est reve­nu au Chi­li le 3 mars, atter­ris­sant à l’aéroport de San­tia­go où il s’est levé de son fau­teuil rou­lant aux accla­ma­tions de ses par­ti­sans fascisants.

De toute évi­dence, « l’impartialité judi­ciaire » signi­fie une chose lorsqu’il s’agit de défendre un dic­ta­teur bru­tal et allié de longue date de l’impérialisme amé­ri­cain et bri­tan­nique. C’en est une autre quand il s’agit de per­sé­cu­ter un jour­na­liste de renom­mée mon­diale qui a dénon­cé les crimes de la classe dirigeante.

Du point vue de l’impérialisme, le scalp d’Assange est abso­lu­ment néces­saire pour pour­suivre ses guerres de conquête de style colo­nial et la guerre mon­diale contre les droits sociaux et démo­cra­tiques de la classe ouvrière. Pour le faire taire à jamais, non seule­ment le pou­voir judi­ciaire, mais aus­si l’appareil d’État tout entier et ses défen­seurs dans les médias se débar­rassent de toute pré­ten­tion démo­cra­tique et libérale.

Le Par­ti de l’é­ga­li­té socia­liste sou­tient les reven­di­ca­tions des par­ti­sans d’As­sange qui demandent à Arbuth­not de se récu­ser. Mais nous lan­çons l’avertissement que la seule force capable de libé­rer Assange est la classe ouvrière inter­na­tio­nale mobi­li­sée dans une lutte poli­tique col­lec­tive contre la classe diri­geante et son appa­reil judiciaire.

(Article paru en anglais le 11 juillet 2019)

Source : WSWS juillet 2019

https://​www​.wsws​.org/​f​r​/​a​r​t​i​c​l​e​s​/​2​0​1​9​/​0​7​/​1​2​/​a​r​b​u​-​j​1​2​.​h​tml

Mon com­men­taire :

Cette enquête sur les gra­vis­simes conflits d’in­té­rêts des juges en train de mar­ty­ri­ser Assange en toute impu­ni­té est consternante.

1) Wiki­leaks ou RSF ou WSWS ne pour­raient-ils pas enquê­ter et publier le cv com­plet (avec pho­to et adresse) de la juge Vanes­sa Barait­ser, pour faire connaître aux citoyens les conflits d’in­té­rêts et rai­sons per­son­nelles d’être aus­si par­tiale et injuste de ce « juge » stalinien ?

2) Cette totale impu­ni­té d’une injus­tice criante pousse à réflé­chir en amont aux ins­ti­tu­tions mêmes de la justice.

Nous n’a­vons pas de constitution.

À l’é­vi­dence, la sépa­ra­tion des pou­voirs ne suf­fit pas pour garan­tir les Droits de l’Homme ! il faut ins­ti­tuer UN POUVOIR POPULAIRE au-des­sus de TOUS les pouvoirs.

Ce pou­voir popu­laire s’exer­ce­rait à tra­vers des Chambres de contrôle, tirées au sort et for­mées pour bien jouer leur rôle, dédiées à chaque pou­voir : Chambre de contrôle des juges, Chambre de contrôle des forces armées, Chambre de contrôle des élus, Chambre de contrôle des banques, Chambre de contrôle de l’in­for­ma­tion (médias, ins­ti­tuts de son­dages et de sta­tis­tiques, infor­ma­tion sur le pro­ces­sus élec­to­ral), etc.

La for­ma­tion des magis­trats et leur indé­pen­dance doit abso­lu­ment être recon­si­dé­rée par leurs vic­times, les citoyens qui les paient pour rendre la Justice.

SEULS les citoyens eux-mêmes (direc­te­ment) sont LÉGITIMES (et APTES) à écrire puis défendre une vraie consti­tu­tion (digne de ce nom).

Voi­là un beau sujet pour vos pro­chains ate­liers consti­tuants per­son­nels : le pou­voir judi­ciaire, nomi­na­tion et contrôle des magistrats.

#FreeAs­sange
#Grè­ve­Gé­né­ra­le­Cons­ti­tuante

Étienne.

Fil Face­book cor­res­pon­dant à ce billet :
https://​face​book​.com/​s​t​o​r​y​.​p​h​p​?​s​t​o​r​y​_​f​b​i​d​=​1​0​1​5​7​9​4​6​3​2​8​3​4​7​3​1​7​&​i​d​=​6​0​0​9​2​2​316

Pour m'aider et m'encourager à continuer, il est désormais possible de faire un don.
Un grand merci aux donatrices et donateurs : par ce geste, vous permettez à de beaux projets de voir le jour, pour notre cause commune.
Étienne

Catégorie(s) de l'article :

0 commentaires

Laisser un commentaire

Derniers articles

Essai pour un contrôle populaire des institutions – DÉFINITION, FORCE ET ENJEUX DE LA CONSTITUTION : pourquoi nous sommes complètement fous de ne pas nous y intéresser en priorité absolue (3 vidéos intégrales et texte)

Essai pour un contrôle populaire des institutions – DÉFINITION, FORCE ET ENJEUX DE LA CONSTITUTION : pourquoi nous sommes complètement fous de ne pas nous y intéresser en priorité absolue (3 vidéos intégrales et texte)

Chers amis, Je récapitule, sur ma chaîne et dans ce billet, les vidéos que j'ai conçues et publiées pour Une Nôtre Histoire pour faire le point sur la démocratie et les institutions, en insistant évidemment sur l'importance prioritaire d'un processus constituant...